Quand celui qui a été décrit comme “dictateur“ en Tunisie par les apprentis démocrates ignares est reçu en grandes pompes par les plus grands démocrates du monde (sic), ceux qui ont applaudi au triste printemps arabe, la question que nous devons nous poser est pourquoi ces pays sont si avenants avec ce monsieur qui ne répond pas spécialement aux principes et aux valeurs qu’ils ont toujours prônés ?
La réponse est simple : les intérêts économiques et les enjeux géopolitiques ! On ne donne rien sans rien et lorsque les enjeux économiques sont importants, droits de l’Homme et valeurs démocratiques deviennent très secondaires aux yeux de ceux qui en ont fait des armes pour se débarrasser de tous ceux qui leur résistent !
Michel Sapin, ancien ministre français de l’Economie, n’avait-il pas déclaré : «Ne touchez surtout pas au franc CFA sinon vous serez frappés par le terrorisme!»
Sans commentaires !
Quant à l’Allemagne, elle est plus présente que jamais sur le sol tunisien, et l’on se demande si, à terme, l’objectif des Allemands n’est pas de dégommer la France de l’Afrique du Nord pour la remplacer avec l’aide de ses alliés ou ses «complices» turcs.
Les Turcs qui font tout pour occuper tout le terrain économique tunisien, soutenus qu’ils sont par leurs amis sur place et même par le fils gâté de BCE quand il avait son mot à dire dans le choix de nos partenaires économiques! Rappelons pour ceux qui l’ignorent que 4 accords ont été signés entre notre défunt président et Erdogan dont un de coopération et de formation militaire.
Au Maroc, pays souverain, les accords de libre-échange “qui nuisent à nos intérêts» seront suspendus, a affirmé le ministre de l’Industrie et du Commerce. Le premier pays visé serait la Turquie. La raison en est le déficit commercial du royaume chérifien dans ses échanges avec son partenaire turc. Moulay Hafid Elalamy a assuré que le gouvernement était «prêt à mettre fin à certains accords» de libre-échange pour lesquels le royaume chérifien n’avait rien à y gagner.
Dans notre pays, par contre, toutes les portes sont ouvertes aux Turcs qui sont partout. Certaines sources bien informée affirment qu’ils passent, des fois, par sociétés implantées en Europe pour “arracher” des marchés écartant nos opérateurs et s’imposant comme interlocuteurs incontournables dans nombre de nos ministères économiques.
Et l’UTICA dans tout cela?
Les Allemands qui font la loi !
Les Allemands trouvent, pour leur part, le moyen d’imposer leur diktat à travers des clauses écartant intelligemment nos opérateurs en les remplaçant par les leurs et leurs partenaires. En Tunisie, l’administration souffrant d’un déficit de compétences et de hauts cadres expérimentés, subit !
Aux dernières nouvelles, lu sur M.C, des spécialistes du traitement Abionik et Umwelt – technik ont fait partie d’une délégation d’affaires qui a participé à une rencontre organisée à Tunis sur le thème de la gestion des eaux usées. Le cabinet d’ingénierie Dorsch International Consultants et plusieurs fabricants de matériel spécialisé (VAG, Kaeser Kompressoren, Nivus, SebaKMT).
Les opérateurs allemands ont eu des rencontres avec l’Office national de l’assainissement (ONAS) et la SONEDE (Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux). Lorsque l’on sait que l’un des bailleurs de fonds de ces entreprises publiques est la KFw allemande, on ne s’étonne plus de la présence germanique intempestive dans notre pays.
En sommes, l’Allemagne alloue des fonds à la Tunisie qui profitent in fine à ses propres opérateurs. «Mains qui donnent, mains qui dirigent», un dicton qui est plus que jamais valable dans un pays qui perd sa souveraineté politique et sa souveraineté économique. Un pays où l’on fait tout pour détruire les secteurs producteurs de valeur et de croissance.
Nos décideurs sont occupés ailleurs. La question économique vitale aujourd’hui est le dernier de leurs soucis. Le pain quotidien des Tunisiens et le moyen de préserver le tissu économique, les emplois et d’assurer la survie d’une économie à l’agonie sont accessoires.
Pire, il est, aujourd’hui, à craindre que grands groupes et grandes entreprises, désenchantées et désillusionnées par le climat politique délétère, l’absence de visibilité et le peu d’intérêt et de soutien, quittent le pays pour aller gagner «leur pain» dans des pays plus accueillants et plus encourageants.
Hichem Elloumi, vice-président de l’UTICA, optimiste malgré tout, lors de la table ronde organisée dernièrement par le Conseil des analyses économiques (CAE) autour du thème «Pacte pour la compétitivité économique et l’équité sociale», pourrait lui aussi perdre ses dernières illusions.
