Au moment où les entreprises tunisiennes cogitent, encore, sur les stratégies à mettre en place pour s’imposer sur le marché africain, les groupes marocains, sur le terrain depuis 2000, s’emploient à renforcer, en partenariat ou tous seuls, leur percée sur ce marché et à remporter marché après marché.
Pour preuve, le leader marocain des matériaux de construction, le consortium maroco-franco-suisse, Lafarge Holcim Maroc Africa (LHMA), principal actionnaire du cimentier camerounais “Cimencam“ depuis 2015, a inauguré, le 2 avril 2019, une troisième cimenterie au Cameroun.
D’une capacité de 500.000 tonnes, la nouvelle cimenterie implantée à Nomayos (banlieue de Yaoundé) a coûté plus de 41 millions d’euros d’investissement et va desservir en ciment les régions camerounaises du centre, de l’est et du sud, ainsi que la République centrafricaine.
La cimenterie de Nomayos, qui vient s’ajouter à celle de Douala et de Figuil, au nord du Cameroun, permet à ce pays de porter sa capacité totale à 2,2 millions de tonnes.
En remportant ce marché, le groupe Lafarge Holcim Maroc Africa a fait un exploit en ce sens où le marché du ciment au Cameroun est ouvert, voire libéralisé. Il est sérieusement concurrencé par le nigérian Dangote Cameroon et Medcem Cameroun, filiale du turc Eren Holdings.
En cinq ans, le Maroc a investi 3,8 milliards de dollars en Afrique
Par-delà cette performance du groupe LHMA, les investissements marocains en Afrique subsaharienne ne cessent d’augmenter et se diversifier.
Selon des statistiques officielles marocaines fournies le 19 mars 2019 aux médias, par le ministre marocain de l’Industrie, de l’Investissement, du Commerce et de l’Economie numérique, Moulay Hafid Elalamy, la valeur cumulée des investissements directs marocains en Afrique a atteint, entre 2013 et 2017, 3,83 milliards de dollars.
«L’Afrique est le premier bénéficiaire des investissements directs marocains. Le Maroc est désormais parmi les premiers investisseurs africains de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC)», a-t-il souligné dans un entretien accordé à l’agence de presse officielle marocaine MAP.
A la base, une volonté politique et…
A l’origine de cette performance, une implication personnelle du souverain marocain dans la promotion de l’investissement marocain en Afrique. Le roi du Maroc se déplace personnellement régulièrement à la tête de délégations d’hommes d’affaires pour faire du lobbying et grignoter ainsi des parts de marché dans les pays africains.
A ce sujet, Elalamy a révélé que «50 visites ont été effectuées par le roi Mohammed VI dans plus de 30 pays africains et plus de 1.000 accords ont été signés depuis l’année 2000».
Les entreprises marocaines sont présentes, principalement, dans les secteurs des télécoms, des banques et du bâtiment et travaux publics (BTP).
A titre indicatif, les banques marocaines sont opérationnelles dans 30 pays africains. Viennent en seconde position d’autres secteurs comme l’engrais, l’agro-alimentaire et l’industrie pharmaceutique.
…une logistique
Au plan logistique, le Maroc compte 23 ambassades en Afrique contre une dizaine pour la Tunisie et 34 représentations diplomatiques africaines au Maroc.
Pour sa part, la compagnie aérienne marocaine, Royal Air Maroc (RAM), a fait de l’Afrique une priorité pour son expansion. Ainsi, entre 2004 et 2017, le nombre de ses dessertes au niveau du continent est passé de 7 à 33. Aujourd’hui la RAM couvre tous les pays de l’Afrique de l’ouest, mais aussi ceux de l’Afrique du Nord, de l’Afrique centrale et de l’Afrique de l’Est (Kenya).
A tire d’exemple, sur certains axes comme Casablanca–Dakar, on compte 3 vols quotidiens.
Quant à nous, si nous avons tenu à parler exhaustivement de l’aventure marocaine en Afrique, c’est tout juste pour rappeler aux Tunisiens le potentiel du continent africain en tant que débouché pour nos produits et nos services.
En conséquence, nous ne pouvons pas nous interdire de s’interroger sur l’incompétence de la diplomatie économique de la Tunisie et sur son incapacité à disposer d’une stratégie cohérente pour la conquête du marché africain.
Jusqu’ici, structures d’appui, patronat et gouvernement manœuvrent en rangs dispersés et n’ont aucun plan cohérent pour explorer et conquérir ce juteux marché africain.
A bon entendeur.