En janvier 2017, Rached Ghannouchi a reçu Rahmatu Tijani, présidente du Conseil des partis politiques africains (CPPA). Cette rencontre était exceptionnelle parce que le président du mouvement Ennahdha n’a pas l’habitude de recevoir des personnalités de pays d’Afrique subsaharienne. Du moins pas en grand nombre.
En effet, dans l’agenda super chargé du leader islamiste, il n’y avait de place que pour les représentants des «Grands» pays et de ceux faisant partie de la même mouvance politique et idéologique. Mais, cela c’était avant. Car l’Afrique subsaharienne est, désormais, dans le viseur du parti islamiste.
Les douze derniers mois en ont apporté la preuve, qui ont vu le mouvement Ennahdha multiplier les initiatives dans ce sens.
Certes, ce parti a commencé depuis près de cinq ans à s’intéresser à l’Afrique. En 2013, il a participé à la création du Conseil des partis politiques africains (CPPA) –sur recommandation de l’Union africaine- au sein duquel il est représenté par Amor Belkhiria, cadre du parti et président de l’Association Namaa Tunisie. Toutefois, cet intérêt a mis du temps à se matérialiser de manière tangible.
En effet, il a fallu attendre près de cinq ans pour voir le penchant du mouvement Ennahdha pour l’Afrique subsaharienne se concrétiser.
D’abord, en mars 2017 on a vu Amor Belkhiria –le Monsieur Afrique du parti islamiste- créer le Conseil Economique Africain (CEA), s’en faire désigner comme président et obtenir que le siège en soit installé à Tunis.
A la même période, Ennahdha a accueilli et organisé le congrès constitutif du Conseil Economiques des partis politiques africains. Une structure appelée à faire la promotion à l’international des économies africaines et des opportunités qu’elles offrent et à jouer un rôle de facilitateur entre les hommes d’affaires et les gouvernements.
Continuant sur sa lancée, Ennahdha a convié le premier forum économique africain à la mi-janvier 2018 à Tunis, auxquelles ont pris part des hommes d’une vingtaine de pays africains, de Turquie, du Mexique et d’Italie.
Face à la faiblesse du courant des échanges inter-africains, le mouvement Ennahdha veut susciter à un –beaucoup- plus grand effort afin d’y pallier et ce, souligne le président du Conseil Economique Africain, en obligeant «les partis politiques à développer leur rôle, afin d’activer le commerce et les échanges économiques». A cet effet, le premier forum économique africain a dédié la deuxième journée de ses travaux à des rencontres B2B entre opérateurs actifs dans divers secteurs.
Il aura fallu moins d’une année au mouvement Ennahdha pour élaborer et lancer sa stratégie de conquête de l’Afrique subsaharienne. Pour ce faire, le parti islamiste a mis à profit sa «filière» soudanaise –développée et entretenue, notamment par Rached Ghannouchi, depuis plus de vingt-cinq ans- et plus particulièrement ses relations avec Nafie Ali Nafie, un personnage qui connaît bien la Tunisie et que la Tunisie d’avant le 14 janvier 2011 connaît bien. En effet, ce conseiller du président Omar Al Bachir et secrétaire général du Conseil des partis politiques africains –que le mouvement Ennahdha a invité à son congrès- avait assisté en novembre 2010 au 22ème Symposium du Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD).