A l’occasion de la célébration, pour la première fois, de la “Journée nationale des compétences féminines tunisiennes à l’étranger”, la ministre de la Femme, de la Famille, de l’Enfance et des Seniors (MFFES), Néziha Laabidi, a annoncé, jeudi 9 août à Tunis, le lancement du projet pilote “Nistathmrou fi bledna” (investissons dans notre pays, en français), visant à faciliter l’investissement des femmes tunisiennes résidentes à l’étranger dans leur pays.
Lors d’une conférence ayant pour thème “La femme migrante, vectrice de développement économique et de changement social dans son pays d’origine”, la ministre a souligné que le nombre de Tunisiens résidents à l’étranger s’élève à 1.325.690, dont 37% sont des femmes.
“8.536 Tunisiens vivants à l’étranger sont hautement qualifiés dont 10% sont des femmes”, a-t-elle précisé.
Laabidi a signalé que les Tunisiens résidents à l’étranger (TRE), et notamment les femmes TRE (FTRE) ne sont pas valorisées et ne jouent pas pleinement leur rôle en tant que vectrices de développement malgré leur apport en Tunisie. Elles peuvent pourtant faire progresser le développement des micro- entreprises, développer l’exportation de produits tunisiens de qualité et aider à maintenir et développer les produits traditionnels tunisiens (produits alimentaires, industries traditionnelles…), a-t-elle estimé.
L’objectif principal de la conférence est d’informer, mobiliser et impliquer les acteurs concernés par la gouvernance de la migration et le développement économique et social des FTRE en Tunisie pour la mise en œuvre du projet “Nistathmrou fi bledna”, a explique Laabidi.
C’est une phase préparatoire au “Développement et mise en œuvre d’un plan d’action et une stratégie spécifique visant à faciliter la contribution des femmes de la diaspora tunisienne à la gouvernance de la migration et au développement économique et social de leur pays d’origine”.
Dans ce cadre, une convention de partenariat a été signée en marge de la conférence entre le ministère de la femme, de la famille, de l’enfance et des séniors et l’autorité tunisienne d’investissement.
Selon Néziha Laabidi, cette convention permettra de faciliter l’investissement des FTRE dans leur pays à travers la mise en place d’une ligne de financement.
Elle a, en outre, signalé qu’un site web pour les compétences féminines résidentes à l’étranger est également mis en place en leur faveur pour faciliter leur réseautage et créer un répertoire des compétences féminines tunisiennes à l’étranger.
S’exprimant à cette occasion, Wided Bouchamaoui, femme d’affaires et ex-présidente de l’Union tunisienne de l’industrie du commerce et de l’artisanat (UTICA), a évoqué les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes entrepreneures en Tunisie, notamment la difficulté d’accès aux financements et la lourdeur des procédures administratives.
L’intervenante a signalé que la Tunisie compte plusieurs compétences féminines à l’intérieur et à l’extérieur du pays sauf qu’elles ne sont pas bien connues, et il est important de faire connaître les expériences réussies pour encourager les jeunes à suivre leurs chemins et contribuer ainsi à la création d’emplois et au développement du pays.
Dans ce contexte, elle a appelé à renforcer la présence de la femme dans les postes de décision dans les secteurs public et privé.
Pour sa part, Naïma Hammami, membre du bureau exécutif de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), a souligné l’importance d’améliorer les conditions de vie de beaucoup de FTRE qui vivent dans des situations précaires.
De son côté, Paola Pace, chef de projet régional à l’Organisation internationale pour les migrations (OIM, bureau de Tunis), a signalé qu’en 2017, il y avait 767.155 émigrés tunisiens dont 330.806 étaient des femmes.
“Au niveau global, il apparaît que les femmes et les hommes renvoient plus ou moins le même montant dans leurs pays d’origine, mais la proportion de salaires renvoyés est bien supérieure lorsqu’elle est renvoyée par des femmes par rapport à la proportion de salaire renvoyée par les hommes”, a-t-elle précisé.
Elle a, par ailleurs, expliqué que les fonds transférés par des femmes sont aussi envoyées à des femmes et servent généralement aux dépenses de foyer liés à la nourriture, la santé et l’éducation et par conséquent les femmes migrantes ont moins d’opportunités pour investir, par exemple, dans les petites entreprises.
“Il est donc crucial de continuer à travailler dans la facilitation des transferts de fonds mais également dans l’éducation à la gestion de ces fonds et à l’optimisation de ceux-ci afin de maximiser les impacts sur le long terme de cet aspect positif de la migration qui profite aussi bien aux migrants eux-mêmes qu’à leurs familles mais également à leurs pays d’origine”, a-t-elle soutenu.
Regroupant un grand nombre de FTRE, des représentants d’organisations nationales et internationales, la conférence est une occasion pour débattre les freins et les incitations à l’investissement en Tunisie ainsi que les aspects positifs de la contribution productive de la femme tunisienne résidente à l’étranger et les effets pervers des dons non productifs.
Un rapport de recommandations et de propositions d’actions sera formulé à la fin de la conférence.
A noter qu’en vertu du décret gouvernemental n° 2018-403 du 23 avril 2018 avril 2018, le 09 août de chaque année a été institué journée nationale des compétences féminines tunisiennes à l’étranger.