Dans le cadre de la couverture de la campagne électorale, webmanagercenter.com a posé des questions aux 26 candidats en lice pour la présidentielle anticipée du 15 septembre 2019, questions ayant trait aux prérogatives du président de la République telles que définies par la Constitution tunisienne de 2014.
44 soutenant la candidature Chahed au Majliss Choura contre 45 soutenant celle de Abdelfattah Mourou un des fondateurs du mouvement des frères musulmans en Tunisie et de ses plus fervents défenseurs malgré ses positions mitigées tout au long des années d’exil de nombre de leaders de la Nahdha.
Bruits de couloir ou information réelle, toujours est-il que c’est un candidat islamiste que les islamistes ont choisi même sans grande majorité !
Aujourd’hui, il y en a qui reconnaissent que malgré son soutien apparent à Mourou, ce dernier n’est pas le favori ou l’oiseau rare de Ghannouchi président emblématique du mouvement islamiste.
Eloquent, capable de changer de posture aussi rapidement que l’on change de chaussettes, Mourou a troqué sa Jebba tunisoise en soie contre le costume d’usage seyant à un Président d’un État républicain.
Mais est-ce que l’habit peut faire le moine ? Réponses dans l’entretien ci-après.
WMC: Quelle approche avez-vous de la défense et de la sécurité nationale?
Abdelfattah Mourou : L’une des premières actions à entreprendre est de mettre en place une 4ème armée : l’armée cybernétique pour défendre l’infrastructure numérique et les données privées et publiques des citoyens et des institutions, de telle sorte que notre démocratie et nos capacités de lutte contre le terrorisme soient renforcées.
Nous nous attellerons aussi à améliorer les conditions de travail et de vie dans les casernes et sur le terrain, et à favoriser l’encadrement social des militaires et des sécuritaires.
Nous encouragerons le lancement d’une industrie militaire nationale ainsi que la coopération avec les structures de recherche nationales. Nous améliorerons les capacités techniques, logistiques et technologiques de nos forces ainsi que nos capacités de télédétection en utilisant les technologies avancées en la matière (satellites, drones, etc.).
Nous encouragerons la coopération entre nos forces militaires et sécuritaires et l’université et les centres de recherche notamment pour ce qui est des priorités nationales en matière de sécurité.
Par ailleurs nous donnons à la sécurité nationale une envergure plus étendue que la défense de nos frontières : nous pensons que cette sécurité s’étend à la sécurité alimentaire, la sécurité hydrique et la sécurité énergétique.
A cet effet, nous mettrons en place, en collaboration avec le gouvernement une stratégie nationale pour assurer le renforcement de ces aspects importants de notre sécurité.
Que feriez-vous sur la question libyenne ?
L’intégrité territoriale libyenne et la stabilité de la Libye sont des constantes de notre vision. Nous jouerons un rôle important de médiation pour rapprocher les points de vue et trouver une issue politique au conflit libyen.
Quel rôle comptez-vous jouer pour renforcer la diplomatie tunisienne?
Nous consacrerons le principe de l’équilibre et de l’impartialité de notre politique étrangère. Nous respecterons le principe de base de notre politique étrangère d’éviter l’alignement à un axe quelconque.
La construction de l’édifice maghrébin est une priorité absolue de notre politique étrangère, et ce en vue de renforcer la coopération économique et faciliter le déplacement des ressortissants maghrébins.
L’Union européenne constitue un allié stratégique pour notre pays. Pour cette raison, nous consacrerons les efforts nécessaires pour renforcer ces relations et les étendre aux autres pays de l’Union et au-delà des pays voisins.
L’Amérique et les pays émergents (Russie, Chine, Brésil, etc.) nécessiteront de notre part une attention particulière pour développer et consolider nos relations diplomatiques et économiques.
Et pour ce qui est du développement d’une diplomatie économique?
Nous jouerons un rôle fondamental dans le développement de la diplomatie économique par les visites d’Etat que nous effectuerons et ce pour faire affirmer l’expérience démocratique tunisienne et faire connaître ses besoins pour assurer le financement adéquat d’une transition économique compatible avec sa transition démocratique.
La mobilisation de capitaux pour des investissements en Tunisie sera une priorité de notre diplomatie économique. Le développement de cette diplomatie nécessitera la mise en place d’une stratégie pour regrouper et encadrer toutes les institutions nationales en relation avec la diplomatie économique en vue de favoriser une synergie optimale entre ces institutions.
Quelle place occupera l’Afrique dans la politique étrangère de notre pays?
L’une de nos priorités sera d’engager des actions pour développer nos relations avec les pays africains par la démultiplication de nos représentations diplomatiques dans ces pays pour développer des relations économiques solides. La Tunisie pourrait devenir « l’université et l’hôpital » de l’Afrique ainsi que son aéroport. La Tunisie pourrait également devenir un fournisseur de choix pour toutes les activités à forte valeur ajoutée pour l’Afrique.
Comment comptez-vous intégrer les TRE dans la dynamique socio-économique nationale ?
Je compte renforcer les liens avec les Tunisiens à l’étranger et surtout les compétences et les nouvelles générations. Je compte lancer un programme pour encourager les compétences à rentrer en Tunisie et pour participer à la transformation de nos institutions et de notre économie.
Comment pensez-vous pouvoir agir sur les politiques du gouvernement et quelles causes prioritaires défendre ?
Nous établirons dès notre investiture une coordination positive et continue avec le gouvernement pour examiner toutes les questions qui favorisent la stabilité politique, économique et sociale du pays. Nous assurerons à cet effet la stabilité, la bonne marche et la synergie entre les institutions de l’Etat pour favoriser un climat favorable au développement économique et social.
Les questions de développement et d’intégration économique et sociale des régions défavorisées, la santé, l’éducation, la sécurité et la cherté de la vie seront des priorités à défendre.
Pour quelles causes userez-vous de l’outil du référendum ?
Dans le cadre de la légalité et en conformité avec la Constitution, nous utiliserons le référendum pour trancher les questions fondamentales qui représentent un changement de cap politique important à l’instar d’un amendement constitutionnel qui modifie le régime politique du pays.
Vous dissoudrez l’ARP si nécessaire ?
Le président de la République dispose de prérogatives pour dissoudre l’ARP. Ces prérogatives sont énoncées par la Constitution. Il n’y aura aucune dérive par rapport aux règles constitutionnelles.
Vous démissionnerez si vos engagements ne sont pas tenus ?
La démission d’un président de la République élu démocratiquement est un événement politique majeur dans un pays. Nous pensons que la démission peut être envisagée en cas de manquement grave à l’accomplissement de la fonction de président ou en cas d’entrave constitutionnelle caractérisée.
La présidence de la République est aussi une institution nationale qui est influencée par l’environnement politique, économique et social sur lequel il n’a pas, dans certains cas, de maîtrise.
La non tenue de promesses électorales devrait être relativisée et analysée pour déceler la responsabilité intrinsèque du président et jugée si sa démission est salutaire ou non pour le pays.
NB: Nous avons adressé ces questions aux 26 candidats en lice pour cette présidentielle anticipée du 15 septembre 2019. Les réponses seront publiées en fonction de leur réception par notre rédaction.