La Banque Centrale de Tunisie (BCT) a affiché un résultat positif de l’ordre de 385 millions de dinars (MD), à fin 2017, contre 221 MD, une année auparavant, ce qui représente une évolution de plus de 74%, selon le dernier rapport sur “Les états financiers de l’exercice 2017”, publié sur le site web de l’institut d’émission.
L’expert comptable spécialiste dans le domaine financier, Haythem Amor, a souligné, dans une déclaration à l’agence TAP, “certes, c’est un bon résultat réalisé par la BCT, qui n’a pas pour vocation de réaliser des bénéfices. Il se présente comme une bouffée d’oxygène, puisque ce montant sera versé dans la trésorerie de l’Etat et servira à consolider le budget de l’Etat. Mais, derrière cela, se cache une intervention historique de l’institut de l’émission, sur le marché financier, au vu que ce résultat a été favorisé, essentiellement, par un engagement accentué de la BCT, dans le refinancement des banques de la place”.
Amor a précisé que le besoin des établissements bancaires en refinancement a évolué de 54%, à fin décembre 2017, par rapport à la même période de 2016, passant de 5,5 milliards de dinars, à 8,5 milliards de dinars.
Le refinancement des banques a atteint un record historique, ces derniers mois. A la date du 29 mars 2018, l’enveloppe mobilisée pour le refinancement s’est située au niveau de 13,4 milliards de dinars, contre 7,8 milliards de dinars, à la même date de l’année écoulée, ce qui représente une hausse de plus de 71%, selon la Banque Centrale.
D’autre part, le volume de refinancement a évolué, en raison de l’augmentation du taux directeur appliqué sur les crédits octroyés par la BCT, aux banques tunisiennes. Le taux directeur a été révisé à la hausse à deux reprises en 2017 (en avril et en mai), pour totaliser une hausse de 0,75%, passant de 4,25% à 5%, avant la dernière augmentation, en mars 2018, qui a porté le taux directeur, à 5,75%.
D’après l’expert comptable, ce besoin accru en refinancement, exprimé par les banques, est du à la régression du pouvoir d’achat des consommateurs et à l’accroissement des coûts de production, notamment ceux des matières premières.
“C’est un résultat évident de l’inflation qui a atteint, en février dernier 7,2%. En effet, avec la hausse des prix, les besoins des ménages et des investisseurs en matière de crédits bancaires, deviennent plus importants”, a-t-il relevé.
Il est à noter que l’encours des crédits bancaires destinés aux consommateurs tunisiens a connu une évolution de 110% entre 2010 et 2017, pour se situer au niveau de 22,5 milliards de dinars. L’Institut national de la consommation a précisé, récemment, que ces crédits représentent 29%, du total des emprunts contractés par les banques implantées en Tunisie.
Le besoin de refinancement des banques est du, également, à la baisse de liquidités sur le marché, ce qui a poussé la BCT à émettre de nouveaux billets. Et pour preuve, la valeur des ” billets et monnaies en circulation ” a évolué de plus de 1, 5 milliard de dinars, entre 2016 et 2017, pour se situer au niveau de 11,7 milliards de dinars.
Amor a expliqué ce manque de liquidités par “un retrait d’importants montants du marché, qui ne sont pas réinjectés, ensuite”. Ce sont des montants qui échappent du circuit bancaire et formel, et qui “sont fort probablement, absorbés par le marché parallèle”.
D’après l’expert comptable, les bénéfices qui peuvent être réalisés par une banque centrale sont théoriquement confortés par son intervention sur le marché financier, mais aussi, par une meilleure gestion du stock des réserves en devises du pays, qui ce n’est pas le cas pour la BCT.
Se référant toujours aux “Etats financiers pour 2017 de la BCT”, l’expert comptable a fait état de la baisse des intérêts provenant des placements à terme des devises, dans des banques étrangères, lesquels sont passés de 149 MD, à 138 MD, entre 2016 et 2017, et ce, “en raison de la régression de nos avoirs en devises d’une part et de la baisse du taux de rendement de l’euro à l’échelle internationale, d’autre part, surtout que notre panier de devises est composé essentiellement, d’euros (47%)”.
Dans ce cadre, il a précisé que “nos avoirs en devises ont régressé de 13,1 milliards de dinars, à fin 2016, à 12,9 milliards de dinars à fin 2017 et voici qu’ils se situent au niveau de 11,3 milliards de dinars, en date du 30 mars 2018”.
D’après l’expert comptable, il ressort également, du rapport de la BCT, que la valeur des “engagements de garantie donnés dans le cadre d’emprunts extérieurs (le principal de la dette), a augmenté à 25,7 milliards de dinars à fin 2017, contre 19,5 milliards de dinars en 2016, en raison de la dépréciation du dinar”.
A noter, que le dinar a perdu encore, de sa valeur face à l’euro passant de 2,46 à 2,98, de fin mars 2017 à fin mars 2018, et aussi face au dollar pour se situer au niveau de 2,41, contre 2,30 durant la même période.