Une mine aux réserves considérables de concentré de phosphate, dans le plateau de Chaketma à Jedeliène (Kasserine), attend, depuis presque deux ans, l’autorisation d’exploitation de la part du ministère de l’Industrie.
La demande de concession d’exploitation a été déposée auprès de la Direction générale des mines, le 5 décembre 2017, mais le ministère de l’Industrie traîne encore pour donner son feu vert à la société “Chaketma Phosphates”, une joint-venture tuniso-australienne, pour qu’elle puisse démarrer les travaux d’exploitation.
Selon Fethi Hchifa, directeur général de Chaketma Phosphates, la demande de la concession d’exploitation a été examinée par le Comité consultatif des mines (ministère de l’Industrie), à trois reprises, la dernière date du 1er août en 2018. Mais, le Comité a refusé la demande “définitivement” sans explications claires.
Le responsable accuse même un ancien secrétaire d’Etat aux mines d’avoir “empêché la société Chaketma Phosphates d’obtenir sa concession d’exploitation en usant de son pouvoir sur les 4 membres du Comité, qui étaient sous sa coupe”.
En fait, ce projet minier a refait surface lors d’une controverse, suscitée par certains médias ayant évoqué des soupçons de corruption concernant ce dossier.
Vérification faite, il s’agit non pas de corruption mais plutôt d’un blocage au niveau du ministère de l’Industrie et d’un conflit qui oppose les actionnaires tunisien et australien du projet.
L’actionnaire local, en l’occurrence “Tunisian Mining Services” (TMS) et l’australien “Celamin LTD” sont entrés en litige, depuis mars 2015, suite à une prise par le premier des participations de son coactionnaire, dans la société “Chaketma Phosphates”.
Les deux actionnaires partagent les actions dans cette société à raison de 49% pour TMS et 51% pour Celamin.
D’après les responsables tunisiens de Chaketma Phosphates, ce conflit ne pourrait en aucun cas influencer la marche du projet. D’ailleurs, la Cour internationale d’arbitrage et la Cour d’appel de Tunis se sont prononcées en faveur d’un retour des participations à la société australienne. Les deux actionnaires vont trouver un arrangement pour aller de l’avant.
Le directeur général de la société Chaketma Phosphates déplore “un blocage douteux” de la part du ministère de l’Industrie et appelle à débloquer la situation pour faire profiter tout le pays d’un investissement prometteur et envoyer un signal positif aux investisseurs étrangers, qui “ont manifesté leur intention de participer au financement du projet”.
Un apport économique confirmé
Toutes les études concernant la mine de phosphate de Chaketma confirment l’existence d’un gisement pour la production de 750 mille tonnes de concentré de phosphates par an pour les 7 premières années et 1,5 million de tonnes à partir de la huitième année, selon un document parvenu à l’agence TAP.
Le projet, dont les réserves minières sont aisément, exploitables (exploitation à ciel ouvert, pour une durée de plus de 70 ans), pourrait créer, une fois mis en exploitation, plus de 500 emplois directs et environ 1000 indirects. L’investissement est estimé à 200 Millions de dinars pour les travaux (extraction, flottation, enrichissement et logistique) pour la première étape (les 7 premières années), avec un investissement complémentaire d’environ 180 millions de dinars, prévu à la 7ème année pour atteindre une production de 1,5 million de tonnes de phosphate concentré, à partir de la 8ème année.
Tous les indicateurs économiques concernant ce projet sont positifs. Dans une région marginalisée, il pourrait servir de modèle de renforcement du partenariat public privé dans les projets d’infrastructure, d’établissements de santé et éducatifs dans toute la région.
Car, il prévoit l’installation et l’insertion sociale selon les normes internationales, la contribution positive au développement de la région et du pays en général, l’application étroite des politiques environnementales et des possibilités de développement à moyen terme, après stabilisation de l’exploitation minière, d’une usine d’acide Phosphorique ou bien d’engrais.
Retour sur l’historique du projet
Le permis de recherche dénommé “Chaketma” a été obtenu en Février 2010, par TMS et Celamin. Vu la consistance des travaux de prospection et des études réalisés, le permis a été renouvelé pour la 1ère fois en novembre 2012.
Un accord de partenariat pour développer le projet de Chaketma a été signé en octobre 2013, entre le partenaire local Tunisian Mining Services et le partenaire australien Celamin Ltd.
En octobre 2014, une joint-venture entre les deux partenaires a été créée et dénommée “CHAKETMA PHOSPHATES S.A” (CPSA) et le permis de recherche lui a été transféré. Un deuxième renouvellement du permis de recherche a été accordé en décembre 2015 jusqu’à février 2018.
Une étude de faisabilité par des bureaux d’engineering internationaux américain et britannique JACOBS et SRK a été réalisée et une étude d’impact environnemental a été aussi, réalisée par un Bureau d’étude International. Ces études ont estimé les ressources de phosphates à 230 millions de tonnes.
Dans le cadre de la responsabilité sociétale de la compagnie, “Chaketma Phosphate” prévoit la création d’un centre de formation pour les jeunes de la région, la création d’un fonds pour le financement de petits projets et l’encouragement des jeunes à s’installer à leurs propres comptes.
A préciser que l’agence TAP a demandé, à plusieurs reprises au département de l’Industrie, des précisions concernant ce dossier, mais le responsable de communication de ce ministère -souvent très rapide quant il s’agit de contacter l’agence pour publier un démenti sur les soupçons de corruption à propos de ce projet évoqués par des sites électroniques- n’a pas donné suite aux requêtes des journalistes de la TAP.