Comment former les talents ? De quelle façon s’y prendre pour les attirer ? Et par quels moyens les retenir ? Oh ! Le casse-tête !
Ce n’est déjà pas simple, pour un pays, de former des talents. Ce n’est déjà pas aisé, pour l’entreprise, de les attirer. Et c’est encore plus dur, une fois qu’ils sont dans la boîte, de les retenir. Et, ce qui complique le tout, est que le talent par nature est déjà rare. Eh, oui ! Car ce qu’il faut garder à l’esprit est que le talent est “le stade suprême de la compétence“. C’est, par conséquent, un parcours de grossesse précieuse, capricieux et jamais totalement sécurisé.
C’est ce cheminement d’idées qui a marqué les débats lors de la journée du Forum de l’emploi, organisé par l’IACE (Institut arabe des chefs d’entreprise), le lendemain de son Tunisian Economic Forum qui s’était focalisé sur la gestion des ressources rares.
Le thème ”Les talents, entre attractivité et rétention” décrivait bien la problématique du défi actuel qui se pose à l’écosystème national. Car, il faut bien convenir que les talents constituent un sacré vecteur de compétitivité. Comment dès lors composer avec cette réalité du moment ?
La route du talent
On peut indéfiniment spéculer sur la réalité du talent. Est-il un don de la nature ou le produit de la culture et de l’effort du système éducatif, principalement ? Le volontarisme aide à faire proliférer les talents, cela semble être une chose bien établie. L’université, avec ses cursus dorés, de grandes écoles, et ses affluents notamment les lycées pilotes, sont le circuit idéal.
Mais il y a également les circuits de la formation professionnelle. Il convient de rappeler que les pays qui ont su donner tout son éclat à la formation professionnelle réalisent des miracles. C’est le circuit de la formation professionnelle qui a favorisé le plein emploi en Allemagne. Et qui semble être à l’origine de la performance du système productif allemand.
La formation professionnelle améliore sensiblement l’employabilité des apprenants. La FP focalise entre autres éléments sur la maîtrise des soft skills, c’est-à-dire les compétences comportementales qui font de l’apprenant un élément qui s’insère aisément à son milieu de travail.
Et à la manière de l’UE qui a retenu un barème de 9 compétences essentielles, la Tunisie est en train de mettre au point le sien propre. Les compétences de vie suscitent l’éclosion des talents, cela semble aller de soi.
Mais par-delà les circuits pavés de la manière de générer les talents, quel est le biotope adéquat à l’éclosion des talents?
Le nouveau paradigme de la captation des talents
Les talents se distinguent des compétences, par leur trait de génie. Et cela représente bien un saut de palier. L’on est sur une autre orbite. Elon Musk, l’inventeur de la nouvelle voiture électrique, en est un. Steve Jobs, avec la mise au point de l’iPhone, qui a été à l’origine du Combi, téléphone et ordinateur, en est un autre.
Mais gardons les pieds sur terre, tous les talents ne sont pas de cet acabit. Toutefois, leur trait distinctif est qu’ils bouleversent la façon de faire, en entreprise et en société. On ne peut donc traiter avec eux comme avec n’importe quel interlocuteur.
Les plans de carrière à l’ancienne sont à bannir. Les talents s’accommodent peu de la hiérarchie. Il faut en faire des partenaires. Et il faut aller plus loin. Si auparavant on réservait l’intéressement matériel aux “top managers“ via les stock-options et les parachutes dorés, en cas de licenciement, il convient de généraliser le système à l’ensemble des partenaires de talents.
Eh oui, du moment que grâce à leur talent l’avenir d’une entreprise ou d’un pays peut prendre le profil le plus vertueux et le plus avantageux, les intéresser au fruit de leur œuvre d’expansion finit par faire sens.
On peut rapporter l’expérience d’une banque tunisienne de la place qui fait bénéficier ses salariés d’un plan d’épargne salariale. Cette banque a réduit le turnover de son personnel à presque zéro. Et la fidélité de ses clients est à son maximum. Bien malin le concurrent qui peut lui détourner sa clientèle.
Les recettes ont donc été éprouvées, dans certains métiers et elles gagnent du terrain. Un plan volontariste national en viendrait à accélérer le processus, et c’est tout bénéfice autant pour le pays que pour les entreprises.
Entre le Brain drain et l’exportation de talents, un pays peut choisir
Autrefois on se plaignait de la fuite des cerveaux, qui revient en fin de compte à une hémorragie de substance pour un pays donné. Mais à la faveur de la mondialisation, le système a fini par évoluer. Et un pays peut ne pas se laisser piquer ses talents par ses concurrents et se convertir en exportateur de talents.
Ainsi, un pays comme le Canada n’en finit pas de fasciner les talents, de toutes spécialités professionnelles et académiques. De ce fait, un pays comme la Tunisie peut tisser un partenariat de haut niveau avec ce pays via le flux de placement de compétences selon un plan bien établi.
En effet, une diaspora de haut niveau peut être bénéfique pour le pays qui place ses talents à l’international. Cette piste mérite d’être explorée.
Ali Abdessalam