Dans son dernier rapport (2017/2018), Amnesty international affirme que les autorités tunisiennes ont continué à renouveler l’état d’urgence et l’ont utilisé pour justifier des restrictions arbitraires au droit de circuler librement.
“Les autorités ont renouvelé l’état d’urgence dans l’ensemble du pays à cinq reprises dans l’année, pour des périodes allant d’un à trois mois”.
Dans son rapport publié jeudi 22 février, Amnesty International accuse la police d’avoir procédé à des arrestations arbitraires et des perquisitions de domicile en l’absence de mandat judiciaire.
Selon l’ONG, la torture et la maltraitance persistent en Tunisie dans l’impunité totale, faisant observer que le travail de l’Instance nationale pour la prévention de la torture (INPT), créée en 2013, a encore été freiné par le manque de coopération du ministère de l’Intérieur et de soutien financier de la part du gouvernement.
Sur un autre plan, l’organisation regrette que la loi tunisienne érige en infractions les relations sexuelles librement consenties entre personnes du même sexe. En septembre dernier, ajoute l’organisation dans le même ordre d’idées, la Tunisie a accepté une recommandation émise dans le cadre de l’EPU (mécanisme du Conseil des droits de l’Homme) lui demandant de mettre un terme aux examens anaux.
Abordant la pénurie d’eau qui “s’aggrave” dans le pays, Amnesty indique que le gouvernement tunisien avait déclaré ne pas avoir de stratégie garantissant un accès équitable à cette ressource.
Selon l’organisation, les pénuries d’eau survenues ces dernières
années ont eu des incidences disproportionnées sur la distribution d’eau, entraînant notamment des coupures d’eau répétées dans des régions marginalisées, ce qui a provoqué localement des manifestations pendant toute l’année 2017.
En ce qui concerne la Justice transitionnelle, Amnesty International constate qu’aucune avancée n’a été obtenue quant à l’adoption d’un protocole d’accord entre l’Instance Vérité et Dignité (IVD), et le ministère de la Justice pour permettre le renvoi des affaires devant des chambres spécialisées.
Plusieurs organes gouvernementaux, dont les ministères de l’Intérieur, de la Défense et de la Justice, n’avaient toujours pas fourni à l’IVD les informations demandées pour ses enquêtes.
Au sujet de la peine de mort, l’organisation fait observer que les tribunaux ont prononcé au moins 25 condamnations à mort à l’issue de procès concernant des affaires en lien avec la sécurité nationale. Elle ne reconnaît toutefois qu’aucune exécution n’a eu lieu dans le pays depuis 1991.
En outre, sur les droits des femmes, Amnesty International met en avant les avancées accomplies, notamment dans le domaine juridique. Elle rappelle l’adoption en juillet dernier, par le Parlement, de la loi relative à l’élimination de la violence à l’égard des femmes, qui apporte plusieurs garanties pour la protection des femmes et des filles contre la violence liée au genre.
L’organisation se félicite aussi de l’abrogation de l’article 227 bis du Code pénal, qui permettait aux hommes accusés de viol sur une jeune fille de moins de 20 ans d’échapper aux poursuites en épousant la victime.
Amnesty relève toutefois, que lors d’un remaniement ministériel en septembre dernier, le nombre de femmes ministres a
diminué, passant de quatre à trois sur 28 ministères, ce qui a aggravé la sous représentation des femmes au sein du gouvernement.
Amnesty International a salué l’action menée par la société civile tunisienne pour bloquer un projet de loi consacrant l’impunité des forces de l’ordre, à travers l’incrimination de toute forme de critique adressée à la police.