Deux jours de grève au port de Radès nous coûtent 1 MDT en termes de coûts directs. Les pertes indirectes sont colossales parce que la paralysie du port et autant de bateaux en rade donnent une image catastrophique d’un pays qui veut redorer son blason et améliorer son classement à l’international.
«Et ce n’est certainement pas en observant autant de grèves que les choses s’arrangeront et pour le secteur import et pour le site Tunisie qui perd de plus en plus de places à l’international», estime Salem Nebghaa, membre du bureau exécutif de l’UTICA qui tient à préciser que la crise ne tient pas autant des augmentations tarifaires que préconise le gouvernement que d’un problème de gouvernance. «Les défaillances touchent en premier lieu l’efficience dans la gestion des affaires de la société et la productivité qui fait défaut».
A la CONECT (Confédération des entreprises citoyennes de Tunisie), c’est l’indignation face à cette «grève anarchique observée par les agents de la Société Tunisienne d’Aconage et de Manutention (STAM) au Port de Radès, les 30 et 31 mars 2018, ayant provoqué un arrêt total des activités au port et paralysé les mouvements de marchandises à l’export et à l’import, causant de graves préjudices aux relations et aux engagements des opérateurs économiques tunisiens avec leurs partenaires étrangers et locaux».
La CONECT rappelle que «de par ses faibles niveaux de rendement par rapport aux normes internationales d’usage et à ceux des pays concurrents et voisins, la situation particulière de monopole des activités d’aconage et de manutention à Radès et les perturbations fréquentes dues aux mouvements sociaux fréquents, le Port de Radès continue à constituer l’un des plus graves goulots d’étranglement pour l’économie tunisienne surtout que plus de 80% de nos échanges de marchandises à l’export et à l’import passent par ce port».
Quant à la Fédération des textiles, elle déplore que la reprise modeste des activités des exportations, en stagnation depuis plusieurs années, soit découragée par de telles pratiques.
«Sans vouloir s’immiscer dans un conflit qui ne la concerne pas, la FTTH assure que cette grève et les raisons qui la sous-tendent a non seulement provoqué de sérieux préjudices à l’activité de commerce extérieur, mais risque de l’amplifier davantage».
Sur un tout autre volet, la FTTH précise que les augmentations de tarifs des prestations portuaires vont éroder ce regain fragile de compétitivité laborieusement acquis et que cette grève est une prise en otage implicite des opérateurs économiques directement concernés par l’activité d’import-export».
«Gouvernement réveille-toi, le monde évolue, tu nous écrases par ta médiocrité»
Pour Chokri Mamoghli, universitaire et économiste, «la privatisation de la STAM constituerait une très bonne décision. Cette société publique est responsable du transbordement du fret dans l’ensemble des ports tunisiens et est derrière l’augmentation sans précédent des coûts logistiques (transport, stockage, manutention) dont souffrent les entreprises tunisiennes».
M. Mamoghli rappelle que les coûts logistiques de cette société étaient de l’ordre de 12% de la valeur du fret en 2010 et qu’ils flirtent aujourd’hui avec les 30%. Il dénonce la corruption, l’absentéisme, la vétusté du matériel, l’explosion des effectifs, les hausses injustifiées des salaires qui seraient derrière la catastrophe (grève) qui a un impact direct sur la compétitivité de l’économie nationale.
«La privatisation de ce boulet apporterait de l’argent frais au budget de l’Etat et favoriserait le retour à des niveaux de coûts raisonnables et des délais de passages par les ports acceptables. Ils sont de plusieurs semaines chez nous alors qu’ils ne sont que d’une heure à Dubaï, Singapour ou Rotterdam».
S’agissant du futur port en eaux profondes, poursuit-il, il faudra faire en sorte que son exploitation soit confiée dès le départ à un opérateur privé mondial. Celui-ci peut être occidental, chinois ou arabe à l’instar de ce qu’ont fait nos voisins algériens avec le Dubaï Ports World gestionnaire de certains des plus grands ports au monde».
Et Chokri Mamoghli d’interpeller les décideurs publics: «gouvernement, réveille-toi, le monde évolue, tu nous écrases par ta médiocrité».
Non mais où allons-nous avec tous ces Etats qui gouvernent en l’absence d’un véritable Etat !
A.B.A