La Tunisie prévoit, dans son engagement pour le climat, la mobilisation d’importants moyens financiers estimés à environ 52 millions de dinars (18 millions de dollars US), pour l’atténuation des gaz à effet de serre.
Toutefois, le pays table sur seulement 5,8 millions de dinars (2 millions de dollars), pour les projets d’adaptation des ressources en eau, de l’agriculture, des écosystèmes naturels et artificiels, du littoral, de la santé et du tourisme.
Cette répartition des moyens entre adaptation et atténuation a été critiquée par des activistes de la société civile et de l’environnement. Ils estiment que le pays a prévu beaucoup plus de fonds à l’adaptation qu’a l’atténuation, alors qu’il ne contribue que pour 7% aux émissions globales des gaz à effet de serre.
Il est par contre très exposé aux effets des changements climatiques, dont l’élévation du niveau de la mer et ses risques pour le littoral et le tourisme, sans oublier la désertification, les inondations et les sécheresses avec leurs retombées négatives sur l’agriculture.
Pour certains écologistes et activistes du climat et de l’environnement, l’engagement de la Tunisie ou sa Contribution Nationale (appellation adoptée par la Convention-Cadre des Nations unies sur les Changements climatiques), a été fait dans un contexte précis. Il pourrait être révisé et amélioré.
“Il faut revenir sur le contexte dans lequel a été soumis l’engagement de la Tunisie aux efforts mondiaux de lutte contre le changement climatique, tempère Wafa Hmada, coordinatrice du programme Environnement et Climat au sein de l’association “Réseau Alternatif des Jeunes de Tunisie” (RAJ), dans une déclaration à l’agence TAP.
L’accès aux fonds internationaux pour le financement des projets de lutte contre le changement climatique (Fonds vert et Fonds de l’adaptation), est très difficile. Il nécessite un long processus que la Tunisie a entamé récemment.
Pour ce qui est de l’atténuation, il était beaucoup plus facile de solliciter le soutien de la communauté internationale, a indiqué la jeune responsable.
Elle a évoqué une deuxième raison pour cette répartition favorisant l’atténuation. “La Tunisie n’avait pas de stratégies claires en 2015, exceptée sa stratégie de l’énergie qui favorise une transition vers les énergies renouvelables. Néanmoins, le pays pourrait rectifier le tir dans le cadre de la révision prévue de sa contribution nationale tous les 5 ans”.
“Nous pourrons revoir nos ambitions à la hausse aujourd’hui, puisque plusieurs stratégies nationales ont été élaborées, dont la stratégie d’adaptation du secteur de l’eau “Eau 2050″, la stratégie d’adaptation du secteur agricole aux changements climatiques…”, a lancé Hmada.
La stratégie de l’eau à l’horizon 2050 vise selon le département de l’Agriculture, à mettre en place une nouvelle approche pour une gouvernance intégrée de l’eau, basée sur la gestion de la demande plus que celle de l’offre. Elle prévoit aussi la mise en place d’un plan d’actions visant à instaurer une gouvernance équitable, permettant l’inclusion économique et sociale des régions les plus défavorisées.
La Stratégie d’adaptation de l’agriculture tunisienne et des écosystèmes, aux changements climatiques prévoit, quant à elle, de renforcer la résilience de ce secteur aux impacts du changement climatique.
Elle préconise une révision de la gestion des agrosystèmes. Dans ce cadre, il faut prévoir des reconversions, non nécessairement agricoles (prestations climatiques, biocarburant), pour les exploitations affectées.
“Il faut reconnaître que les objectifs de la Tunisie en matière d’adaptation étaient peu clairs et que les moyens financiers étaient modestes”, dira pour sa part Dr Zouhair Hlaoui, secrétaire général de l’association Changement climatique et développement durable (2C2D).
Hlaoui se dit optimiste et confiant, puisque la Tunisie a aujourd’hui, la possibilité de réviser et d’améliorer ses objectifs en matière de lutte contre le changement climatique.
Cette lutte passe, néanmoins, par deux approches complémentaires: l’adaptation et l’atténuation, a-t-il rappelé, relevant que la Tunisie prévoit d’axer ses efforts, en matière d’atténuation sur le secteur de l’énergie à travers l’amélioration de l’efficacité énergétique et l’utilisation de sources d’énergie plus propres.
Le Plan national d’adaptation (PNA) aux changements climatique a été officiellement lancé en août 2018 à Tunis, dans le but de réduire la vulnérabilité du pays à ces changements et de renforcer la capacité d’adaptation de l’activité agricole et de garantir la sécurité alimentaire.
Il vise aussi la protection du littoral et des ressources hydrauliques, de la santé et de l’infrastructure. Le coût de la mise en oeuvre de ce plan, financé par le Fonds Vert, est estimé à 3 millions de dollars (8,7 millions de dinars).