La grande distribution vient d’être enrichie par deux hypermarchés de plus de 10 000 mètres carrés chacun. Le premier portant l’enseigne Carrefour a été édifié à la périphérie de la ville touristique de Sousse (centre de Tunisie), en l’occurrence “Mall Of Sousse”, tandis que le second portant l’enseigne Géant du groupe Casino a été réalisé à la sortie sud de Tunis, région de Ben Arous, “Azur City”.
Hédi Baccour, président de la Chambre syndicale des grandes surfaces, a évoqué, dans un entretien accordé à l’hebdomadaire d’expression arabe “Assabah Al Ousboui“, l’évolution fulgurante que connaît le secteur de la Grande distribution.
Etat des lieux
Selon lui, le nombre de grandes surfaces est passé de 200 en 2010 à 300 en 2019 -et à 450 si on compte celles qui portent, depuis 2011, l’enseigne « Aziza »-, soit une augmentation de 250 grandes surfaces en 9 ans.
Autres indications fournies par Baccour : la Grande distribution emploie 14 mille personnes -sans préciser s’il s’agit d’emplois permanents ou non-, réalise un chiffre d’affaires annuel de 7 milliards de dinars et représente 22% du commerce des produits de détail en Tunisie.
Officiellement, les gouvernements tunisiens qui se sont succédé, depuis les années 90, ont parié sur les distributeurs étrangers pour moderniser le commerce du pays. Ils les ont encouragés, selon leurs dires, sous certaines conditions : création d’emplois, quota de produits locaux, transfert limité de devises.
Les distributeurs français Promodes (Carrefour) et Casino (Géant) ont été les premiers à s’installer dans le pays et à «s’accommoder de ces conditions» en attendant l’aboutissement des négociations avec l’Union européenne sur la libéralisation des échanges des services dans le cadre du fameux projet de l’Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA).
Néanmoins, en dépit d’un taux de croissance de 10% par an, la grande distribution ne s’est pas encore imposée à tous les Tunisiens, particulièrement dans l’arrière-pays. Les 80% qui restent sont accaparés par plus de 250 000 échoppes que compte le pays.
Cela pour dire que le petit commerce, en employant environ 450 à 500 000 personnes, conserve un poids économique très important : il réalise près de 85% du chiffre d’affaires du secteur.
Compte tenu de la faiblesse relative du pouvoir d’achat des Tunisiens, et notamment en dehors de la capitale, l’épicier reste un élément indissociable du paysage urbain et rural. Il offre de nombreux services aux clients : la proximité, l’achat à crédit, la disponibilité presque en temps réel (16 heures sur 24).
Bien qu’il soit exonéré pratiquement d’impôt (régime forfaitaire), le petit commerce présente le désavantage de proposer, le plus souvent, une large offre de produits (épicerie, boissons, boulangerie, tabac) le plus souvent de moindre qualité et plus chers (+20% et parfois +50% par rapport aux grandes surfaces).
D’où l’enjeu du rôle que peut jouer la grande distribution dans la moralisation du secteur, notamment en ce qui concerne le contrôle, la transparence, l’hygiène, la traçabilité des produits…
Pour un développement de la grande distribution à l’intérieur du pays
Une enquête effectuée dans le Grand Tunis par l’Institut national de consommation sur “l’impact de la modernisation du commerce sur le comportement du consommateur tunisien et ses dépenses“ a révélé une nouvelle tendance. Plus de 60% des habitants de la capitale et ses périphéries effectuent leurs achats dans les grandes surfaces et hypermarchés. Il s’agit d’un taux fort respectable et surtout encourageant.
«L’idéal» serait de voir la grande distribution se développer dans tout le pays, au moins dans les chefs-lieux des gouvernorats et dans les grandes villes. Car, ne l’oublions pas, à travers les enseignes autorisées de la grande distribution et la convivialité qu’elles génèrent, c’est toute une urbanité, une coexistence pacifique, voire une véritable démocratie moderne qui est instaurée dans ces espaces dans la mesure où toutes les catégories sociales peuvent s’y côtoyer en toute sérénité.
D’ailleurs, ce n’est pas un hasard, si les habitants des villes de l’intérieur, confrontés à la cherté des produits générés le plus souvent par la multiplicité des intermédiaires et attirés par les prix promotionnels et rabais pratiqués par les hypermarchés, se déplacent de plus en plus fréquemment à Tunis pour faire leurs courses.
Le message est on ne peut plus clair. Certains ministres en ont pris conscience et l’on punaisé dans des rapports. C’est l’objet de notre deuxième article sur la grande distribution.
A suivre….