Adel Bouhoula qui avait été nommé Directeur Général du Centre National de l’Informatique (CNI) en octobre 2017, est professeur de l’enseignement supérieur à l’Ecole supérieure des communications de Tunis (Sup’Com) et professeur invité à l’Université de Tsukuba au Japon, apprend par la presse son limogeage de la direction du CNI. Réaction.
J’ai pris acte du communiqué sur le Web du 15/05/2018 concernant la nomination d’un nouveau directeur général du Centre National d’Informatique (CNI) alors que bizarrement je n’ai pas été informé personnellement en tant que directeur général actuel du CNI. Face à cette situation rocambolesque, je me suis demandé pourquoi il en est ainsi.
Peut-être à cause de ma proposition d’éloigner les employés ayant une appartenance politique déclarée de la gestion directe des applications manipulant des données sensibles. Non pas que je doute de leurs impartialité et intégrité mais afin de les protéger en cas de problèmes et afin de préserver la crédibilité du centre. Ce dernier critère doit être à mon sens la valeur intrinsèque de l’entreprise.
Peut-être à cause du service d’édition de l’extrait de naissance en ligne qui n’a pas été déployé le 16 avril 2018 tel annoncé par le chef du gouvernement le 28 mars 2018. En effet, un prototype a été développé et présenté par le CNI; mais le Ministère a adressé un traitement d’indifférence aux employés du CNI en passant leurs efforts dans le développement du prototype sous silence dans le communiqué officiel.
En plus, l’annonce, suite au conseil stratégique de l’économie numérique le 29 mars 2018, de l’accélération de la création de l’agence du développement du numérique (ADN), a créé une atmosphère d’indignation et de protestation parmi la grande majorité des employés du centre qui croient que les objectifs de l’ADN se croisent avec ceux du CNI. Ceci a freiné le développement du service.
De surcroît, le déploiement de ce dernier nécessite le dévouement de plusieurs intervenants externes au centre et qui jusqu’au jour d’aujourd’hui n’ont pas honoré leurs parts du travail. En sus, même si le déploiement du service est terminé, il ne pourra pas être exploité directement à cause de l’absence d’un cadre juridique réglementaire régissant l’opération et le manque d’outils de vérification de l’authenticité et de l’intégrité de l’extrait de naissance édité chez les services bénéficiaires.
Ou peut-être à cause de ma réticence de prendre des sanctions disciplinaires à l’encontre des employés du centre participants à des manifestations de protestation journalières. Sachant que les éventuelles sanctions pourraient toucher la majorité du personnel, j’ai considéré sage de ne pas envenimer la situation afin d’assurer le bon déroulement des activités critiques du centre : assurer le bon déroulement des élections municipales, la continuité des services de traitement des salaires des fonctionnaires de l’Etat, gestion du budget de l’Etat, etc.
Ou peut-être à cause de la non préparation du cahier des charges pour l’acquisition d’une plate-forme d’interopérabilité. J’ai opté pour faire confiance au personnel du centre afin de développer et mettre en place avec leurs propres moyens cette plate-forme en open source au lieu de l’acheter et en faisant appel à des experts en la matière. Ce choix fait gagner d’énormes dépenses à l’Etat et permet au centre de maintenir durablement les différents composants de la plate-forme. Effectivement, le centre a réussi à déployer une première version de la plate-forme et de lancer quatre services en ligne à haute valeur ajoutée. Ceci permettra d’améliorer la classification de la Tunisie aux indices internationaux de l’administration numérique.
Ou peut-être à cause de ma démarche de lancer des appels à candidature pour des postes de directeurs afin de sélectionner les meilleurs. Contrairement aux agissements en vigueur totalement subjectifs.
Ou peut-être à cause de la relation entre le CNI et le ministère de tutelle qui pourrait interférer lorsqu’il faut respecter le droit de réserve concernant les informations des clients du centre et qui sont protégés par des accords bilatéraux. Sachant que nulle n’est censé exécuter des ordres en dehors des limites imposées par la loi.
Je ne sais vraiment pas. Et ceci est d’autant plus frustrant en sachant que lorsque j’ai accepté ma position au CNI ce n’était ni pour le salaire qui est au deçà de celui de Professeur de l’Enseignement Supérieur ni pour les honneurs vu que j’ai délaissé ma position de Professeur visiteur dans plusieurs universités internationales dont notamment la prestigieuse université japonaise de Tsukuba (depuis plus de 10 ans). Mais bel et bien pour servir le pays en avançant le plus loin possible dans le processus de numérisation des services de l’état afin d’économiser le temps des citoyens et les ressources de l’état.
Je comprends maintenant pourquoi la plupart des talents et esprits vifs de la Tunisie refusent d’assurer les postes de responsabilités.