Voici les mots d’ordre en matière de sauvegarde et de conservation du patrimoine cinématographique: Collecte, restitution, restauration, numérisation.
Pour ce faire, tout un processus s’impose impliquant Etat et spécialistes, et moyennant des lois et des ressources humaines et financières sans lesquelles il serait utopique, selon les experts, de pouvoir garder cet aspect de l’identité culturelle du pays.
“Quels dispositifs pour une meilleure sauvegarde et une efficiente promotion du patrimoine cinématographique ?” fut le thème soulevé par les professionnels du cinéma réunis aux 13èmes Journées cinématographiques de Hergla.
Producteurs, réalisateurs, universitaires, responsables d’institutions culturelles en relation avec le cinéma ont fait le point sur l’état des lieux d’un secteur qui souffre cruellement d’un véritable outil efficient pour la préservation des milliers de bobines qui logent aux dépôts ou chez les particuliers souvent dans des conditions défavorables.
Ils ont largement abordé la problématique proposant une vision qu’ils souhaitent commune pour parer aux obstacles qui se posent devant la préservation de la mémoire cinématographique et audiovisuelle collective nationale.
Cette réflexion sur les moyens de sauvegarder le patrimoine filmique et iconographique intervient à la lumière du constat fait par les acteurs cinématographiques estimant le patrimoine filmique en péril.
De rares initiatives sont en train d’être faites pour la restitution et la sauvegarde d’anciens films tournés en Tunisie par des cinéastes tunisiens et européens. Jusque là, l’opération est souvent effectuée dans le cadre d’un partenariat avec des organismes européens compétents.
Hassan Daldoul, producteur de films, a signalé la nécessité d’actualiser le cadre juridique et les lois existantes qui demeurent peu efficaces sur le plan pratique dans la protection des droits d’auteurs pour tous les acteurs de la chaîne de production (acteurs, réalisateurs et producteurs).
Pour Noura Nefzi, monteuse et universitaire, il est nécessaire d’établir une stratégie de sauvegarde qui couvre toute l’expérience cinématographique depuis la production jusqu’à la réception.
Elle propose aussi la création d’une nouvelle spécialité dans la formation professionnelle et universitaire pour former les futurs techniciens qui assureront la sauvegarde du patrimoine dans le cinéma.
Une autre contrainte se pose devant le processus de conservation dans le cinéma qui, selon le réalisateur Naceur Khemir, serait attribuée au manque de volonté de faire avancer les choses, citant l’exemple du patrimoine artistique qui se trouve dans la même situation.
Hichem Ben Ammar, directeur de la Cinémathèque tunisienne, a défendu le rôle de la Cinémathèque en tant qu’organisme autonome relevant du Centre national du cinéma et de l’image (CNCI). Le processus de conservation du patrimoine du cinéma tunisien ne peut avancer avant “la réception du budget prévu qui lui sera alloué en 2019”.
Samir Zeghaya, directeur du cinéma et des arts visuels au ministère des Affaires Culturelles a signalé que la sauvegarde du patrimoine cinématographique est l’un des soucis majeurs du département.
Le réalisateur Farid Boughdir a insisté sur “la complexité de la question de sauvegarde du patrimoine cinématographique et audiovisuel qui n’est pas en train d’avancer face à la persistance des considérations personnelles étroites de certains acteurs culturels”.
Les recommandations et résolutions issues du débat houleux entre professionnels présents, concernent essentiellement le CNCI qui devrait selon eux bénéficier d’un mécanisme de financement à l’image de ce qui existe chez ses homologues notamment au Maroc, en France, en Espagne ou en Italie. Ils ont suggéré un prélèvement sur les bénéfices de l’audiovisuel (fournisseur d’internet, opérateurs de téléphonie mobile, redevances audiovisuelles sur la facture d’électricité) qui permettrait de développer les secteurs de l’image et de l’Audiovisuel tunisien et notamment l’indispensable préservation de la mémoire et du riche patrimoine tunisien dans ce domaine.
Ils ont aussi souligné l’urgence d’un recensement complet des documents existants et l’établissement d’un cadre juridique adéquat.