Les céréales, le lait et la viande sont les trois premières filières qui seront directement touchées et menacées par une ouverture totale prévue par l’Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA) entre l’UE et la Tunisie.
“Il est à craindre que de nombreux agriculteurs ne disparaissent face à la concurrence européenne. Cela touche notamment les secteurs des céréales, du lait et de la viande”, prévient le Forum Tunisien des Droits Economiques et Sociaux (FTDES), dans une étude sur “les perceptions de l’accord de libre échange complet et approfondi (ALECA)”, publiée, vendredi dernier, 19 octobre 2018.
“En Tunisie, les grandes exploitations sont équivalentes aux petites exploitations européennes, donc cela va toucher tous les opérateurs, pas seulement les petits, lesquels seront écrasés. Peut-être que les grands auront les moyens de résister, mais ils seront affectés”, développe cette étude qui s’étale sur les attentes des conséquences économiques et sociales en Tunisie de l’ALECA.
Selon le FTDS, si l’ALECA entre en vigueur, il est nécessaire de mettre en place une réelle stratégie pour transformer l’agriculture, qui prenne en compte cette concurrence nouvelle, mais aussi l’adaptation au changement climatique.
La concurrence ne pourra pas être égale compte tenu des différences humaines, technologiques et naturelles. Avec le changement climatique et la raréfaction des ressources en eau, la rareté de ressources naturelles risque de s’accentuer avec l’impératif de productivité dans un contexte d’augmentation de la pollution, estiment les auteurs de l’étude.
“Les petits agriculteurs finiront ouvriers sur leurs propres terres!”
De plus, les produits européens, fortement subventionnés, seraient en position de force et plus compétitifs. Les petits agriculteurs, incapables de faire face à la concurrence, devraient vendre leurs terres à des investisseurs avec des projets de cultures intensives. Certains grossiront les rangs des précaires en ville et d’autres finiront par “travailler comme ouvriers sur leurs propres terres”.
Toujours selon le FTDS, l’accord avec l’UE pourrait causer la perte de la souveraineté alimentaire. “Car la production de céréales pourrait disparaître, ce qui implique que le pays sera dépendant des marchés internationaux, pour acheter ce qui constitue la base de son alimentation. Or sur le marché international le prix peut monter rapidement et fortement, pesant sur les finances de l’Etat et/ou sur l’insécurité alimentaire d’une partie de la population”.
Le secteur agricole sera aussi exposé dans le cadre de l’ALECA, à un “envahissement des produits européens”. La probabilité de non-résistance à la concurrence ou de la destruction de la petite agriculture est forte.
En Tunisie, l’Europe ne voit pas un grand intérêt économique direct, mais cherche à consolider sa zone d’influence économique.
D’une manière générale, l’ALECA est un accord économique standard, qui ne prend pas en compte les spécificités des pays. “Or la Tunisie fait face à des enjeux très spécifiques, que ce soit au niveau strictement économique et social ou au niveau des facteurs de productions tels les ressources humaines et naturelles. Il est ainsi nécessaire pour la Tunisie de proposer une contre-offre à l’Europe, adaptée aux enjeux du pays”.
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