La Confédération générale tunisienne du travail (CGTT), qui se veut un syndicat de propositions, a organisé, le 13 avril 2019, un atelier de réflexion sur « l’avenir du syndicalisme à l’ère des technologies numériques », en partenariat avec la Fédération syndicale Wallonie-Bruxelles.
Pour animer cet atelier, qui s’est tenu, à la veille du centenaire de l’Organisation internationale du travail (OIT) et la fête du travail, elle a invité l’expert belge Pierre Guilbert qu’on surnomme dans son pays le « toubib d’entreprise ». Ce dernier a fait une communication sur le thème : « Le people management, la communication et l’avenir du travail ».
Dans sa communication, Pierre Guilbert, fort de son parcours de 44 ans dans le social, le socioculturel, le politique et le business, a commencé par rappeler les facteurs qui vont changer le monde du travail, à l’horizon 2030.
« La robotisation intelligente, l’intelligence artificielle, les concentrations et la concurrence internationales, les défis environnementaux, les réseaux sociaux, le Cloud, autant de nouveautés qui bouleversent la donne, et qui vont amener des changements phénoménaux dans la décennie qui vient. Des changements d’une portée sans doute plus importante que ce que le Web a apporté. Des changements potentiellement positifs, pour autant que l’on en comprenne le sens. Et qu’on adopte une posture adéquate », a-t-il averti.
Pour étayer sa réflexion, Pierre Guilbert a cité deux chiffres effrayants : à l’horizon 2030, par l’effet de l’économie numérique, environ 2 milliards d’emplois vont disparaître et 60% des emplois existants actuellement vont disparaître. Ce sera, ce qu’il a appelé, la « génération robot » avec comme corollaires : une nouvelle organisation du travail, un nouveau type de salariat, l’avènement du travail autonome « freelance » et un nouveau genre de syndicalisme.
Innover pour surmonter les conséquences d’une numérisation déshumanisante
Face à cette situation, Pierre Guilbert estime que l’homme a quatre choix : rester paralysé, fuir, refaire ce qu’on a toujours fait, innover. C’est cette quatrième possibilité qu’il nous conseille de faire.
Il estime que les méthodes innovantes existent et qu’il suffit de les adopter pour ne pas rater la 4ème révolution industrielle, en l’occurrence la révolution numérique.
Parmi ces méthodes, il a évoqué les avantages à tirer de la communication, de la collaboration et de la formation, insistant sur l’assertivité que de telles méthodes vont générer. Il s’agit selon lui de créer un mode de communication qui concilie l’affirmation de soi-même et le respect d’autrui.
Au cours du débat instauré ensuite, des intervenants ont estimé que les prévisions de l’expert belge sont à la fois exagérées et excessives et que l’homme, par principe, ne peut pas facilement abandonner une organisation du monde, laquelle, bien que parfois imparfaite, a résolu pas mal de problèmes auxquels était confrontée l’humanité.
Certains n’excluent pas l’idée que l’humanité va résister à cette nouvelle révolution dont le seul but est de déshumaniser le monde et de détruire des emplois.
Pour d’autres, comme Habib Guiza, secrétaire général de la CGTT, l’enjeu réside dans la migration de l’économie fordiste vers l’économie numérique.
Au sujet d’une éventuelle nouvelle organisation du travail, il pense que tout va se jouer au niveau du degré d’imagination que va déployer l’humanité pour créer de nouveaux emplois et de nouvelles institutions syndicales adaptées au nouveau contexte.
A ce propos, un intervenant a rappelé cette maxime du philosophe Karl Marx : « L’humanité ne se pose jamais que des problèmes qu’elle est capable de résoudre ».