Gouverner, c’est réformer. Réformer n’a pas de prix. Mais cela a un coût. Et il faut que la classe politique, unanimement, l’assume devant l’opinion publique.
Le chef du gouvernement, lors de son allocution, à l’inauguration des Journées de l’entreprise (JE) de l’IACE à El kantaoui, affirme adhérer à la nécessité de réformer. En substance, il laisse entendre qu’il valide la maxime : gouverner, au bout du compte, revient à conduire le changement. Jusqu’à l’horizon de la rupture? Toutefois, par réalisme, il considère que Le gradualisme doit tempérer l’esprit des réformes.
Youssef Chahed : J’accuse
Le Chef du gouvernement, avec résolution, dira aux journées de l’entreprise toute la foi qu’il a dans l’esprit des réformes. Le thème de cette 33 ème édition des journées,à savoir : “L’entreprise et les réformes de rupture’” est un “thème courageux”, dira-t-il.
Taieb Bayahi, président de l’IACE, lui, dira que hors les réformes de rupture, l’entreprise ne renouera pas avec la vigueur de la compétitivité. Et il sera, par conséquent difficile de changer la perspective de croissance pour le pays. Le chef du gouvernement a donc, une obligation de résultat. Il lui appartient, par conséquent, de procurer à l’entreprise, l’environnement propice à son expansion.
Youssef Chahed avoue que le pays marque le pas en matière de réforme. Mais ce n’est pas faute d’essayer. Le gouvernement se retrouve sans appui politique quand il engage les réformes. Les exemples sont abondants. La loi sur l’amnistie de change, qui pourrait, si elle était adoptée, soulager les réserves de change du pays, est en stand by à l’assemblée. Et cela fait plus d’un an qu’on attend qu’elle sot débattue et adoptée.
Les partis politiques se servent du slogan des réformes comme paravent électoral. En quête des suffrages lors des scrutins, leurs représentants plaident pour les réformes. Une fois élus, ils troquent les réformes pour des motifs populistes. C’est que les réformes ont un coût social. Il faut avoir le courage d’oser affronter l’opinion publique et lui avouer qu’au prix des sacrifices que leur coûteront les réformes, le pays créera plus de richesses. Il sera alors possible, à ces conditions, de concrétiser tout ou partie des promesses électorales énoncées.
Se défausser sur le gouvernement et esquiver ses responsabilités, est une attitude regrettable autant de la part de la majorité que de l’opposition. La classe politique unanime doit assumer, en responsabilité, le passage par la période difficile de la conduite du changement. Et c’est à ce prix que l’on pourra mieux répartir les richesses que les réformes auront permis d’engranger.
Le Chef du gouvernement avoue se retrouver seul face au bon peuple à endosser les retombées difficiles des réformes. Il avoue se retrouver dos au mur, comme à Kammour, où il était en prise directe avec le milieu de l’informel, privé de toute assistance de la part de la classe politique. Ni sa majorité, ni l’opposition n’ont levé le petit doigt. Et c’est encore un obstacle qui vient s’ajouter aux autres. Mais la défection de la classe politique n’a pas dissuadé pour autant de réformer. Il lui faut ferrailler contre d’autres inerties et autres résistances dont la bureaucratie.
Jouer l’urgence contre la rupture: Esquive ou attitude sincère
Acquis à l’esprit des réformes le Chef du gouvernement ira-t-il jusqu’à la rupture ? Pas si sûr. De toutes façons, sans le moindre esprit d‘esquive et en toute franchise, il considère que le modèle économique actuel possède encore du répondant, n’était les sabotages en tous genres.
Les phosphates régressent par la volonté de certaines parties prenantes. Pareil pour l’export. Ainsi que pour la production de pétrole. Qu’importe. La priorité est d’aller vers un nouveau modèle économique. Et c’est là une évidence et une priorité nationale. Les urgences du moment ont conduit le gouvernement à repousser la vision de rupture pour des ripostes graduelles.
L’IACE plaide pour la rupture, Youssef Chahed dit l’’implémenter aux exigences des mesures urgentes. Le gouvernement a hérité d’une situation qui allait elle-même vers un scénario intenable. Pouvait-il ne pas endiguer la dérive des finances publiques. Ne fallait il pas ramener le déficit budgétaire vers des paliers plus soutenables ? Ces contraintes retardent allègement des taux d’imposition et diffèrent la réforme fiscale.
Redresser la gestion macro économique s’est fait hélas,au détriment des réformes qui soulageraient l’entreprise. Les attentes de l’entreprise seront repoussées. La baisse des taux de l’impôt de 25 à 13 % se fera à l’horizon 2021. Mais on sait que Youssef Chahed ne peut pas s’engager au-delà de 2019 et les mesures qu’il propose sans les amorcer peuvent être récusées demain s’il y a un autre locataire à la Kasbah. De toutes façons, Youssef Chahed est venu aux journées de l’entreprise comme chef du gouvernement. Il repart avec un programme électoral.
Une raison d’espérer pour les chefs d’entreprise?