Avons-nous besoin d’études pour parler des violences subies par les femmes tunisiennes, chaque seconde, chaque, minute, chaque heure et chaque jour que Dieu fait ?
Et si nous avions les moyens de comptabiliser ces violences à la minute près, je suis presque sûre que le monde entier serait effaré par les propos haineux, les insultes et les agressions de toutes sortes subies par les femmes dans un pays réputé être un pionnier en matière des droits des femmes.
Mais le gap entre le statut légal des femmes en Tunisie et leur statut social est énorme. La décision du président de la République de promulguer la loi sur l’égalité dans l’héritage quoique non contraignante à partir du moment où le donateur a le choix du régime successoral charaïque ou civile a suscité de grandes inimités ! Et ce qui est tragi-comique dans toutes ces campagnes dénigrant la décision présidentielle, c’est qu’alors qu’une grande majorité de Tunisiens n’ont rien à hériter et que par conséquent le problème ne se pose même par pour eux, ce sont ceux-là mêmes qui s’y opposent de manière virulente.
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Les raisons en sont bien entendu culturelles et religieuses. Les préceptes religieux utilisés à des fins populistes et électoralistes et un lobby islamiste qui dispose de grands moyens communicationnels comprenant des télévisions, des radions, des journaux électroniques et des réseaux sociaux et disposant de moyens financiers colossaux n’ont pas été pour juguler le phénomène de violence à l’égard des femmes.
Parmi les porte-drapeaux du parti, il y en a même qui ont imputé aux femmes le chômage de la gente masculine alors que statistiquement parlant, le taux des femmes diplômées chômeurs est de loin plus élevé que celui des hommes : 22,7% de femmes contre 12,5% d’homme en 2018 !
Chaque jour apporte aux femmes de notre pays son lot de déceptions de la part d’une société partagée qui, tour à tour, les admire, envie leur courage et leurs compétences mais les prive des postes décisionnels et leur reproche leurs performances.
C’est ce qui explique peut-être un des slogans portés par la campagne de lutte contre les violences à l’égard des femmes baptisée «Kifek-Kifha» (Vous êtes tous les deux pareils) et lancée le 25 novembre 2018 pour changer les représentations sociales par rapport aux violences faites aux femmes.
La misogynie revenue en force
Les réalisations des Tunisiennes présentes sur tous les fronts, bataillant sur les terrains politiques, socioéconomiques et culturels n’ont pas plaidé en faveur de la préservation de leur intégrité morale et physique dans des rues infestées de misogynes et qui plus est, est défendue même par des députés telle la représentante d’Ennahdha qui a accusé le président de la République de vouloir sortir la Tunisie de la terre d’islam. Elle a oublié qu’elle ne serait pas là où elle est si ceux qui ont gouverné la Tunisie après l’indépendance n’avaient pas défendu bec et ongles les droits des femmes et ne les avaient pas affranchies du joug d’une société exagérément patriarcale.
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Une étude réalisée par l’ONFP (Office National de la Famille et de la Population) à propos des violences faites sur les femmes a d’ailleurs résumé les réponses faites par les hommes -un échantillon de 3.000 hommes- à propos de la gente féminine et qui considèrent que :
– Le genre masculin est supérieur au genre féminin
– Le genre masculin doit dominer le genre féminin
– La modernité est une menace pour le genre masculin.
Sur un échantillon de 3.873 femmes entre 18 et 34 ans, 47,6% déclarent avoir subi au moins une fois une forme de violence dans leurs vies.
Les études réalisées par le CREDIF suivant la technique de focus groupe et d’entretiens individuels avec des populations et des profils diversifiés de tous âges prouvent qu’il existe un lien très fort entre la perception masculine de la femme et les violences que les hommes infligent aux femmes.
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Les résultats de l’enquête ont révélé que les violences que subissent les femmes proviennent de croyances, d’images et de représentations sociales, sources de justifications pour les hommes violents.
Ce qui prouve que le chemin à parcourir reste très long pour toutes ces femmes qui veulent que la parité soit une réalité et ne se limite pas aux discours. Ceci prouve également que, malgré toutes les avancées légales, une révolution culturelle s’impose pour changer en profondeur la société tunisienne et faire barrages aux vagues d’obscurantisme qui ne cessent de balayer notre pays !
Amel Belhadj Ali