La réunion de la Commission des compromis de l’ARP, tenue mercredi 20 février, n’est pas parvenue à trouver un accord sur les points de friction concernant le projet de loi amendant et complétant la Loi organique sur les élections et référendums.
Les principaux amendements sont liés au seuil électoral et au financement des partis.
De ce fait, la Commission a procédé en urgence à l’audition du président de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE), Nabil Baffoun. Mais il a tenu à préciser que l’avis de l’Instance au sujet du seuil électoral serait purement technique.
Ainsi, le président de l’ISIE a présenté une simulation des élections législatives de 2014 en appliquant le nouveau seuil électoral de 5% dans le but de montrer les effets de la prise en compte dudit seuil sur le nombre de voix, ainsi que la différence entre l’adoption de ce seuil et sa non-adoption.
Baffoun a fait observer que le critère du seuil électoral n’a pas été appliqué dans les élections législatives précédentes, lesquelles ont adopté la méthode au plus fort reste.
Il a souligné que le seuil de 3% a été appliqué uniquement lors des municipales de mai 2018. Pour le président de l’ISIE, le problème réside dans le nombre de voix qui ne seront pas comptées et qui n’auront aucune représentativité au sein du Parlement, d’autant plus qu’aucune partie ne pourra en tirer un certain avantage.
“La prise en compte du seuil électoral est une question purement politique. Certes, l’ISIE a des solutions pour cette question, mais elle préfère s’abstenir”, a déclaré Baffoun.
De son côté, le député Ghazi Chaouachi (Bloc Démocratique) a fait savoir qu’il existe des voix concordantes pour convenir d’un seuil électoral de 3%, cependant, le problème demeure pour ce qui est de la méthode de décompte du quotient électoral (le nombre total des voix).
Chaouachi estime qu’on pouvait faire le décompte du quotient électoral pour ceux qui ont réussi à avoir un nombre de voix proche du seuil électoral, et ce dans le but de diversifier le paysage parlementaire, de donner plus de chance à la représentativité et éviter le gaspillage des voix des électeurs.
Le député du bloc démocratique a souligné que Nidaa Tounes et Ennahdha ont raflé 71% des sièges lors des élections législatives de 2014. Avec l’application d’un seuil électoral de 5% et la non prise en compte du quotient électoral, les deux mouvements auront à eux seuls 85% des sièges.
“Avec ce nouveau paysage parlementaire, l’opposition se trouvera dans l’impossibilité de déposer des recours pour inconstitutionnalité des lois, parce que le recours exige l’aval de 30 députés au moins”, a-t-il ajouté. “Il existe dans plusieurs régimes à travers le monde plus de 200 systèmes électoraux. La Tunisie peut avoir un système électoral qui lui serait spécifique”, a-t-il estimé.
Par ailleurs, un des différends exposés lors de cette réunion consistait en la suppression ou non du 5e paragraphe de l’article 121 de la loi sur les élections et référendums. Cette une proposition présentée par le bloc Al-Horra de Machrou Tounes a été approuvée par Nidaa Tounes; le groupe d’Ennahdha et le Bloc démocratique la rejettent.
Le 5e paragraphe de l’article 121 dispose que: “Ne peut figurer parmi les membres ou les présidents des bureaux de vote, toute personne ayant assumé une responsabilité au sein des structures du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD dissous) conformément aux dispositions du décret n°2011-1089 du 3 août 2011”.
Le président du bloc al-Horra, Hsouna Nasfi, a indiqué dans une déclaration aux médias, plus tôt dans la journée de mercredi, que le groupe Ennahdha n’a pas encore tranché concernant l’annulation ou non de ce 5e paragraphe.
Autre différend débattu lors de cette réunion : une proposition d’amendement de la loi électorale, présentée par le groupe parlementaire de Nidaa Tounes, relative à l’interdiction de ce qu’on appelle “le tourisme partisan”. Celle-ci stipule l’ajout d’un nouvel alinéa à l’article 34 selon lequel tout élu perd automatiquement son siège s’il démissionne du parti, du mouvement ou de la coalition qui l’a porté candidat à toute instance élue (…) ou du bloc parlementaire auquel il appartient.
Dans des déclarations à l’Agence TAP, plusieurs députés ont remis en question la constitutionnalité de cette proposition d’amendement.
Selon eux, la proposition d’amendement de Nidaa Tounes est une “initiative législative et non un amendement de la loi électorale”.
De ce fait, il faut s’interroger d’abord sur le degré de constitutionnalité de cette proposition et la manière de l’examiner, ont-ils préconisé….