“L’Association professionnelle tunisienne des banques et des établissements financiers (APTBEF), soutenue par la BCT et le ministère des Finances, a pris en charge l’élaboration d’un cahier de charges de paiement mobile. Elle a lancé un appel d’offres pour le développement d’une solution nationale de paiement mobile en Tunisie”. C’est ce qu’a déclaré, mardi 9 octobre 2018, le président de l’APTBEF, Ahmed El Karm.
Intervenant lors d’un séminaire sur le digital banking organisé au siège de l’UTICA sur le thème “l’évolution du digital dans le Banking et les moyens de paiement”, El Karm a précisé que 13 firmes nationales et étrangères ont participé à cet appel d’offres dont le résultat sera annoncé à la fin de cette semaine par le PDG de la BNA qui est aussi le président de la Commission de dépouillement.
Le président de l’APTBEF estime que “la digitalisation est une orientation qui s’impose aux banques tunisiennes, lesquelles appelées à s’adapter à cette mutation très profonde dictée par l’évolution technologique et de plus en plus sollicitée par leurs clients”.
Toujours selon lui, “dans cette orientation de digitalisation, la question de decashing acquiert une importance capitale. Nous ne pouvons plus admettre que 13 milliards de dinars circulent en dehors du système bancaire et s’échangent sous forme de billets de banques alors que nos banques sont fragilisées par un resserrement structurel de liquidité qui menace même la stabilité financière du pays. Il faut donc agir dans le sens du decashing qui favorisera la régénération des dépôts de banques en y ramenant cette masse de liquidité qui échappe au circuit bancaire”.
“Au-delà de ce problème de liquidité, assure M. El Karm, les banques sont aussi confrontées au coût exorbitant de traitement des billets de banques. 15% de nos employés sont accaparés par la gestion des billets de banques sans aucune plus-value pour l’institution bancaire. C’est une charge lourde que nous devrons réduire en utilisant la technologie”.
Mais pour lui, le decashing n’est pas une question technique. c’est une question éminemment politique. Si le marché informel se développe autant, c’est en raison, entres autres, d’un problème de confiance entre les opérateurs et l’administration en charge de la gestion de la vie économique et financière du pays, et entre les opérateurs informels et l’administration. C’est aussi en raison d’un problème de traitement de la question fiscale. Il faut cesser d’aborder les choses d’une manière progressive, on a besoin de décisions fortes qui doivent, en plus, être appliquées.
“Il n’est plus acceptable que les citoyens et les entreprises continuent de régler leurs taxes et impôts par les billets de banques. L’une des mesures à entreprendre serait d’interdire catégoriquement tout paiement de taxes par les billets de banques, quitte à taxer davantage ce type de paiement. La loi de finances 2019 doit initier ce changement de culture”.
El Karm a également fait savoir que “les 4 millions de cartes bancaires aujourd’hui disponibles sur le marché ne sont utilisées qu’à raison de 20% pour le paiement”.
Et d’expliquer: “certains justifieront ce fait par les commissions élevées appliquées par les banques, mais je ne pense personnellement pas que ce soit le cas, car les commissions font l’objet de discussions libres entre les banques et les commerçants. Pour certains commerçants, aucune commission n’est appliquée mais ils hésitent tout de même à le faire par peur de traçabilité en raison notamment d’une relation tendue avec l’administration fiscale”.
“Si les services en charge de la fiscalité prévoyaient un taux d’imposition allégé pour les moyens de paiement numérique, cela pourrait aider à réduire cette appréhension et contribuerait à développer le decashing”, pense-t-il.
Enfin, El Karm considère nécessaire de “taxer les retraits en espèces au niveau des banques et d’utiliser les sommes collectées grâce à cette taxation pour développer le paiement électronique”.