Jamais à court de manœuvres, le président de la République, Béji Caïd Essebsi, s’apprêterait à en mener une nouvelle sur un terrain hautement miné et qui ressemble de plus en plus à un véritable champ de ruines : Nidaa Tounes.
En effet, d’après le site web «Attounisiyoun» -qui en rapporte les propos tenus au journaliste Mondher Boudhiafi-, le chef de l’Etat s’apprêterait à lancer une «initiative nationale» afin d’essayer de réconcilier et de recoller les morceaux épars du parti présidentiel. C’est-à-dire à essayer de faire renaître de ses cendres la formation qu’il a grandement contribué à tuer. Ce qui le place en quelque sorte dans la posture du pompier pyromane.
BCE peut-il réussir dans ce qui apparaît à bien des égards comme une mission impossible ? En fait, ce ne serait ni impossible ni facile.
Les difficultés à affronter sont au nombre de deux. La première tient aux différents partis et factions nés de Nidaa Tounes et à leurs chefs qui pourraient ne pas répondre positivement à l’initiative présidentielle.
Certes, tous savent pertinemment qu’aucun d’entre eux ne pourra avoir à lui seul le poids –politique et, surtout, électoral- qui fut celui de Nidaa Tounes en 2014. Et qu’en conséquence, ils ont tous intérêt –et le pays avec eux- à surmonter leurs divisions pour espérer pouvoir sauver les meubles aux prochaines élections. Car, en toute logique, même recomposé, Nidaa Tounes ne semble pas avoir la moindre chance de rééditer son exploit d’il y a quatre ans.
La seconde difficulté est imputable à BCE lui-même. En effet, de soutenir son fils contre tous, le père a fini par faire le vide autour de lui. Même les plus fidèles parmi ses soutiens –comme Mme Salma Elloumi, l’ancienne directrice du cabinet présidentiel- n’ont eu d’autre choix que de lui tourner le dos. Accepteront-ils aujourd’hui de revenir dans son sillage ? S’il reste une possibilité, sa concrétisation dépendra d’abord des intentions du président de la République. C’est-à-dire du but de sa manœuvre annoncée.
Veut-il battre le rappel de ses soutiens perdus en vue de préparer sa candidature à un deuxième mandat ? Alors qu’elle paraissait improbable il y a encore quelques semaines, une nouvelle candidature du «Vieux» ne relève peut-être plus aujourd’hui du domaine de l’impossible.
D’abord, parce qu’il n’a jusqu’ici démontré aucune volonté de faire prévaloir les intérêts de son parti sur les siens et ceux de sa famille.
Ensuite, car un élément nouveau survenu récemment incite à se demander –pour le moins- si BCE n’a pas déjà pris sa décision de se représenter dans l’espoir de décrocher un deuxième mandat. Cet élément n’est autre que la visite annoncée de l’Emir du Koweït.
L’étrangeté de cet élément vient de son probable timing en plein processus électoral (lire notre article). L’hôte koweïtien aurait-il l’intention de faire à cette occasion une annonce –sonnante et trébuchante- telle qu’elle profiterait –ou, du moins, pourrait-il l’espérer- à son ami de quarante ans, le président Béji Caïd Essebsi, s’il venait à décider de tenter de garder le fauteuil présidentiel pour encore cinq ans ? Outre qu’une telle ingérence serait malvenue, il n’est pas sûr qu’elle produise l’effet escompté, tellement le chef de l’Etat sortant a perdu de son crédit au cours des quatre dernières années ?
Mais s’il s’avère que le président œuvre pour que le Koweït aide la Tunisie à surmonter, un tant soit peu, ses difficultés financières et économiques actuelles, et qu’il fait cela en guise de cadeau d’adieu, alors il retrouverait une grande partie de sa grandeur perdue.
Moncef Mahroug