Une étude élaborée par l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) en partenariat avec “American Solidarity Center” entre 2016 et 2018 a révélé que “70% des femmes sont exposées à différentes forme de violence sur le lieu de travail”.
Cette étude, dont les résultats ont été présentés lors d’une table ronde organisée, mercredi à Tunis, par l’UGTT sur la convention internationale n°190, a recommandé d’harmoniser la juridiction tunisienne avec les conventions internationales en la matière, dont la convention internationale n° 190 et sa recommandation n° 206 sur la violence et le harcèlement dans le monde du travail, ratifiée par la communauté internationale en juin 2019.
Imen Houimel, coordinatrice du programme au bureau tunisien de l’Organisation internationale du travail (OIT), a indiqué à cet effet que “l’étude qualitative réalisée par l’UGTT a démontré l’existence de phénomènes inappropriés dans l’espace de travail en Tunisie”, ajoutant que la forme de violence la plus significative qui touche les femmes, est “la violence économique, avec un taux de plus de 68%”.
Elle a considéré que la marginalisation subie par les femmes dans le monde du travail est considérée, selon les concepts onusiens, comme étant une forme de violence, notant que ce constat se manifeste particulièrement à travers le faible pourcentage de femmes propriétaires des terres qui ne dépasse pas les 2%, en plus de la difficulté à obtenir des prêts bancaires par rapport aux hommes.
Elle a expliqué que cette situation s’applique également à la condition de la femme en Tunisie, notamment dans les zones rurales, où des études ont démontré que le pourcentage de la couverture sociale ne dépasse pas 10% chez les femmes, tandis que le taux de pauvreté dans certains gouvernorats en Tunisie a atteint 40% pour les femmes alors qu’il ne dépasse pas 25% au niveau national.
Houimel a encore indiqué que de nombreuses études portant sur ce thème avaient été menées après 2011, dont celle de l’Office national de la famille et de la population (ONFP) qui a révélé que 47% des femmes en Tunisie sont victimes de violence dans l’espace familial tandis que d’autres études du même genre ont indiqué que les femmes sont victimes de violence dans l’espace public avec des proportions variables entre violence physique et psychologique et harcèlement sexuel, particulièrement dans les moyens de transport.
Elle a dans ce sens souligné que les études ne reflètent pas les proportions réelles des cas de harcèlement sexuel, dans la mesure où le sujet constitue encore un tabou pour un grand nombre de femmes qui s’abstiennent d’en parler, par crainte de stigmatisation morale dont elle pourraient faire l’objet, outre le risque de licenciement en cas de dénonciation du harcèlement, ainsi que la discrimination au niveau des promotions professionnelles et des salaires, précisant que les secteurs de la santé et du tourisme constituent les secteurs qui enregistrent le plus grand nombre des cas de harcèlement.
Pour sa part, Abdessalem Nciri, expert juridique à l’UGTT, a fait savoir que l’organisation de cette réunion s’inscrit dans le cadre des efforts de l’organisation ouvrière en partenariat avec American Solidarity Center pour inciter les partis politiques, les organisations et les associations à pousser le gouvernement à ratifier la convention n° 190 relative à la lutte contre la violence et le harcèlement sur le lieu de travail.
Il a ajouté que la ratification de cette convention s’avère, aujourd’hui, nécessaire suite à la recrudescence du phénomène de violence et de ses dommages qui n’affectent pas uniquement les travailleur, mais pèse de son impact sur la productivité de l’institution et les conditions de travail et par conséquent sur l’économie en général.
La Convention internationale n°109, reconnaît que “la violence et le harcèlement dans le monde du travail peuvent constituer une violation des droits humains ou une atteinte à ces droits, mettent en péril l’égalité des chances et sont inacceptable et incompatibles avec les conditions de travail décentes”.