La Banque africaine de développement (BAD) sillonne le continent pour allumer les feux de l’investissement et accélérer le développement en Afrique. Ne lui manque-t-il pas le levier adéquat pour avoir les moyens de son ambition ?
Les représentants de la BAD se livrent à un road show continental afin de préparer le rendez-vous de l’investissement que la Banque organise au mois de novembre prochain à Johannesburg en Afrique du Sud.
A l’heure actuelle, ils font halte dans les pays d’Afrique du Nord, et remonteront progressivement jusqu’à couvrir tout le continent. L’événement est de taille et l’enjeu l’est tout autant. La Banque entend susciter une dynamique continentale en vue d’un croisement des flux d’investissements entre pays africains. Un flux domestique d’investissement serait un rempart aux projets internationaux, fussent-ils bienveillants, tel celui de la Route de la soie, dont on ne sait, au demeurant, ce qui peut en sortir.
L’Afrique, terre promise de l’investissement
En l’an 2000, c’est-à-dire à l’aube XXIème siècle, la BAD avait déjà ce souci de booster l’investissement en Afrique et s’est attelée à cette cause. Vaste programme qui n’est pas une mince affaire. Elle a alors constitué le haut panel, dirigé par Joseph Stiglitz qui a élaboré le rapport “Investir en Afrique au XXIème siècle“.
Ce rapport est d’une extrême pertinence. L’ennui est qu’il lie le sort du continent à l’urgence des réformes, et l’on connaît l’attentisme des pouvoirs en place en la matière, étant donné leur peur du lendemain des réformes de leurs retombées et contrecoups.
La BAD remet le couvert une fois encore, dix huit ans plus tard, avec une initiative qui nous paraît plus pragmatique avec un meilleur angle d’attaque. A observer l’état du continent, on voit un patchwork, avec quelques zones prospères toutefois, où tous les pays jouent en solo.
La Banque souhaite induire une dynamique d’ensemble. En se donnant une puissance de feu autonome, l’Afrique peut orienter les IDE d’un simple objectif de prédation vers une finalité d’inclusion. Est-ce qu’à Johannesburg cette option de conscription de l’investissement trouvera un écho favorable ? Tout porte à croire que cet appel d’émancipation économique ne laissera pas indifférents les milieux d’affaires tentés par les nouvelles frontières continentales. Et la Banque pourrait jouer de son crédit.
La notoriété de la BAD
Depuis le début du XXIème, sous la présidence de Donald Kaberuka, la BAD annonçait, non sans fierté, que ses engagements avec les pays africains dépassaient l’encours de la Banque mondiale et qu’elle entend conforter cette position de risques. Il convient de rappeler que malgré la vulnérabilité financière de certains pays africains, le portefeuille de la Banque, à l’unanimité des agences de rating, était noté “Triple A“.
Il faut dire que le profil de risque est atténué par l’affectation des crédits dans des projets tous à caractère de développement. Cependant, la Banque ne peut subvenir, à elle seule, aux appels d’investissement des pays africains, d’où son initiative à croiser les flux d’investissements, afin de précipiter leur intégration économique à l’effet de faire émerger une base économique continentale, ce qui est de nature à créer un puissant levier de développement.
Le moment de créer une société financière africaine ?
A bien regarder la réalité du moment, l’investissement public, partout sur le continent, est modestement doté. Si donc on veut aller vite, il faut regarder dans la direction du Partenariat Public/Privé, qui est un accélérateur de croissance et de réformes. Le PPP peut résorber le gap d’investissement en grande partie. Et à la manière de la Banque mondiale, qui s’est dotée de la SFI (Société financière internationale) afin de pouvoir procurer des financements aux investisseurs privés.
Nous avions, dans nos colonnes, évoqué la question avec Jalloul Ayed, candidat à la présidence de la BAD, et il avait reconnu que la question est d’actualité. Nous espérons qu’à Johannesburg, la question sera sinon débattue, du moins évoquée.