Et de trois pour Till Kratz. Ce spécialiste du redressement d’entreprises, installé en Tunisie depuis dix ans, vient d’en épingler une troisième à son tableau de chasse : la société Tunisie Eviers Cuccina.

Confrontée à des difficultés depuis quelques années, cette filiale du groupe Kilani fait appel en septembre 2016 à Till Kratz, directeur général de la société, en remplacement de l’ancien directeur général, Ahmed Garouri.

Quatre mois plus tard, les actionnaires se résolvent à accepter en janvier 2017 le placement de leur société sous le régime du redressement, afin de créer les conditions propices à son redressement.

Un mois plus tard, Tunisie Eviers Cuccina est effectivement placée en redressement judiciaire en février 2017 par le tribunal de première instance de Zaghouan. Cette instance décrète alors l’ouverture d’une période d’observation, et confié ce dossier à Dorsaf Abassi et Mohamed Yahia, respectivement en qualité de juge commissaire et d’administrateur judiciaire –remplacé depuis par Mohamed Lotfi Belgasmi.

Cette thérapie de choc commence rapidement à porter ses fruits. Une assemblée générale extraordinaire décide en conséquence d’approuver un plan de continuation définitif de la société et d’augmenter le capital d’un montant minimal de 2,2 MDT avec suppression partielle du droit préférentiel de souscription.

En fait, l’augmentation sera en numéraire d’un montant de 3,3 millions de dinars, ce qui fait passer le capital à 6,260 millions de dinars.

Sa mission achevée, Till Kratz passe le témoin, en avril 2018, à un tandem composé de Mohsen Kilani, comme directeur général, et Seifeddine Bejaoui, président du conseil.

A cinquante-quatre ans, Till Kratz a, ainsi qu’il l’écrit sur son profil Linkedin, «une expérience de 26 ans dans le redressement et le redéploiement stratégique d’entreprises industrielles et commerciales, confrontées à des difficultés opérationnelles et financières graves (suite à sous-capitalisation, surendettement, mauvaise gestion et/ou choix stratégiques, environnement dégradé, conflit entre actionnaires), mais dont le business model peut être (re)viabilisé à moyen terme».

Till Kratz exerce son métier de redresseur d’entreprises sous le parapluie d’EUROCONSULTING Tunisia, une société résidente de droit tunisien ayant pour objet la fourniture de «services de management intérimaire et/ou de crise, de recherche de financements, d’ingénierie financière, de conseil financier, d’audit contractuel, de négociation et d’arrangement dans tous secteurs d’activités industriels et commerciaux. Elle a acquis une expertise particulière dans le secteur agro-alimentaire tunisien».

EUROCONSULTING Tunisia a quatre domaines d’activité : le conseil stratégique à des groupes tunisiens diversifiés (familiaux) «confrontés à la nécessité de se structurer et de définir une gouvernance», le redressement et la relance d’entreprises en difficultés, la recherche de partenaires financiers ou stratégiques pour des PME tunisiennes à fort potentiel de développement, et l’assistance aux entreprises allemandes pour la prospection et l’établissement en Tunisie.

De nationalité allemande, et diplômé de l’Ecole supérieure de commerce de Paris (ESCP), ce «manager de crise» a débuté sa carrière en Côte d’Ivoire.

Il a successivement piloté le déploiement d’un réseau de fibre optique d’Arobase Telecom, pour le compte de Deutsche Telecom/Siemens, puis assuré la restructuration de la dette et l’assainissement de l’exploitation de Comafrique Entreprises, concessionnaire d’entreprises, alors confrontée à une grave financière et qui a été reprise en 2003 par le groupe belge ATC.

En Tunisie, où il est arrivé en 2005, Till Kratz a, avant Tunisie Eviers Cuccina, officié dans deux autres entreprises : Agromed et Leader des Biscuits Méditerranéens (LBM).

Directeur général de 2005 à 2010, Till Kratz avait été mandaté par le fonds d’investissement d’ECP et le groupe Abdennadher «pour redresser “in bonis“ une situation quasi-compromise : effondrement des ventes, opérations à l’arrêt, blocage des paiements, endettement extrême (…)».

Le «manager de crise» s’enorgueillit d’avoir réussi à remettre sur pied cette entreprise (assainissement opérationnel, relance de l’activité commerciale locale, renégociation de la dette bancaire, règlement amiable conclus avec le fisc, la CNSS et les fournisseurs, etc.). Ce qui a permis sa cession au groupe Poulina.

A LBM, Till Kratz avait pour mission –menée à bien- le redressement opérationnel et financier après dépôt de bilan, le pilotage de l’entreprise pendant la période de redressement judiciaire, la réduction de 40% des coûts fixes et assainissement comptable et juridique, règlement amiable de l’ensemble des différents entre actionnaires, et l’homologation d’un Plan de Continuation par le tribunal de Zaghouan le 7 avril 2015. Mais trois ans après, LBM n’est encore sorti de l’auberge et fait l’objet d’une décision de vente judiciaire que les actionnaires contestent. Mais de cela, Till Kratz n’est nullement responsable.

MM