La digitalisation de l’administration est retenue depuis 2012 dans le cadre de la stratégie ”Tunisie numérique 2020“, comme la priorité des priorités. Pourtant, il a fallu attendre l’année 2019 pour relever une lueur d’espoir et constater, enfin, que les choses semblent bouger dans le sens d’une véritable numérisation.
Cette note d’optimisme est justifiée par la réunion de deux facteurs importants: la disponibilité d’un financement et l’identification de projets clairs programmés par plusieurs départements ministériels.
S’agissant du financement, l’Allemagne vient d’accorder à la Tunisie un don de 140 millions de dinars dédié au cofinancement de la digitalisation de l’administration tunisienne. Ce don servira à cofinancer, notamment, la mise en place d’une plateforme numérique commune entre tous les ministères.
Cinq projets sont programmés au plan transversal
Concernant les projets dont la réalisation est programmée pour 2019, il y a lieu de citer, au niveau transversal, cinq projets. Le premier concerne la mise en place d’un identifiant unique pour chaque citoyen. Ce projet a pour objectif de répertorier plus de 12.000 noms pour répondre au besoin lié à l’amélioration de la collecte des données dans les secteurs foncier et agricole.
Le deuxième projet a trait au certificat de naissance électronique. Il s’agit de faire en sorte que ce certificat ne soit plus demandé aux citoyens mais d’un ministère à l’autre. Fin 2019, il sera interdit à toute administration d’exiger du citoyen le certificat de naissance.
Le troisième projet est le paiement électronique des taxes municipales.
Le quatrième projet porte sur la digitalisation de la gestion des permis de bâtir qui commence au cours de cette année 2019. Il n’est pas inutile de rappeler que pour avoir un permis de construire, il faut attendre plus de trois mois. C’est ce qui expliquerait que plus de 30% des logements en Tunisie soient construits de manière anarchique.
Le cinquième projet est la mise en place d’un réseau administratif intégré des collectivités locales. Le programme a commencé et sera achevé fin 2019.
D’autres projets intéressants sont programmés par les ministères en charge de l’Education, de l’Enseignement supérieur et de la Formation professionnelle.
Le ministère de l’Education a programmé pour sa part trois projets : la digitalisation de l’administration du ministère. Ainsi, 6.500 établissements scolaires seront liés à l’Internet haut débit.
Education : les inscriptions en ligne seront généralisées
Pour les services en ligne, sur un total de 15 projets, trois méritent qu’on s’y attarde. Un premier pour l’inscription en ligne dans les écoles primaires de 2 millions d’élèves. Il a déjà concerné en 2018 les collèges et les lycées. Un deuxième pour la mise en place d’une plateforme de formation des formateurs afin de leur permettre d’accéder au contenu de la formation en ligne.
Un troisième concerne une plateforme de révision pour les 6e et 9e années de l’enseignement de base ; ce service a été lancé en 2018 pour les élèves du baccalauréat.
En ce qui concerne le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Slim Khalbous a annoncé lors d’un point de presse que cinq projets seront entamés en 2019. Il s’agit de la carte d’étudiant intelligente «Smart card». Un projet pilote a déjà été lancé en 2018. Cette carte permettra de reconfigurer la relation de l’université avec les étudiants puisqu’elle intégrera tous les services universitaires.
Les étudiants pourront payer la restauration et les foyers universitaires et recevoir leurs bourses sur cette carte.
Le ministère travaille également sur la plateforme des métiers. Durant les deux dernières années, 135 centres de métiers ont été créés, selon Khalbous, soit 75% des établissements universitaires ayant des centres de métiers. Ils fournissent une formation supplémentaire aux étudiants pour les préparer au marché du travail.
Il a souligné que la plateforme est prête pour démarrer, durant le premier trimestre 2019, pour intégrer tous les centres sur la même plateforme. Elle permettra aussi d’avoir des données sur les étudiants, de les suivre même après leur diplomation afin de déterminer leur employabilité. Ceci permettra d’améliorer les méthodes d’enseignement, a-t-il précisé.
Digitalisation en vue des services universitaires
Un autre projet concernera la digitalisation des services universitaires de façon générale. Khalbous a indiqué qu’une interface numérique sera mise en place pour faciliter la communication entre les différents intervenants au sein de l’université à travers une adresse électronique commune, des services communs tels que les cours à distance et la communication à distance entre étudiants et enseignants universitaires.
Il s’agit aussi de tabler sur la formation des formateurs avec la mise en place d’outils modernes d’enseignement. Les enseignants universitaires seront encouragés à numériser tous leurs cours sur la plateforme électronique et utiliser les TIC dans leurs cours.
Enfin, le ministère vise à intégrer toutes ses interfaces dans une plateforme unique.
La digitalisation des diplômes de licences est un chantier qui sera poursuivi, surtout que la base des données est prête et digitalisée.
Quelque 37.000 diplômes de licences, représentant 67% des diplômes octroyés chaque année (55 mille), seront numérisés.
Les centres de formation professionnelle seront numérisés
Du côté du ministère de la Formation professionnelle et de l’Emploi, à signaler deux importants projets pour 2019 : la digitalisation des diplômes de formation professionnelle et la mise en place d’une plateforme de services avec une double interface : une première pour les centres de formation professionnelle et les spécialités disponibles et une deuxième pour l’administration et la gestion du secteur en coopération avec les ministères de l’Education et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique.
Nous pensons toutefois que la digitalisation de l’administration tunisienne a accusé beaucoup de retard et que le moment est venu pour la booster. L’essentiel est de lui garantir transparence, efficience, célérité, équité et neutralité, et ce conformément à l’esprit de l’article 15 de la Constitution tunisienne. Cet article stipule que : «L’administration publique est au service du citoyen et de l’intérêt général. Son organisation et son fonctionnement sont soumis aux principes de neutralité, d’égalité et de continuité du service public, conformément aux règles de transparence, d’intégrité, d’efficacité et de redevabilité».
Le message est on ne peut plus clair pour ceux qui gèrent le secteur stratégique de la numérisation.