Un constat : nos gouvernants prouvent, chaque jour, qu’à défaut de stratégies prévisionnelles claires, ils ne savent gérer ni les pénuries ni les excès de production. Deux exemples d’événements agricoles qui ont eu lieu, l’espace de douze mois (septembre 2018-mai 2019), méritent qu’on s’y attarde.
Le premier a trait aux précipitations (bénéfiques) qui se sont abattues cette année sur le pays. Pour en saisir l’ampleur, elles ont permis de remplir les 37 barrages opérationnels que compte le pays et de collecter 1,686 milliard de mètres cubes d’eau sur un total mobilisable de 2,2 milliards de m3.
Le plus grand barrage du pays, en l’occurrence Sidi Salem (gouvernorat de Béja), a été rempli au taux de 95% contre 7% seulement pour le barrage d’Houareb (centre de Tunisie).
Pleins ou vides, nos barrages posent problème
Malheureusement, à défaut d’une préparation et d’une bonne analyse des prévisions météorologiques, cette manne du ciel, au lieu d’être stockée dans des barrages de rétention, d’ouvrages hydrauliques qu’on aurait pu édifier en peu de temps aux alentours des villes, n’a pas toujours été bénéfique.
A Nabeul, par exemple, le trop plein de ces barrages et les lâchers d’eau qu’il a généré a provoqué les inondations catastrophiques qui ont affecté, en septembre 2018, toute cette région.
Les Tunisiens s’en rappellent tandis que les Nabeuliens en sont traumatisés jusqu’à ce jour.
Dans d’autres régions, comme celle de Jendouba réputée pour être le château d’eau de la Tunisie en raison des nombreux barrages qu’elle abrite, les agriculteurs de légumineuses ont souffert, en ce mois de juillet 2019, de coupures d’eau d’irrigation en raison des quotas imposés par le ministère de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques.
Conséquence : leur récolte est compromise au regard des dégâts, selon des médias, et les prix des légumineuses sont en train de connaître une flambée à cause justement de ces coupures d’eau.
Les autorités agricoles ont agi comme si le pays avait connu une extrême sécheresse alors que c’est le contraire qui s’est produit cette année.
La seule victime dans cette affaire n’est autre que le consommateur.
Collecte des céréales se heurte au problème de la logistique
Le second événement agricole consiste en la récolte céréalière de cette année. Elle est estimée à 2,4 millions de tonnes contre des besoins annuels de 2,8 millions de tonnes y compris ceux dédiés à l’alimentation animale.
A la faveur de cette récolte record, le gouvernement devrait faire, en 2020, des économies d’environ 70 millions de dinars en devises destinés auparavant à l’importation.
Cela ne doit pas nous empêcher de signaler qu’à défaut également de préparation et de prévision logistique, les céréaliers ont eu d’énormes difficultés pour acheminer leur production vers les centres de collecte. Il a fallu recourir aux camions de l’armée pour résoudre une partie du problème.
Des stratégies doivent être arrêtées, à l’avance, pour gérer au mieux les récoltes céréalières et empêcher les incendies.
La solution résiderait dans la restauration du ferroviaire pour le transport des céréales, la construction de nouveaux silos et l’institution d’avantages à cette fin.
Pour éviter ces dysfonctionnements liés au transport, il s’agit également de mettre au point une vision claire des grandes cultures et de leur industrialisation sur les lieux de production. Il y va de notre sécurité alimentaire.