Favoriser l’unité nationale, s’accorder sur un projet politique et économique, s’affranchir de concepts inopérants, tels que “l’inclusivité” ou la “discrimination positive”, et impliquer davantage le secteur privé dans l’aménagement du territoire seraient, selon le géographe et urbaniste Taieb Houidi, les premières conditions d’une révision efficace de la politique nationale d’aménagement territorial.
Houidi a, à ce titre, soulevé l’importance de concevoir un nouveau Schéma national d’aménagement du territoire (SNAT). “Fonction qui relève, selon lui, de l’Etat qui porte la responsabilité de l’unité et de l’intégrité nationale “, a-il-souligné lors d’une rencontre débat sur le thème ” 50 ans d’aménagement du territoire en Tunisie : équivoques passées, indécisions actuelles et enjeux futurs “, organisée, samedi, au siège de l’UTICA, par le Cercle Kheireddine.
“Il y a consensus pour un nouveau SNAT, nécessité politique et impératif technique (le dernier a plus de 20 ans). Mais avant de lancer un nouveau SNAT il faut d’abord être clair sur la nature du document ; un SNAT n’a de sens que s’il est cohérent avec le Projet de développement du pays et donc il faut répondre à la question quel est le projet de développement de la Tunisie en 2018 pour les 20 ans à venir ? En quoi est-il différent de celui de la période précédente?, a-t-il expliqué.
Et de poursuivre ” tout schéma ne vaut que par son application et celle-ci dépend de la politique économique. L’aménagement du territoire étant la traduction spatiale de politiques socio-économiques élaborées par le pouvoir politique. Il doit reposer sur un projet sociétal commun”.
Concrètement, la mise en place d’un nouveau SNAT requiert, selon lui, ” de maîtriser la croissance urbaine (habitat, foncier, centralité, transports publics), de donner la priorité à la logistique et au corridor Bizerte-Sfax, de développer les formations supérieures et professionnelles en les ajustant au marché du travail et aux situations régionales, de favoriser les politiques d’économie d’eau, surtout dans les périmètres irrigués “.
Il s’agit également de “protéger les espaces fragiles, en particulier les forêts et les karsts (châteaux d’eau du pays), d’atténuer la pression démographique sur les espaces à risques, en particulier dans les steppes et les régions oasiennes et de conduire une politique agricole à deux volets en distinguant les régions humides du nord et les espaces qui ne peuvent affronter la concurrence internationale “.
Un nouveau SNAT nécessite également ” d’impliquer le privé à travers des contrats donnant-donnant, d’éviter les concepts inopérants (inclusivité, discrimination positive, économie sociale et solidaire …) et de rattacher l’aménagement du territoire à la présidence du gouvernement, compte tenu de sa transversalité “.
Revenant sur les résultats de 50 ans d’aménagement du territoire, le géographe a évoqué ” des avancées en matière d’infrastructures et d’équipements “, mais aussi une ” accentuation des inégalités socio-économiques et territoriales “.
” Durant ces 50 ans, les plans et schémas directeurs n’ont pas manqué, mais ces plans n’ont pas été suivis d’effets, en raison d’un manque de moyens pour les projets structurants et les actions sociales fortes, d’une centralisation excessive et d’une forte tutelle de l’Etat, d’une absence de débat démocratique, d’un pouvoir discrétionnaire de l’Etat et des entreprises publiques d’où une grande faiblesse de la coordination inter-sectorielle … “, a-t-il considéré.