Le Conseil des ministres a décidé vendredi d’approfondir la réflexion sur le projet de loi réglementant l’état d’urgence, en ce qui concerne, notamment, les aspects relatifs aux garanties et au contrôle judiciaire avant de le soumettre à nouveau en conseil des ministres. Ce projet doit remplacer le décret n°78-50 du 26 janvier 1978.
En Tunisie, l’état d’urgence instauré et prolongé depuis 2015 suite à l’attaque terroriste contre un bus de la garde présidentielle. La dernière prolongation a été de 7 mois, de mars à mi-octobre 2018, la plus longue après 2011. Le but étant, selon un communiqué de la présidence de la République publié en mars dernier, d’assurer la sécurité durant les élections municipales, le mois de ramadan et la saison touristique.
Le but recherché derrière ce projet est d’adapter la réglementation sur l’état d’urgence aux dispositions de la Constitution de 2014 qui stipule dans son article 65 que les textes relatifs aux libertés et droits de l’Homme sont pris sous forme de loi organique.
Intervenant vendredi matin sur les ondes de Shems Fm, la porte-parole de la présidence de la République a expliqué que ce projet de loi vise pour l’essentiel à créer un équilibre au niveau des domaines d’intervention des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, à protéger les droits, en conciliant sécurité et libertés et à soumettre les mesures prises par l’exécutif au contrôle judiciaire.
Le projet dispose que l’annonce de l’Etat d’urgence doit désormais être faite après consultation du conseil de sécurité et sa prolongation ne doit pas dépasser trois mois. Un rapport doit être envoyé au parlement avant de prendre la décision de décréter ou de prolonger un l’état d’urgence. Les mesures prises par le ministre de l’Intérieur sont soumises au contrôle judiciaire et après information du procureur de la République, les recours se font devant le Tribunal administratif.
Dans son rapport (2017/2018), Amnesty international relève que les autorités tunisiennes ont continué à renouveler l’état d’urgence et l’ont utilisé pour justifier des restrictions arbitraires au droit de circuler librement.
“Les autorités ont renouvelé l’état d’urgence dans l’ensemble du pays à cinq reprises dans l’année pour des périodes allant d’un à trois mois”.
L’organisation avait déploré le recours de la police tunisienne à des arrestations arbitraires et des perquisitions de domicile en l’absence de mandat judiciaire.
En mai 2017, le chef du gouvernement Youssef Chahed a lancé une campagne anticorruption avec l’arrestation et l’assignation à résidence de plusieurs hommes d’affaires et contrebandiers sur la base du décret relatif à l’état d’urgence. Parmi les personnes arrêtées, figure notamment, l’homme d’affaire Chafik Jarraya.