Depuis une quinzaine d’années, l’Afrique a trouvé le chemin d’une croissance forte. Elle est aujourd’hui l’une des deux régions les plus dynamiques de la planète et le retour sur investissement y est globalement le plus élevé. Le XXIème siècle sera africain, au-moins en partie.
Les progrès de l’Afrique sont spectaculaires. D’après le FMI, le PIB des 48 pays subsahariens aura cru en moyenne entre 5 et 7 % l’an depuis 2003.
Sur la dernière décennie, six des 10 économies où la croissance aura été la plus élevée dans le monde sont africains. Cinq pays africains auront fait mieux que la Chine et 21 mieux que l’Inde !
Pendant longtemps, cette croissance était tirée par des investissements publics dans les infrastructures et la lutte contre la pauvreté, contre le sida et la malaria, sur financements publics internationaux, par l’annulation et le recyclage de la dette extérieure.
Depuis une dizaine d’années, une nouvelle demande s’exprime, tirée par des investissements privés productifs dans les domaines des services, de l’industrie manufacturière, des mines et de l’énergie, mais aussi par le développement considérable des télécommunications : de quelques millions de portables en 2010, l’Afrique est passée à plus de 750 millions aujourd’hui. De plus en plus de pays y participent. Dès 2006, les IDE ont dépassé l’aide internationale et aujourd’hui, ils en représentent le double.
L’Afrique est un potentiel qui s’exprime déjà. Elle est courtisée par les grandes puissances émergentes.
L’Afrique n’en reste pas moins confrontée à de multiples défis
Le premier de ces défis est sa jeunesse : l’âge moyen en Afrique subsaharienne est de 18,6 ans. Il est de 25 ans en Afrique du Nord et au Moyen-Orient (MENA). Cela générera 108 millions d’élèves en plus sur les 10 prochaines années.
Aujourd’hui, moins de 40% des jeunes en âge d’y prétendre accèdent à l’enseignement secondaire.
En 2010, la jeunesse africaine (entre 15 et 24 ans) représentait 14% de son homologue mondiale. En 2100, cette proportion sera de 39%. L’Afrique sera le réservoir de la jeunesse du monde.
En 2050, 21% de la force de travail mondiale sera en Afrique subsaharienne, contre à peine 10% aujourd’hui. La population active mondiale sera largement africaine.
La jeunesse africaine est de plus en plus éduquée. Elle est branchée sur les outils de la technologie et de la modernité. L’Afrique compte aujourd’hui plus d’un milliard de téléphones portables. Ce sont là les outils de l’entrepreneuriat mais aussi de la révolution, comme l’ont montré les exemples de la Tunisie, de l’Egypte et d’ailleurs. Cette jeunesse n’acceptera ni le chômage, ni la précarité, ni les emplois sous-qualifiés.
La croissance seule ne fait pas le développement. L’entrée de l’Afrique dans une ère de croissance forte ne la met pas à l’abri des soubresauts politiques et sociaux.
L’histoire récente dans les pays arabes nous permet de tirer quelques enseignements. De grandes similarités existent entre les évolutions attendues en Afrique subsaharienne sur les dix prochaines années et le parcours des pays d’Afrique du Nord sur les dix dernières.
Le développement résulte de la conjonction de 4 dimensions : la croissance -nécessaire mais insuffisante-, les institutions, la gouvernance et l’inclusion.
L’Afrique devra trouver les modalités de faire que sa croissance ait un contenu plus fort en emplois dignes et en rapport avec les capacités et les aspirations de sa jeunesse.
La lutte contre les inégalités et une meilleure participation des populations à la définition de leurs besoins, à leur mise en œuvre et au partage des fruits de la croissance sont des défis considérables pour l’Afrique de demain.
Sur les dix dernières années, la croissance -accompagnée de discriminations économiques et sociales- a souvent approfondi les inégalités et aggravé les antagonismes enfouis. De multiples lignes de rupture réapparaissent : tribales, religieuses et raciales.
Des sous-ensembles économiques régionaux sont déjà effectifs en Afrique. La Tunisie, par son adhésion récente à la COMESA, par sa signature des premiers accords de la Zone de libre-échange continentale et aussi par son statut à devenir partenaire de la CEDEAO, a pris ce chemin vertueux de l’intégration africaine. Le niveau des infrastructures, surtout transfrontalières et structurantes, est encore faible. Les bailleurs de fonds internationaux en ont pris conscience. Ils travaillent à y remédier avec les pays et les instances régionales.
L’Afrique est aujourd’hui une terre de promesses. Bob Geldof y est arrivé à travers l’aide humanitaire. Depuis, il a monté un fonds d’investissement en capital-risque dédié à l’Afrique d’un montant de 200 millions de dollars.
De multiples exemples de success stories existent en Afrique. Plusieurs sont présentés parmi nous aujourd’hui.
Les promesses sont énormes en Afrique
La Chine l’a compris. Elle investit avec frénésie dans un échange infrastructures contre ressources naturelles. Elle est aujourd’hui le premier partenaire commercial de l’Afrique devant les Etats-Unis. Son commerce avec l’Afrique dépasse de loin le montant de l’aide internationale que reçoit le continent. L’Europe est loin derrière.
À nous Africains de nous mobiliser pour le développement de notre continent. Nous en avons les moyens. Nous en avons la compétence. Il suffit que nous en ayons la volonté.
Je ne voudrais pas terminer sans saluer la présence, parmi nous, des 15 présidents des associations d’étudiants africains en Tunisie. Ils sont un témoignage vivant de ce que nous aimerions que le partenariat et la coopération africains soient au service de leurs populations, de leurs jeunesses et plus généralement de leurs sociétés civiles.
Radhi MEDDEB
Commissaire général du Forum économique africain.