Les questions relatives aux libertés individuelles et à l’égalité ont été reléguées au second plan dans les programmes des partis politiques lors des élections législative et présidentielle de 2019, en faveur des questions socio-économiques. C’est ce que relève le rapport du Collectif civil pour les libertés individuelles sur les libertés individuelles et l’égalité dans les programmes politiques des deux scrutins de 2019.
Lors d’un point de presse tenu vendredi 1er novembre au siège du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) consacré à la présentation du bilan du rapport en question, Wahid Ferchichi, membre du Collectif, a déclaré que “la relégation des questions des libertés individuelles au second plan pendant les élections à la faveur des questions socio-économiques constitue un revers déplorable”.
Il a souligné que “le discours ainsi que les programmes électoraux qui ont prévalu dans un contexte de crise économique étouffante, a produit une majorité qui ne donne pas la priorité aux questions liées aux libertés individuelles et à l’égalité”.
Une situation qui avait plutôt “généré des forces politiques affichant leur opposition à ces questions et qui adoptent, de concert, une vision sociétale fondée sur l’absence de tout intérêt à activer les dispositions de la Constitution relatives aux libertés individuelles et à l’égalité”, a-t-il souligné.
Il a expliqué que l’objectif de ce rapport est de relever les positions des candidats, des partis politiques et des coalitions les plus en vue, quant à la question des libertés individuelles, dont la peine de mort, la criminalisation de l’homosexualité, l’atteinte à la pudeur, l’égalité successorale, la criminalisation de la consommation du cannabis, la consolidation de la liberté de conscience, outre leurs positions affichées par rapport au projet du code des droits et des libertés individuelles”, a-t-il poursuivi.
Kaïs Saïed opposé à l’égalité dans l’héritage
A la question posée lors du point de presse concernant la position du président de la République, Kaïs Saïed, par rapport aux libertés individuelles et à l’égalité, Ferchichi a rappelé que les déclarations du nouveau président témoignent de “son opposition farouche aux libertés individuelles et à l’égalité dans l’héritage, sa position favorable à la criminalisation de la consommation du cannabis et de sa ferme opposition à l’abrogation de la criminalisation de l’homosexualité”.
426 violations relevées
De son côté, la directrice exécutive de l’Association tunisienne pour la promotion du droit à la différence, et membre du Collectif, Salwa Grissa, a fait savoir que le nombre de violations relevées par l’Observatoire de défense du droit à la différence, au cours de la période allant du 1er avril au 31 octobre 2019, s’élève à 426 violations.
Selon Grissa, il y aurait eu 230 violations relatives à l’orientation sexuelle, 72 violations des libertés fondamentales, 53 violations en lien avec la traite des êtres humains, 31 cas de discrimination raciale, 12 cas de violations à caractère régional ou linguistique, 12 cas d’outrage aux religions, 6 déclarations antisémites, 5 cas de violation des droits des personnes à besoins spécifiques et 5 cas de maltraitance.
Elle a ajouté que, dans un souci de défense des libertés individuelles et de l’égalité, l’Observatoire a élaboré un document intitulé “Les droits et libertés individuels que nous voulons: Pas de République sans libertés individuelles” sur la base d’un projet de loi organique relative au code des droits et libertés individuelles, conçu par 14 députés en octobre 2018.
Quid de la la nomination des membres de la Cours constitutionnelle
Les rédacteurs du rapport du Collectif se sont également interrogés sur le sort des projets de loi finis, en relation avec la consolidation des dispositions de la Constitution traitant des droits et libertés individuelles et de l’égalité, et qui demeurent dans l’attente d’approbation parlementaire, notamment ceux en lien avec la nomination des membres de la Cours constitutionnelle et des autres instances constitutionnelles destinées à faire avancer la Tunisie sur la voie de la consécration des droits et des institutions.