“Nouira et Bourguiba : le pouvoir entre économie et politique et les impératifs démocratiques”, c’est le dernier ouvrage publié par le journaliste et écrivain Sahraoui Gamaoun dans lequel il analyse la vie politique tunisienne d’après indépendance à la lumière des échecs et des réussites enregistrés durant les différentes décennies, marquées par des ouvertures économiques et des fermetures politiques ainsi que par l’ajournement répétitif du pluralisme et de la démocratie.
Dans cet ouvrage, l’auteur commence par une analyse biographique et historique de la personnalité de Hédi Nouira, ancien Premier ministre fort des années 1970, considéré comme le “père de l’économie tunisienne moderne”, cherchant ainsi à savoir l’influence de cet homme réaliste et pionnier du libéralisme social en Tunisie, ainsi que la place qu’il occupe sur l’échiquier politique tunisien dominé pendant des décennies par le charisme puissant du père de l’indépendance, Habib Bourguiba.
L’analyse des différents événements majeurs que la Tunisie a connus durant les décennies écoulées montre par ailleurs que le processus de développement économique et politique engagé par la Tunisie indépendante a été marqué par un déficit démocratique et en matière de liberté d’expression dans le pays. Cette situation a généré un ajournement répétitif de la transition démocratique sans laquelle les réalisations économiques et sociales, même grandioses, restent sans effet, estime l’auteur.
Le livre n’est pas biographique au sens classique du terme, mais bien une lecture critique du bilan mitigé des années d’indépendance nationale. C’est une tentative de savoir à quel point le pouvoir politique a-t-il réussi ou échoué dans ses efforts de réaliser le développement global dans sa dimension économique (compétitivité de l’économie et amélioration du niveau de vie des citoyens), et dans sa dimension politique (garantie du pluralisme et de la transition démocratique, consécration des libertés, des droits de l’Homme et de la liberté d’expression).
A la lumière de cette démarche analytique, l’auteur pose la question suivante : “comment peut-t-on remédier à ce déficit démocratique et institutionnaliser par la suite cette transition pour la rendre ainsi irréversible?”.
Il met en garde en revanche contre les dangers qui guettent la jeune démocratie, à savoir le désenchantement populaire face à une démocratie fragile et un pouvoir démocratique issu des urnes mais faible qui rappelle le syndrome de l’Etat déliquescent, manipulé par les lobbies de la politique, des médias et de l’argent sale, source de pollution et de dangers mortels pour une démocratie fragilisée, comme le souligne l’auteur en guise de conclusion.
Il est à rappeler que cet ouvrage de 178 pages de taille moyenne est le cinquième publié par l’auteur (ancien rédacteur en chef a l’Agence Tunis Afrique Presse TAP). Il avait publié l’an dernier un livre intitulé “Islam et émancipation de la femme : le combat de Cheikh Salem Ben Hamida” dans lequel il a brossé le portrait de ce cheikh zeitounien éclairé, un des pionniers du mouvement de reforme sociale et du combat de la libération de la femme en Tunisie.