Le programme de compétitivité du secteur textile est entré en phase de réalisation. Il reçoit, en renfort, un partenariat d’appoint de la part de l’USAID via son programme Tunisia Jobs.
Dernièrement, Hosni Boufaden, président de la FTTH (Fédération tunisienne du textile/habillement), et Danilo Cruz de Paula, chef du programme Tunisia Jobs (Jobs, Opportunities and Business Success), ont signé une convention de partenariat.
La cérémonie s’est déroulée en présence de Slim Feriani, ministre de l’Industrie et des PME, ainsi que Samir Majoul, président de l’UTICA.
Cette convention apportera un concours précieux à la FTTH qui entame la réalisation de son programme de compétitivité signé avec le gouvernement en février 2019.
En effet, Tunisia Jobs soutiendra, à l’aide de mécanismes d’intervention déjà mis en place, les composantes principales du plan de compétitivité du textile tunisien.
Le Plan Textile 2019 – 2023
Pendant quelques années, le secteur était sinistré ayant beaucoup souffert de l’immobilisme économique du pays. Sous l’impulsion de la FTTH et avec la détermination du Conseil d’analyses économiques, le secteur a été déclaré de priorité nationale. Il siège désormais dans le Conseil national stratégique et, pour couronner le tout, un plan de redressement du secteur a été finalisé.
Ce plan quinquennal, de 2019 à 2023, s’articule autour d’un concept industriel crucial, celui de l’intégration verticale de la filière partant de la filature à la confection, en passant par le tissage.
Cependant, le plan prévoit aussi une composante sociale, et le secteur s’engage à recruter 10.000 travailleurs par an. Mais également une composante environnementale dont les composantes ont été adoptées par le secteur. Et financière. En effet, un Fonds d’investissement doté d’un capital de 100 millions de dinars tunisiens va être mis sur pied.
Le secteur a besoin d’investissements structurants pour les grandes entreprises. Et les PME du secteur, souvent sous-capitalisées, ont besoin, également, d’apports en fonds propres afin d’améliorer leur accès au crédit bancaire lesquels sont assortis d’une exigence de renforcement des fonds propres.
Mais la composante la plus ardue d’entre toutes et celle pour laquelle le secteur retrouve de l’allant et du mordant, c’est l’export. Cela semblait être le moteur du textile tunisien, et, rappelons-nous, de la percée du textile/habillement et notamment pour le Jeans.
Cette épopée doit retrouver du punch et le secteur est appelé à doubler ses exportations en passant de 2,4 milliards d’euros en 2018 à 4 milliards en 2023.
Les premières prémices commencent à apparaître, et le TH tunisien a grappillé quelques parts de marché sur un marché européen pourtant en baisse. C’est réconfortant, mais la profession regarde également en direction de l’Amérique où elle est freinée par les règles d’origine et des tarifs douaniers encore dissuasifs.
Pour rentrer en franchise sur le marché américain, le secteur doit réaliser 40% de sa valeur ajoutée sur le site national, ce qui est difficilement envisageable sans sourcing local important. Et de là, on comprend l’appel de Hosni Boufaden à renforcer l’intégration locale, notamment pour le Denim, composante essentielle pour la confection du Jeans.
Les apports de Tunisia Jobs
Dans cette effervescence ambiante du secteur, la convention de l’USAID arrive à point nommé. Tunisia Jobs interviendra au plan social, sociétal et financier. Le programme viendra aux entreprises les moins nanties en les aidant à s’aligner sur les critères de performance.
Il faut bien comprendre que le secteur s’est mis dans une perspective d’industrie 4.0 sous la pression de la concurrence internationale. Et en la matière, Tunisia Jobs possède des solutions toutes faites.
Pareil pour la dynamique d’inclusion sociale, Tunisia Jobs assistera, sur tous les volets de la gestion, les entreprises désireuses de s’implanter dans les régions de l’intérieur du pays, de même qu’elle renforcera celles qui y sont déjà implantées et qui ont besoin d’un effort de mise à niveau.
La composante financière ne sera pas en reste. Un plan en joint-venture avec la Caisse des dépôts et consignation (CDC) est en préparation.
Rappelons que Tunisia Jobs est doté d’une enveloppe d’investissement de 60 millions de dollars US et cela représente un pactole, fort prometteur.
A ces conditions, l’apport de Tunisia Jobs aiderait le secteur à retrouver ses repères de performance et de compétitivité. Il est ainsi appelé à se refaire une santé et à basculer dans l’ère technologique 4.0 et de partir à la conquête de nouveaux marchés dont le Nouveau monde, et Hosni Boufaden nourrit de grands espoirs sur ce partenariat pour la conquête de l’Amérique, cet eldorado qui nous tourne le dos, à l’heure actuelle.
Un défi marketing
Hosni Boufaden se réjouit de motiver les professionnels du secteur pour cet appel du large. Il a doublé les opérateurs présents à première vision, le Salon parisien, l’un des plus importants d’Europe. Et cet appel du large va se poursuivre.
Nous considérons pour notre part que le secteur pourrait trouver des solutions plus incisives. Avec son fonds d’investissement, il peut envisager d’entrer dans le capital des sociétés de distribution. Un pays de la région a acheté un siège d’administrateur dans le tour de table d’une société de grande distribution ouvrant un boulevard à ses produits.
Par ailleurs, ce même fonds pourrait aider à l’implantation industrielle d’opérateurs tunisiens sur les marchés ciblés constituant des têtes de pont via lesquels on peut envisager des flux de sous-traitante. Cela peut bien se faire aux Etats-Unis, territoire ouvert aux IDE. C’est de notre point de vue un stratagème efficace pour contourner la règle d’origine.
Toutefois, nous sommes sceptiques sur les perspectives d’intégration de la filière. Hosni Boufaden et Hédi Djilani avant lui citent le cas de la Turquie qui a lancé des broches par millions pour se doter d’une industrie de filature et de tissage.
Ceci étant, nous croyons que la Tunisie pourrait manquer de masse critique en la matière. Nous évoquerons toutes ces questions lors d’un entretien avec Hosni Boufaden dans un entretien futur.
Ali Abdessalam