Point d’orgue de la nouvelle législature, l’ascension à la présidence du Parlement de Rached Khériji Ghannouchi, président du parti Ennahdha.
C’est un moment triste pour certains Tunisiens dans la mesure où, pour des raisons strictement historiques et objectives, cette nouvelle législature n’apportera au pays que crises, blocages multiformes et immobilismes. Le parti Ennahdha s’étant forgé la réputation d’être un mouvement politique incompétent et apatride au service de mouvances étrangères. Les Tunisiens l’on essayé avec la Troïka (2011-2013). C’était simplement catastrophique.
Empressons-nous de signaler que Ghannouchi dont le parti islamiste est à l’origine de beaucoup de malheurs qu’a connus le pays, depuis le soulèvement du 14 janvier 2011, n’aurait pas pu réussir un tel exploit sans la trahison du parti Qalb Tounès.
Le deuxième coup de pouce de Nabil Karoui
Qalb Tounes, parti populiste surnommé par les Tunisiens “makarona“ (pâte en français), a instrumentalisé la misère des gens pour arriver et pour lequel des dizaines de milliers de Tunisiens modernistes ont voté “utile“, dans l’espoir de contenir un tant soit peu les nuisances attendues de l’hydre nahdhaoui.
Nabil Karoui qui, en 2011, avait contribué de matière significative à l’ascension d’Ennahdha, en diffusant, particulièrement à dix jours du scrutin le film «Persepolis» -un film d’animation polémique certes mais dopant pour les électeurs islamistes-, récidive une décennie après, en donnant l’ordre à ses députés-moutons de voter pour Rached Ghannouchi et de le sortir d’une très mauvaise situation.
Car personne ne croyait qu’il puisse accéder, un jour, aussi facilement à la présidence du Parlement. Structurellement parlant, les nahdhaouis ne représentent que 20 à 24% de la population.
Toujours poursuivi en justice avec son frère pour présomption de blanchiment d’argent et de fraude fiscale, Nabil Karoui entend, semble-t-il, à travers cette alliance contre-nature protéger ses arrières dans la perspective de sauver sa peau et celle de son frère.
L’histoire est un éternel recommencement
Par ailleurs, le président du parti Qalb Tounès relaye ainsi le défunt président Béji Caïd Essebsi. Bajbouj, qui a été élu dans un premier temps à la faveur d’un vote utile dont 1,2 million de femmes appelées à l’époque “les bajboujettes“, avait trahi son électorat en “copartageant“ le pouvoir avec les islamistes, mais aussi en œuvrant en même temps, avec la complicité de sa progéniture Hafedh Caïd Essebsi, à déstructurer son propre parti, Nidaa Tounès, le seul parti à avoir vaincu les islamistes par les urnes.
L’histoire est, certes, un éternel recommencement, comme dit l’adage, mais la tendance à trahir l’électorat semble devenir, depuis dix ans de transition politique, le sport favori de certains Tunisiens.
Car il n’y a pas que les partis Nidaa Tounès, BCE et Qalb Tounès, Nabil Karoui qui ont trahi leur électorat, même Ennahdha a trahi ses troupes. La preuve ? A quelques heures de l’ouverture de la nouvelle législature, ses dirigeants, dont le gourou Ghannouchi, multipliaient les déclarations pour rejeter toute alliance possible avec Qalb Tounès. Et pourtant, c’est tout à fait le contraire qui s’est produit.
Pis, pour gagner la sympathie de ses fans, Rached Ghannouchi est allé jusqu’à mentir de manière abjecte en révélant qu’Ennahdha n’a jamais gouverné depuis 2014 alors qu’elle était au pouvoir avec dix membres du gouvernement, du moins avec le gouvernement Youssef Chahed.
L’enseignement à tirer de ses volte-face de dernière minute des partis serait de bannir, une fois pour toutes, le “vote utile“. Au regard de ses résultats négatifs sur le pays, ce type de vote s’est avéré préjudiciable à la jeune démocratie tunisienne.
Mais comment le faire ? Voilà une vraie question.