Zélateur de Ben Ali mais politiquement inactif, avant le 14 janvier 2011, Nabil Karoui a commencé, après la chute de l’ancien président ; il s’y est investi à fond, à l’image de tant d’autres.
D’abord, en coulisse, puis progressivement en première ligne. Au point –en se disant pourquoi pas moi- de rêver aujourd’hui calife à la place du calife. Et dans la foulée, le fondateur et patron de Nessma TV s’est lancé dans la concrétisation de son rêve.
La mayonnaise serait-elle en train de prendre ? Depuis quelques semaines, et plus précisément depuis le clash de la chaîne de télévision avec la HAICA (Haute autorité indépendante de la communication et de l’audiovisuel) et le gouvernement, certains sondages le donnent à penser : Nabil Karoui serait, d’après eux, le favori de la prochaine élection présidentielle. Mais l’est-il réellement ? N’assiste-t-on pas à un phénomène fabriqué de toutes pièces ?
La question mérite d’être posée sur fond de polémique et de suspicion quant à la véracité et à la crédibilité des sondages –en particulier ceux de Sigma Conseil- et encore plus depuis que Visactu, une agence spécialisée dans l’infographie de presse, a révélé qu’un sondage dont la paternité lui avait été attribuée était un faux. Et le fait que le «crime» lui profite –Nabil Karoui est donné en pool position à la présidentielle, avec 19,4% des voix, et son parti, pas encore créé, à la troisième place, avec 9,4% des voix- a incité certains à le désigner comme l’auteur du forfait. C’est ce qu’a fait notre confrère Kapitalis, mais sans nommer le patron de Nessma TV.
Mais indépendamment de cela, c’est un fait indéniable que la soudaine irruption de Nabil Karoui dans la course électorale dérange énormément. Notamment en raison de la manière dont ce dernier s’y est pris pour se faire une place sur la scène politique.
En effet, s’il n’est pas le seul à avoir instrumentalisé l’action associative à des fins politiques, il est sans nul doute celui qui a le plus usé et abusé de cette corde-là. D’abord, en instrumentalisant la mémoire de son défunt fils, Khalil, au profit de son projet. Ensuite, en exploitant de manière éhontée la misère de la frange la plus marginalisée de la population, à travers la médiatisation de ses «virées» de «bienfaisance» tout à fait intéressée.
Enfin, last but not least, et circonstance aggravante, l’accompagnement médiatique de la candidature à la candidature de Nabil Karoui est pris en charge principalement par sa propre chaîne de télévision en flagrante violation de l’éthique qui commande de ne pas utiliser cet outil à des fins personnelles. Mais visiblement, éthique et morale n’étouffent pas le patron de Nessma TV.
Moncef Mahroug