Dans certains domaines, l’erreur n’est pas permise, parfois elle est même fatale pour ne pas dire assassine. C’est notamment le cas de la politique du taux de change.
Depuis 2011, la Tunisie a introduit une dose de libéralisation du taux de change sans que les préalables requis ne soient réunis, ce qui a accéléré le mouvement de la baisse du dinar. Dans un contexte économique et financier difficile, les autorités ont en effet abandonné, en 2012, le recours au panier de devises qui servait de référence au marché de change et ont adopté le principe du pricing.
En 2013, elles ont procédé à la création de la fonction de “Market Markers“ (ou faiseurs de marché), ce qui ouvrira la porte –avec les déséquilibrés macro-économiques croissants, de la baisse des réserves de change et de la réduction de la capacité des autorités à intervenir sur le marché des changes- à une dépréciation récurrente du dinar.
Je dois avouer que cette réforme était envisagée depuis 2009 dans le cadre du programme global devant mener le pays vers la convertibilité du dinar, mais les autorités d’alors avaient considéré que cette étape avait ses préalables (stabilité macro-économique, maîtrise de l’inflation, disponibilité d’un matelas de devises capable d’assurer la défense du dinar), et ce d’autant que la crise financière internationale n’était pas encore totalement résorbée.
En 2012, l’Etat s’engagea dans cette politique d’assouplissement de la politique de taux de change sans s’assurer des garanties nécessaires à sa réussite, une transition qui sera menée sans vision et avec l’intervention dans le désordre de plusieurs acteurs dont le FMI qui a été, chose nouvelle, jusqu’à exiger une limite à l’intervention de la BCT sur le marché.
La suite est connue de tous : une dépréciation continue du dinar avec ce que cela génère comme inflation importée, comme dette supplémentaire et comme anticipations négatives préjudiciables à toute reprise. Evidemment certains facteurs objectifs (baisse de la compétitivité de l’économie, réduction du potentiel d’exportation dans certains secteurs importants, inflation …) rendaient le dinar surévalué et exigeaient une certaine correction. Les mesures prises en 2012 et 2013 ont cependant fait perdre aux autorités toute maîtrise sur le cours du taux de change d’autant que les réserves de change n’ont cessé de se réduire malgré le recours massif à l’endettement extérieur.
Notre livre traite de ces questions et propose une stratégie globale pour sortir de cette situation délicate. Ceux qui s’y intéressent sont invités à consulter le Chapitre lll de la deuxième partie : «Politiques monétaires, budgétaires et de change : des réformes incontournables».