La subvention des hydrocarbures coûtera à la Tunisie, en 2018, 3 milliards de dinars, contre 1,5 milliard de dinars initialement prévus (pour ces produits et l’électricité) dans le budget de 2018, en raison de la hausse des prix du baril (actuellement à 64 dollars) et la non application de la réforme relative à l’ajustement automatique des prix de ces produits.
Ces propos sont ceux du ministre chargé des Réformes majeures auprès du chef du gouvernement, Taoufik Rajhi, qui s’exprimait à l’occasion du séminaire du partenariat de Deauville, organisé jeudi 29 courant à Tunis, sur la mise en œuvre des réformes.
Rajhi a souligné que la réforme du système de subvention des hydrocarbures prévoyait des ajustements automatiques des prix chaque trimestre, mais jusqu’à présent seuls deux ajustements ont été effectués.
Le ministre a évoqué les obstacles qui ont entravé la mise en œuvre des réformes majeures dont a besoin le pays pour pouvoir changer de modèle économique, citant l’instabilité politique et les changements de gouvernements ainsi que la conceptualisation et la priorisation des réformes, tâche qui prend beaucoup de temps compte tenu des capacités limitées de l’administration publique.
“L’administration tunisienne n’a pas la capacité de travailler sur autant de lois (à réformer) en un laps de temps court”, a-t-il précisé.
Afin de parer à ces difficultés, il a eu recours à l’assistance technique apportée par plusieurs organisations internationales et la création d’un ministère chargé des Réformes dont il assure lui-même la charge.
Parmi les difficultés auxquelles est confronté le processus de réformes en Tunisie, le ministre a cité le consensus ou plutôt l’absence de consensus à titre d’exemple, en ce qui concerne la réforme de la retraite et la résolution des problèmes des caisses sociales.
Cette grande réforme est bloquée depuis 2015, et afin de dépasser ce blocage, une commission à présidence tournante et comprenant des représentants de toutes les parties concernées dont l’UTICA et l’UGTT, a été créée en 2016, au niveau de la présidence du gouvernement. Et après 10 mois consacrés au travail de diagnostic, la commission a abouti aux mêmes résultats, obtenus auparavant par le gouvernement tout seul (nécessité d’augmenter l’âge du départ à la retraite et les cotisations sociales), d’après le responsable gouvernemental. en dépit de ce travail collectif, la proposition relative à l’augmentation de la contribution des employeurs de deux points a été refusée par leurs représentants, a rappelé Rajhi.
Le ministre a souligné la particularité de l’expérience tunisienne dont les réformes sont menées parallèlement, au processus de transition démocratique.
Le séminaire organisé conjointement, par la présidence du gouvernement et l’OCDE, a été dédié aux expériences de certains pays qui ont réussi de grandes réformes à l’instar du Portugal, le Mexique et l’Italie.
Pour Alvaro S. Pereira, ancien ministre portugais de l’Economie et de l’Emploi, il vaut mieux s’approprier les réformes que de les réaliser parce qu’elles sont dictées par les autres, en ayant entre autres l’adhésion de l’administration publique.
La priorité doit être donnée aux réformes qui ont un impact important sur le PIB et il ne faut pas hésiter à s’attaquer aux oligopoles et à la corruption, selon ses propos.
Pour l’ambassadeur du Mexique auprès de l’OCDE et ancienne vice-ministre des Communications, Monica Aspe, le consensus doit être requis pour toutes les réformes auprès des partenaires politiques et sociaux qui n’ont pas le droit d’accepter quelques unes et de refuser les autres.
Elle a ajouté que, pour son pays, les réformes ont été détaillées dans un document global signé par toutes les parties, soulignant l’importance de la transparence, de la lutte contre la corruption et de la compétence dans la gestion de ces réformes.
Prenant l’exemple de l’enseignement, l’ancienne ministre mexicaine a affirmé que la réforme dans ce domaine a permis d’évaluer et d’agréer la compétence d’un million d’enseignants sur deux millions concernés.