L’événement géostratégique régional a été créé, la nuit du mercredi 3 avril 2019, par l’offensive militaire lancée par le maréchal Khalifa Belqasim Haftar pour prendre le contrôle de la capitale historique de Libye, Tripoli où est basé le Gouvernement d’union nationale (GNA) de Fayez al-Sarraj.
En Tunisie, cette nouvelle escalade de violence n’a pas été, particulièrement, du goût de deux partis politiques tunisiens : le parti d’Ennahdha et Hraka Tounès.
Au regard de leurs réactions, ces deux mouvements qui avaient gouverné ensemble de 2012 à 2013, dans le cadre de la fameuse «Troïka», se préoccupent sérieusement des retombées d’une éventuelle victoire du maréchal Haftar.
Il faut reconnaître que le mandat de la Troïka a été marqué, dans le cadre de la mouvance islamique internationale, par une connivence et une alliance sacro-sainte entre Ennahdha et les sectes islamistes libyennes, Fejr Libya et El-Watan.
Le chef du parti El Watan, Abdelhakim Belhaj, l’ancien combattant islamiste dans les rangs d’Al-Qaïda en Afghanistan dans les années 1980-90 et ex-chef du Conseil militaire de Tripoli, était accueilli avec tous les honneurs par les dirigeants nahdhaouis, en Tunisie.
On se déplaçait à Ben Guerdane (800 km de Tunis) pour recevoir ce chef de guerre dont le nom était souvent cité dans les instructions judiciaires sur les affaires d’attentats de militants politiques en Tunisie (Chokri Belaid, Mohamed Brahmi…).
Le parti Ennahdha sérieusement préoccupé
Pour revenir à la réaction d’Ennahdha, ce parti estime que cette offensive risque de générer un nouveau bain de sang à Tripoli et de pousser des milliers de Libyens à fuir le pays.
Dans un communiqué, Ennahdha ajoute que la nouvelle escalade est également de nature à compromettre le processus de réconciliation inter-libyenne, à menacer sérieusement la paix sociale dans ce pays et la sécurité de toute la région.
Le parti Ennahdha stigmatise l’immixtion de certains pays (sans les nommer) dans le dossier libyen et leur reproche d’attiser les dissensions entre les Libyens.
D’ailleurs, le site d’information émirati «El Ain» n’est pas allé par quatre chemins. Il a attribué à des observateurs et experts tunisiens que le sort d’Ennahdha serait scellé si jamais le maréchal Haftar prenait le contrôle de la Tripolitaine. «L’avenir des terroristes en Tunisie, et à leur tête les “confréristes“ (Ikhwan) nahdhaouis, est étroitement lié aux résultats des combats qui se déroulent, actuellement, aux alentours de Tripoli, et ce en raison des étroites relations qu’entretient Ennahdha avec les milices qui opèrent à l’ouest de la Libye», relèvent ces experts tunisiens cités par le site.
Il s’agit des milices sanctuarisées à Nalout, Ghariane et Jebel Nefffoussa, ajoute le site.
Marzouki panique
Quant au chef du parti Harak Tounes Al-Irada, Moncef Marzouki, il a indiqué, sur sa page facebook, que la marche du maréchal Haftar sur Tripoli vise en priorité «la mobilisation populaire en Algérie» suite à la démission du président Abdelaziz Bouteflika et la sécurité nationale de la Tunisie.
Pour lui, cette escalade de violence cible l’Algérie, en ce sens où elle va créer une tension à la frontière libyo-algérienne et donner une opportunité aux contre-révolutionnaires pour refaire surface.
Quant à la Tunisie, il pense que cette escalade cible la stabilité et la sécurité de la Tunisie, en ce sens où elle anticipe sur les résultats des prochaines élections et pave le terrain pour une éventuelle victoire des contre-révolutionnaires.
L’ancien président provisoire tunisien, qui semble préoccupé par cette offensive, a oublié que c’est sous son mandat que des pays comme Qatar et la Turquie avaient fait transiter par la Tunisie d’importantes quantités d’armes au profit des milices terroristes libyennes, selon plusieurs sources bien informées.
Marzouki a également oublié que ce sont ces mêmes milices, armées en partie grâce à la complicité de la Troïka, qui ont commandité en Tunisie assassinats politiques, attentats et projets de déstabilisation (attentats terroristes, inondation du pays par la drogue et d’objets contrefaits…).
Et pour ne rien oublier, l’ancien président provisoire, lui qui prétend être un droit-hommiste, doit avoir encore à l’esprit sa signature scandaleuse de l’acte d’extradition de l’ancien Premier ministre de Kadhafi, Baghdadi Ali al-Mahmoudi.
Cela pour dire qu’au final, au regard de toutes ses bourdes, le Moncef Marzouki a de bonnes raison de s’inquiéter d’autant plus que le maréchal Haftar mise sur le désenchantement des populations libyenne et tunisienne du printemps arabe, sujet dada de Marzouki.