L’Association Mohamed Ali de la culture ouvrière (Acmaco) a organisé, du 26 au 28 juillet, à Hammamet, sa 26ème université d’été sur le thème : «Acteurs et outils de la consolidation de la jeune démocratie tunisienne».
Cette rencontre à laquelle ont pris part des chercheurs, universitaires et penseurs tunisiens, belges, français et espagnols, s’est proposée de baliser les contours d’une alternative à la situation politique, et socioéconomique délétère dans laquelle se débat le pays.
L’enjeu est, selon les organisateurs de cette rencontre, de consacrer le changement du paradigme, voire de la migration de l’héritage makhzénien national autoritaire à la citoyenneté à l’ère de la transition démocratique.
Durant trois jours, le débat a été engagé à partir de l’observation du contexte actuel marqué par une situation économique et sociale des plus difficiles, avec un taux de chômage élevé et l’érosion du pouvoir d’achat des Tunisiens.
L’objectif d’un développement économique égalitaire est raté. La discrimination positive dont on a beaucoup parlé au début du soulèvement du 14 janvier 2011 est resté un vœu pieux. La corruption s’est maintenue à des niveaux très élevés voire inquiétants. Le système est grippé, a-t-on martelé au cours de cette université d’été.
Selon le philosophe et homme politique Mohamed Ali Halouani, «nous vivons une sorte de totalitarisme soft (…) car le pluralisme est de façade et notre démocratie de pacotille. Le Parlement est une chambre d’enregistrement de choix politiques servant les intérêts d’une économie mafieuse, des lobbies de potentats de l’économie et de la politique ainsi que le népotisme d’un système corruptif généralisé aussi bien dans la sphère publique que privée».
Pour une émergence de nouveaux acteurs
Sur la base de ce diagnostic accablant, les participants ont discuté des nouvelles formes de mobilisation et d’organisation de l’action à caractère politique. Il s’agit de ne pas abandonner la politique aux acteurs politiques qui s’en emparent pour la confisquer. L’action politique est l’affaire de tous, elle doit nécessairement avoir un caractère citoyen.
Dans cette perspective, nombreux intervenants ont estimé qu’«il serait vain de croire que la démocratie puisse se limiter à l’organisation d’élections libres et transparentes. L’instauration de la démocratie se fait par un jeu de pouvoir et de contre-pouvoir auquel participent tous les citoyens».
Point d’orgue des propositions faites pour dissuader le retour de l’autoritarisme et la confiscation du pouvoir par des mafias politico-financières, la constitution de ce qu’on a appelé au cours de cette université d’un «Mouvement Social Citoyen (MOSC)», qui regrouperait organisations de la société civile et individus qui restent mobilisés et gardent espoir dans les transformations démocratiques à venir.
C’est un mouvement qui vise à agréger, autour de propositions ouvertes, les forces sociales de la société civile qui ont porté les ambitions du soulèvement de 2011 sur une base citoyenne, a-t-on fait remarquer.
Concrètement, il s’agit d’un outil de regroupement, d’information des acteurs de la société civile, un outil de mobilisation, un outil de démocratie participative, en complément à la démocratie représentative prise en charge par les partis politiques.
Se démarquer des partis politiques
Traitant d’éventuelles relations du MOSC avec les forces politiques, les participants ont tenu à préciser que «ce mouvement n’intervient pas sur le plan électoral, mais vise à constituer la force citoyenne de la société civile, en exerçant une pression permanente en un dialogue exigeant avec les partis politiques qui eux, manquent d’ancrage dans la société».
En somme, le MOSC serait un outil permanent de solidarité et de vigilance démocratique pour préserver l’Etat de droit et les acquis des citoyens.
Pour l’ancrer dans la tradition, le MOSC, pour peu qu’il soit concrétisé et voie le jour, sera adossé à une manifestation mobilisatrice et festive dénommée «festival solidaire» ou «festival de solidarité».
Au cours de ce festival, la solidarité de nouveaux acteurs regroupés au sein du MOSC devrait être déclinée sous toutes ses formes pour toutes les couches de la population et toutes les expressions culturelles. Joli programme pour égayer la société civile.