L’ONG Human Rights Watch (HRW) accuse le gouvernement tunisien de s’acharner contre l’association de défense des minorités sexuels “Shams”, “dont la justice avait auparavant reconnu le droit d’agir en toute légalité”.
“Si les organisations de défense des droit humains et des minorités sexuelles sont forcées de mettre la clé sous la porte, c’est l’image même de la Tunisie comme sanctuaire de liberté et de démocratie dans la région qui en pâtira”, met en garde Amna Guellali, la directrice du bureau de Tunis de Human Rights Watch, dans un communiqué rendu public mardi.
Selon le communiqué, l’association Shams a été enregistrée auprès du gouvernement en mai 2015 en tant qu’organisation non gouvernementale œuvrant au soutien des minorités sexuelles et de genre.
Le 4 janvier 2016, à Tunis, un tribunal de première instance, en réponse à une plainte déposée par le secrétaire général du gouvernement selon laquelle Shams violait la loi régissant les associations, a notifié le groupe de la suspension de ses activités pendant 30 jours.
Le 23 février 2016, la justice a jugé que Shams n’était pas en infraction avec la loi et a levé cette suspension.
L’appel du gouvernement, que Human Rights Watch a examiné, affirme que l’objectif déclaré de Shams dans ses statuts, à savoir la défense des minorités sexuelles, contrevient aux “valeurs islamiques de la société tunisienne qui rejettent l’homosexualité et interdisent ce comportement qui lui est étranger”, indique la même source.
Il argue également que la loi tunisienne, qui criminalise les actes homosexuels dans son article 230 du Code pénal, interdit la création et les activités d’une association qui prétend défendre de telles pratiques.
La circulaire sur les associations, adoptée par le gouvernement de transition en septembre 2011, exige des associations qu’elles “respectent les principes de l’état de droit, de démocratie, de pluralité, de transparence, d’égalité et de droits humains” énoncés dans les conventions internationales ratifiées par la Tunisie. Elle interdit aussi l’incitation à la violence, à la haine, à l’intolérance et à la discrimination fondée sur la religion, le genre ou la région.
Cependant, Shams a apporté un soutien clair à l’abrogation de l’article 230 du Code pénal tunisien qui prévoit une peine de trois ans de prison pour la sodomie.
Le groupe a publiquement condamné les arrestations et les poursuites judiciaires ouvertes récemment à l’encontre d’homosexuels, notamment la condamnation d’un homme de Sfax à huit mois de prison après qu’il est allé porter plainte à la police pour agression.
Shams a également dénoncé le recours aux examens anaux médico-légaux visant à supposément détecter les pratiques homosexuelles.
La loi sur les associations donne au système judiciaire le pouvoir de décider si une association peut être suspendue ou dissoute.
Une telle décision implique un processus en trois étapes, la première étant une mise en garde adressée par le gouvernement, suivie d’une demande du gouvernement auprès du Tribunal de première instance de Tunis pour obtenir une suspension de 30 jours.
Si le tribunal valide la requête, l’association est suspendue pendant 30 jours, après quoi le tribunal peut la dissoudre en cas d’échec à remédier aux infractions commises.