Les réactions n’ont pas tardé suite à l’annonce très attendue, jeudi 2 janvier 2020, de la composition de la nouvelle équipe gouvernementale proposée par le chef du gouvernement désigné, Habib Jemli.
Au Parlement, les avis étaient partagés. Certains députés trouvent que la composition proposée par Jemli comporte de bons profils, alors que d’autres émettent de réserves, ce qui fait que le vote de confiance sera une décision difficile à prendre.
Réforme nationale: hésitation
Hssouna Nasfi, président du groupe de la Réforme nationale (15 députés) a indiqué que son bloc se réunira pour décider. Le chef du gouvernement désigné s’est engagé à former une équipe indépendante des partis politiques et composée de compétences intègres, a-t-il fait observer, ajoutant que seule la pratique permet de le vérifier.
Ceci étant, pour Nasfi certains noms de la liste de la nouvelle équipe suscitent des interrogations sur leur indépendance et leur compétence.
Le député, qui n’écarte par l’éventualité d’apporter des modifications à la liste, juge insensé tout changement ciblant des membres qui font l’objet de réserves, après 45 jours de concertations.
Pour le groupe de la Réforme nationale, la composition proposée par le chef du gouvernement est “insatisfaisante”, ce qui rend sa position équivoque à son égard.
Coalition Al Karama: vers un rejet
De son côté, Abdellatif Aloui, député du groupe de la Coalition Al Karama (21 élus) qualifie la composition proposée de “gouvernement de raccommodage”. Les critères posés par Jemli ne sont plus aujourd’hui en sa faveur. Car il aurait dû choisir parmi les compétences partisanes, en plus des personnalités indépendantes.
A priori, le groupe Al Karama ne votera pas le gouvernement Jemli, a-t-il affirmé, ne niant pas l’existence d’une petite minorité au sein du bloc qui préfère accorder sa confiance à la nouvelle équipe gouvernementale pour ne pas perdre plus de temps.
Il a indiqué que les réserves du bloc Al Karama concernent les ministre du Tourisme, René Trabelsi, de la Planification et de la Coopération internationale, Fadhel Abdelkefi, de la secrétaire d’Etat auprès du ministre de la Santé, Maha Issaoui, et de la secrétaire d’Etat chargée de la Diplomatie économique et des Tunisiens à l’étranger, Sana Skhiri.
Ennahdha: vers le vote de confiance
Concernant les remous soulevés par certains noms proposés dans l’équipe gouvernementale de Jemli, Belgacem Hassen (Ennahdha, 54 sièges) a déclaré que l’évaluation de l’équipe gouvernementale se fait en aval de son action et non en amont.
“Toutes les personnalités peuvent faire l’objet de critique et de fausses allégations ou d’accusations avérées mais le jugement et l’évaluation doivent se faire sur la base du travail accompli et non en référence à son nom”, a déclaré le membre d’Ennahdha.
Il a ajouté que le mouvement Ennahdha a œuvré à ce que le gouvernement soit composé de compétences partisanes, mais étant donné l’échec de cette option suite à de longues tractations, Jemli a opté pour un gouvernement de compétences non partisanes.
Il a précisé à cet effet, que le choix décidé par le chef du gouvernement désigné n’était pas celui d’Ennahdha. Selon lui, il est de la responsabilité d’Ennahdha d’accorder sa confiance au gouvernement étant donné que c’est ce parti qui a choisi Habib Jemli.
Al Moustakbal: vote contre le gouvernement Jemli
Pour sa part, le porte parole du bloc Al Moustakbal (9 députés) Issam Bargougui a fait savoir dans une déclaration accordée à l’Agence TAP que “la composition du gouvernement proposée par Jemli ne traduit pas la volonté populaire et consacre clairement les calculs partisans”.
“Notre bloc ne votera en faveur du gouvernement, qu’à condition d’apporter les rectifications nécessaires sur sa composition, avec l’impératif d’y impliquer tous les partis politiques”, a déclaré Bargougui.
Qalb Tounes votera pour Jemli
Pour sa part, Iyadh Elloumi, dirigeant au parti Qalb Tounes, a annoncé, jeudi soir, lors d’une conférence de presse, que le conseil national du parti (38 députés) se tiendra dimanche prochain pour définir la position du parti à l’égard du vote de confiance au gouvernement proposé.
“Le parti va non seulement considérer les noms proposés pour le prochain gouvernement, mais aussi leurs programmes”, a-t-il souligné, précisant que l’éradication de la pauvreté constitue l’une des priorités de Qalb Tounes.
Evoquant la composition du gouvernement Jemli (28 ministres et 14 secrétaires d’Etat), Elloumi a souligné l’existence de “compétences réelles au sein de la composition du gouvernement”, ajoutant “qu’aucune orientation politique particulière ne se dégage de cette composition”.
Mouvement Echaâb votera non…
De son côté, Zouhaier Maghzaoui, député du mouvement Echaâb, a déclaré à la TAP que le bloc démocratique, regroupant 41 députés du mouvement Echaâb et du Courant démocrate ainsi que des indépendants, a décidé de ne pas accorder sa confiance au gouvernement proposé.
“Ce qui a été qualifié de gouvernement de compétences est dans le fond le gouvernement du mouvement Ennahdha et du parti Qalb Tounes”, a-t-il dit, estimant qu’Ennahdha “aspire à un gouvernement de quotas partisans, dénué de toute vision ou programme politique”.
Tahya Tounes votera non…
Mabrouk Korchid, député du mouvement Tahya Tounes, a déclaré, jeudi, à la presse, que le parti (14 députés) ne votera pas la confiance au gouvernement Habib Jemli, estimant que la composition proposée “n’est qu’un gouvernement d’Ennahdha et le chef du gouvernement devrait dire la vérité au peuple tunisien”.
Pour le PDL, c’est non…
Le Parti destourien libre (PDL) qui compte 17 députés, avait fait part, dans plusieurs occasions, de sa décision de principe de ne pas voter la confiance au gouvernement proposé “tant que c’est un gouvernement Ennahdha”.
Habib Jemli avait annoncé, jeudi 2 janvier 2020, la composition du gouvernement qui est composé de 28 ministres et 14 secrétaires d’Etat.
Le président de la République, Kais Saied, avait signé un message adressé au président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), Rached Ghannouchi, après avoir reçu la liste de l’équipe gouvernementale proposée, mercredi, par le chef du gouvernement désigné, Habib Jemli.
En vertu de l’article 89 de la Constitution, la composition du gouvernement proposé doit obtenir une majorité absolue au parlement, soit au moins 109 voix.