Fragilisée par une crise multiforme générée par la contreperformance de la gouvernance des islamistes durant les premières années du soulèvement du 14 janvier 2011, la petite Tunisie, qui saigne aujourd’hui, n’est plus au bout de ses peines. Elle est dans le collimateur de l’extrême droite au pouvoir dans certains pays européens, laquelle fait flèche de tout bois pour l’obliger à abriter des centres d’hébergement pour les migrants.
En dépit d’un niet clair exprimé au plus haut niveau par le leadership politique tunisien, des responsables d’extrême droite européenne continuent, jusqu’à ce jour, à harceler la Tunisie et à l’appâter par des aides matérielles conséquentes afin de l’amener à accepter ces camps d’esclaves.
Le rejet tunisien est-il catégorique ?
Pour mémoire, rappelons que le chef du gouvernement tunisien, Youssef Chahed, en visite en Allemagne, au mois de février 2017, avait été très clair à ce sujet. Il avait déclaré texto dans une interview au journal allemand BILD que «La Tunisie est une jeune démocratie… et n’a pas en conséquence ni les capacités ni les moyens pour abriter des camps de réfugiés».
Pour sa part, le ministre des Affaires étrangères, Khemaies Jhinaoui, a affirmé, à maintes reprises, qu’«aucun camp de réfugiés ou groupements de migrants secourus aux larges de la Méditerranée ne sera mis en place en Tunisie». Il l’a déclaré au journal londonien Al Arab et à Swissinfo ch.
En dépit de ces rejets officiels, des responsables de l’extrême droite européenne continuent à croire que la Tunisie est toujours l’unique solution et tentent de faire pression sur ce pays pour la mise en place desdits centres afin de limiter les flux migratoires en provenance d’Afrique.
Tout récemment, le «séparatiste» flamand, Théo Francken, secrétaire d’Etat belge à l’Asile et aux Migrations, a plaidé devant le dernier Conseil des ministres européens pour le refoulement des migrants en Méditerranée vers la Tunisie, moyennant la signature, à cette fin, d’un traité.
Le responsable belge, qui avait signé, le 17 juillet, à Tunis avec son homologue tunisien, Adel Jarboui, secrétaire d’Etat chargé de l’Immigration et des Tunisiens à l’étranger, un accord sur le renvoi des Tunisiens séjournant en Belgique sans autorisation, a récidivé, le 30 septembre 2018, sur les ondes de RTL.
L’offre élaborée de l’extrême droite européenne
Interrogé sur sa proposition que la «Tunisie accueille les migrants en provenance d’Afrique qui voudraient venir en Europe alors que la Tunisie a dit clairement non à cette solution», Théo Francken a répondu sans ciller : «nous devons faire une offre élaborée comme nous l’avons fait avec Erdogan en Turquie».
Et le secrétaire d’Etat belge de poursuivre : «Avec MM. Steven Vandeput et Jan Jambon (flamands), ministres belges, respectivement de la Défense et de l’Intérieur, nous avons fait, fin juillet à Tunis, une grande et très belle discussion avec le Premier ministre tunisien. Il y a des possibilités. Mais nous devons être très clairs quand la Tunisie ou les autres pays d’Afrique du Nord qui ne vont pas faire ça quand il n’y pas une offre qui est très bien».
«Avec plus d’argent ?», demande le journaliste de RTL. «Ce n’est pas seulement ça, l’offre doit être élaborée. Je suis sûr que c’est nécessaire. Il n’y a pas d’autre solution», a-t-il répondu en restant très vague sur ce qu’il appelle «une offre élaborée».
Que sait-on de ces «possibilités» ?
La question qui se pose dès lors est de se demander sur la nature de ces fameuses «possibilités» discutées, il y a à peine deux mois, avec le chef du gouvernement tunisien et sur le degré de leur acceptation ou non par la Tunisie. Le gouvernement tunisien doit des explications à ce sujet à l’opinion publique. Car il n’est pas normal que ces responsables séparatistes flamands, tout autant que leur homologue milanais, le ministre Italien de l’Intérieur, Matteo Salvini qui avait qualifié les Africains d’«esclaves» et les migrants tunisiens de «repris de justice», persistent à croire que notre pays «peut céder un jour à leur offre, fût-elle «élaborée» ou non.
Dont acte.