A cette table ronde, outre de grands économistes et les représentants des organisations patronales et ouvrières, aucun politicien n’a assisté !
Sauver l’économie par des pactes de compétitivité
Et pourtant, l’initiative est des plus louables. Elle appelle à un accord entre partenaires sociaux et pouvoirs publics pour préserver le secteur industriel dans notre pays qui risque de dépérir en l’absence de stratégies consistantes et efficientes pour son développement.
L’étude, initiée par le CAE et réalisée par le cabinet Ernest & Young, préconise l’élaboration, dans un premier temps, de 20 pactes sectoriels, en premier celui de la compétitivité et de l’équité sociale centré sur l’industrie pour amorcer une relance économique prenant en compte le facteur humain et l’équité sociale dans un cadre participatif entre décideurs publics et partenaires sociaux.
Les risques de voir la Tunisie réduite à un marché pour la consommation de toutes sortes de produits importés et incapable de développer ses propres industries et de performer ses chaînes de valeur est malheureusement aujourd’hui bien réel. «Le seul moyen de sauver l’industrie est d’en donner la responsabilité à l’UTICA et à l’UGTT, et de prendre des mesures sectorielles horizontales et spécifiques», a déclaré Afif Chelbi, président du CAE à l’occasion, insistant sur le fait que la recherche de l’équilibre entre les différents acteurs publics et privés ou encore entre différentes sensibilités politiques ne doit pas être paralysante.
L’intervention de Hichem Elloumi a été axée sur la résilience des entreprises tunisiennes dans un contexte de non croissance économique. Les exportations ont peu évolué, soit 6% en euro et 16% en dinar hors énergie (+10% en monnaie nationale) -ce qui est normal si nous prenons en compte la dépréciation de notre monnaie nationale. «Aujourd’hui, nous constatons un recul de l’industrie manufacturière et une baisse en volume de l’exportation ainsi qu’une baisse des déclarations d’investissement. Et pourtant, la Tunisie continue à offrir un potentiel de croissance important et de grandes opportunités pour l’investissement et la conquête des marchés internationaux».
Combattre l’informel
Hichem Elloumi a appelé à faire le nécessaire pour combattre l’économie informelle, réglementer les marchés publics, développer la diplomatie économique et réformer le code des changes pour permettre aux résidents d’ouvrir des comptes en devises : «Il faudra agir rapidement car le temps joue contre nous et les concurrents profitent de nos hésitations et faiblesses».
Il ne croyait pas si bien dire !
Dans le contexte actuel, nous pouvons nous prévaloir d’un président profane en économie et quelque peu chauvin, nationaliste et tourné vers le passé ; d’un chef de gouvernement “islamiste“, désigné par le parti vainqueur des législatives de 2019, et d’un président de l’Assemblée lui aussi “islamiste“.
Tout porte à penser que les deux présidents n’ont que faire de l’économie nationale, ce n’est pas leur tasse de thé. Le premier joue au «Omar Ibnou Al Khattab» réalisations en moins, accueillant, embrassant, consolant les enfants du peuple et limogeant le corps diplomatique à l’aveugle, sans prendre en compte les intérêts nationaux ; le deuxième occupant l’ARP avec le regard tourné vers La Kasbah, le siège du gouvernement.
Le chef de gouvernement chargé de nommer la nouvelle équipe dirigeante n’est pas connu pour ses prouesses économiques ou ses entrées solides dans les sphères internationales. Ceux qui l’ont rencontré et auprès desquels il a demandé conseil ont assuré que c’est quelqu’un qui sait écouter.
La Tunisie est donc dirigée aujourd’hui par un président aux “mains propres” mais qui ne connaît rien à la gestion des affaires de l’Etat, qui agit comme s’il était un calife ; l’ARP est présidée par un wahhabite invétéré ; alors que La Kasbah pourrait être dirigée par un chef de gouvernement nommé parce qu’apparemment obéissant et qui n’a pas une grande maîtrise de l’économie et des finances.
La sauver serait-il possible ? Tout est possible puisque nous sommes dans le pays de la révolution qui a émerveillé le monde, et où le peuple qui «veut» élit ceux qui le détruisent démocratiquement !
Qu’avait déjà déclaré le général qui a dit non ? La terre de Tunisie est sacrée (Tounes traba’a skhoun), nous pouvons donc nous fier à la bénédiction de tous les marabouts pour nous sauver de tomber dans l’obscurantisme et le moyen-âge ! Ainsi soit-il !
Amel Belhadj Ali