La Tunisie, où jaillit la première étincelle de la “Révolution pour la liberté et la dignité”, un 17 décembre 2010, accueille, bientôt, le 30e Sommet de la Ligue des Etats arabes (31 mars 2019). Dans cet intervalle de temps, l’organisation panarabe a été confrontée au défi de ce que certains appellent “le Printemps arabe”.
Cet épisode est resté un enfer pour des millions de réfugiés syriens, libyens et yéménites.
La Tunisie, elle, a réussi à mettre sur les rails un processus démocratique soumis, cependant, à rude épreuve par de grosses difficultés socioéconomiques.
Réactivité
Jusque-là critiquée pour sa “léthargie”, la Ligue des Etats arabes a surpris le monde par la célérité de sa réaction, lors des soulèvements populaires en Libye et en Syrie. Des concepts “démocratie”, “gouvernance”, “droits de l’homme”, “participation de la femme”, “promotion de la jeunesse” firent, alors, leur apparition dans les documents de la Ligue.
Dès le 12 mars 2011, au Caire, l’organisation panarabe appelle le Conseil de sécurité de l’ONU à adopter une résolution pour l’installation d’une zone d’exclusion aérienne en Libye, en soutien au “peuple libyen dans sa lutte pour la liberté et contre un régime de plus en plus dédaigneux”, selon les termes de son secrétaire général d’alors, Amr Moussa. C’était la première fois que la Ligue arabe intervenait contre l’un de ses Etats membres. La résolution du Conseil de sécurité de l’ONU fut adoptée le 17 mars 2011.
Le 12 novembre de la même année, la Ligue décide de suspendre provisoirement l’adhésion de la Syrie, lors d’une réunion d’urgence, au Caire, et appelle ses Etats membres à retirer leurs ambassades de Damas, après la recrudescence des violences. Les factions de l’opposition syrienne sont, alors, invitées à se réunir, au siège de la Ligue arabe, pour s’accorder sur un projet commun, en vue d’une période de transition.
Avec l’aggravation de la situation en Syrie, la Ligue dépêcha sur place, le 26 décembre 2011, 165 observateurs et proposa un plan de sortie de crise. Mais, quelques semaines plus tard, elle retira ses observateurs, face à l’échec de son intermédiation (28 janvier 2012).
Inertie
Pourtant, l’inertie de la Ligue reste de mise, lorsqu’il s’agit de questions aussi cruciales que Daech, les réfugiés, la montée de l’extrémisme et les problèmes socioéconomiques, mises à part les déclarations de bonne intention.
Face au péril de l’organisation Etat islamique “Daech” en Syrie, en Libye et en Irak, le projet de force armée commune est renvoyé aux calendes grecques, depuis le Sommet de Nouakchott, tenu le 25 juillet 2016. Seuls six chefs d’Etat arabes, sur un total de 22, y firent le déplacement, auxquels s’ajoute le président du pays hôte.
L’unique fois où une coalition militaire arabe est formée, ce fut en mars 2015, pour contrer les rebelles Houthis et défendre le pouvoir légitime au Yémen.
Question réfugiés, outre quelques recommandations, la Ligue arabe n’a pris aucune mesure concrète, ni apporté aucun soutien aux pays d’accueil des réfugies, eux-mêmes confrontés à de gros problèmes économiques (Tunisie, Liban, Jordanie).
Unité
Plus que jamais “l’unité arabe”, principal credo édicté par la Charte de la Ligue, est fragilisée, notamment avec la qualification du Hezbollah, partenaire du pouvoir au Liban, de “parti terroriste”, au terme d’une réunion extraordinaire des ministres des Affaires étrangères, le 19 novembre 2017, au Caire, et la condamnation, lors du 29e Sommet arabe (15 avril 2018, à Dhahran, en Arabie Saoudite), de l’utilisation par le régime syrien des armes chimiques prohibées contre son peuple.
Le 30e Sommet arabe de Tunis, prévu le 31 mars 2019, réussira-t-il à colmater les brèches et à ressouder les rangs des Etats membres affaiblis par des conflits internes?
Le retour de la Syrie dans le giron arabe, la préservation de l’intégrité territoriale de la Libye et de l’Irak, le règlement de la crise humanitaire au Yémen, la lutte contre le terrorisme…, autant de questions incontournables auxquelles la Ligue des Etats arabe va devoir apporter des réponses, lors du prochain sommet.