Les habitants des milieux ruraux, dont la valorisation des produits forestiers, constitue la seule source de revenus, sont désormais, autorisés à exploiter ces produits (eucalyptus, cyprès, lentisque, romarain, pin d’Alep.. …) sans l’autorisation de la Direction générale des forêts (GDA) et partant sans craindre des procès verbaux où même des poursuites judiciaires.
Cette nouvelle annoncée, vendredi, par le département de l’Agriculture après la signature d’accords avec les Groupements de Développement Agricoles (GDA), les autorisant à exploiter “immédiatement et gratuitement”, les produits forestiers et ce à l’occasion du coup d’envoi du projet de Gestion intégrée des paysages forestiers dans les régions du Centre-ouest et du nord-ouest de Tunisie.
“On ne peut plus content”, se félicite Fadhila Cherni, originaire de Tajerouine (Le Kef), qui dirige une association exploitant les plantes aromatiques et médicinales pour l’extraction d’huiles essentielles et aromatiques et d’autres produits, récemment, certifiés BIO.
“Nous étions dépendants de l’autorisation des services forestiers et c’était un casse-tête”, dit-t-elle, soulagée. Et d’ajouter “l’accès aux produits forestiers était très difficile et nous ne pouvons pas, nous artisanes et associations de femmes rurales, concurrencer les grands opérateurs qui exploitent des dizaines d’hectares de forêts sans, pourtant, respecter l’environnement”.
L’accès aux produits forestiers est régi par des adjudications auxquelles ni les artisans ni les GDA ne pourraient y participer compte tenu de la modestie de leurs ressources financières, affirme Fadhila, qui travaille aux côtés de 180 femmes rurales pour la collecte et la valorisation de produits forestiers tels que le romarin.
“Nous artisanes, nous sommes les plus habilitées à protéger le milieu forestier car nous exploitant son potentiel monnayant des pratiques encore ancestrales, donc peu nuisibles à la biodiversité”, assure cette dame, dotée d’une fibre écologique apparente.
Elle explique qu’avec ses partenaires “elles procèdent délicatement, pour séparer les brins de romarin de la plante, et ce contrairement, aux sociétés qui arrivent avec de gros engins pour tout détruire et ne laisser derrière que des espaces forestiers désolants”.
Son ambition est d’attirer, grâce à la convention signée vendredi, davantage de femmes et de créer davantage d’emplois décents dans les communes de Tajerouine, Sidi Youssef, Nebeur, Touiref et toutes des localités frontalières, dont la majorité de la population est à faible revenu.
“Je crois que notre problème est résolu, on n’aura plus peur des forêts”, déclare de son coté, à TAP, Houcine Chradi de Sidi Bouzid faisant allusion aux services de la Direction générale des forêts.
Ce homme exploite le romarin à la localité de Jelma, pour l’extraction de son huile aux multiples vertus. Il est aussi apiculteur et produit du zgougou (graines de pin d’Alep).
La Banque mondiale (BM) qui a alloué 200 millions de dollars à ce projet, cible des communautés composées d’environ 250.000 ménages (soit environ 1,5 millions de personnes). Les femmes constituent 51 % de ces bénéficiaires dans 8 régions (Le Kef, Jendouba, Siliana, Sidi Bouzid, Kasserine, Gafsa, Beja, Kairouan).
Pour ce principal bailleur de fonds l’impact environnemental des projets forestiers compte beaucoup. A cet égard, parmi les lacunes constatées par l’institution internationale, figure l’absence de l’inscription explicite des projets forestiers dans la liste obligatoire des projets nécessitant une étude d’impact environnemental.
Il s’agit aussi de l’absence d’un système de surveillance et de suivi environnemental de l’application des mesures d’atténuation préconisées dans les études de l’impact économique et social des projets.
La Direction Générale des Forêts est appelée ainsi, à changer d’approche et de “schéma de développement des paysages forestiers”, de manière à ne pas permettre à la dimension économique et sociale de primer au dépend de l’aspect environnement.