Le manque de maturité de la classe politique lèse la marche de l’Etat. Youssef Chahed appelle à une relève de la classe politique pour une nouvelle génération.
Comment se dégager de la crise politique actuelle pour aller vers un Etat efficace ? L’auditoire s’attendait à une résolution radicale de la part de Chahed, le chef du gouvernement actuel. Il penchera pour une solution plus souple. Serait-elle efficace ?
Faut-il modifier la Constitution ?
La question était sur toutes les lèvres. Et Youssef Chahed évoquera cette hypothèse, tant la crise est dure. Il reconnaît que c’est avant tout une crise politique et culturelle avant d’être économique et sociale.
Changer de Constitution, c’est ouvrir l’espoir d’aller vers un régime présidentiel. Il citera deux obstacles à cette option.
Pour engager ce chantier, il convient de réunir une majorité qualifiée de 147 députés ; un chiffre difficile à atteindre. Mais il n’est pas hors d’atteinte.
Youssef Chahed penchera pour une solution moins radicale. Lui qui a souffert du comportement des députés, dit vouloir garder le régime parlementaire en l’état mais modifier le règlement interne de cette institution.
Son gouvernement a adressé 260 projets de lois à l’Assemblée. Et pour ce total, 100 projets de lois n’ont pas pu être examinés. Parmi ces derniers, on cite la loi sur l’urgence économique. Et celle sur l’amnistie de change. Deux lois qui auraient contribué à améliorer la physionomie du climat et de l’environnement des affaires dans notre pays. Qu’importe.
Modifier le mode de scrutin
Toujours dans une approche pragmatique, Youssef Chahed souhaite que l’on modifie le mode du scrutin. En effet, la loi électorale actuelle ne permet pas l’émergence d’une majorité de gouvernement. Et c’est un élément d’instabilité permanente. Et d’inefficacité de l’Etat.
Dans le même sillage, il appelle à revoir la loi sur les partis politiques. Cet encadrement réglementaire doit pouvoir permettre de contrôler les sources de leur financement.
Le plus gros de la crise économique est-il passé ?
Youssef Chahed soutient avoir stabilisé le cadre macroéconomique. En effet, l’amélioration des recettes fiscales de l’Etat a contribué à ramener le déficit budgétaire de 6,5% à 3%. Un saut de palier réel. Et le gouvernement y est parvenu alors que les dépenses de sécurité ont augmenté de 6 fois et demie, passant de 1,8 milliard de dinars en 2010 à 7 milliards de dinars en 2020.
La lutte contre le terrorisme nous coûte encor cher en dépenses, tout en nous privant de recettes touristiques. Elles nous prennent en ciseaux.
Youssef Chahed cite la remontée du dinar et des réserves de change, comme autres avancées économiques spectaculaires. Ces deux éléments font toujours polémique.
L’hypocrisie politique doit cesser
Le gouvernement Chahed a eu à faire face à deux grèves générales. Au moment où il était dos au mur, aucun parti ne l’a soutenu. Mais dès que la BCT a relevé son taux directeur, ces mêmes partis ont mis le holà ! Arrêter l’hypocrisie politique, dira avec véhémence Youssef Chahed. Et cela donne du relatif à son appel pour le renouvellement de la classe politique.
Le chef du gouvernement souhaite que l’Etat dépense mieux, en allouant davantage de ressources au Titre II pour réformer l’Education, améliorer le transport et les prestations de santé. Mais comme pour avertir son successeur, cela ne doit pas se faire par le déficit.
Last but not least, que faire du secteur public ? On ne peut continuer à le perfuser. Il convient de le restructurer sans recourir à la solution extrême de la privatisation.
Retrouver la culture du travail
L’appel à la maturité politique lancé par Chahed de la part de tous sera-t-il suivi d’effet ? Que sera le retour d’échos ? On ne peut en préjuger. Que vaut son autre appel aux Tunisiens à retrouver le goût du travail et de tempérer leurs revendications ?
Pareil. On ne peut réformer par de la bonne volonté ou de l’appel à la révision. Comment gagner les salariés à la solution du “make ou take“ ? Les enseignements de morale, en areil cas, on ne la sait que trop, inefficaces.