Le ministère des Affaires culturelles et le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) ont, dans un faire-part séparé, regretté la perte de Lina Ben M’henni, “blogueuse, activiste et défenseure des droits humains”, décédée dans la matinée du lundi 27 janvier 2020 à Tunis.
La défunte s’est éteinte à l’âge de 36 ans des suites d’un long combat contre la maladie. Sa mort à la fleur de l’âge marque la fin de parcours d’une jeune femme combattante.
Le ministère des Affaires culturelles regrette la perte de “l’amie de la parole libre, l’activiste, la blogueuse et l’universitaire”.
Il revient sur le parcours d’une jeune femme “largement active dans la lutte contre la censure sur internet et la défense de la liberté d’expression”.
“La Tunisie a perdu une voix libre et une personnalité exceptionnelle qui a laissé une large trace durant la dernière décennie de la vie du régime de la dictature et toute la période qui l’avait suivie”, lit-on dans le texte du SNJT.
Le Syndicat a fait le point sur “sa lutte acharnée pour les droits des Tunisiennes et des Tunisiens à la liberté d’expression, de pensée et d’accès à l’information aussi bien que les libertés individuelles et collectives”.
Il a rappelé le harcèlement et les atteintes physiques et morales continues dont elle était sujette sous la dictature, une situation qui s’est poursuivie même après la révolution avec les menaces de mort, ce qui avait nécessité de lui fournir une protection rapprochée”.
“Elle avait subi des campagnes de dénigrement et de diffamation touchant à sa personne et à sa dignité, à cause de ses opinions à propos d’un certain modèle sociétal et son soutien à l’égalité entre les sexes”, lit-on encore.
Née le 22 mai 1983, la défunte occupait le poste d’assistante en langue anglaise à l’Université de Tunis.
Après des études universitaires en Tunisie, Lina Ben M’henni avait poursuivi son parcours aux Etats-Unis d’Amérique, grâce à une bourse du programme Fullbright. Durant ses études aux USA (2008-2009), elle a enseigné l’arabe à l’Université de Tufts, près de Boston.
Avec les prémices de la révolution tunisienne, elle avait acquis l’image d’une militante dans le mouvement de la jeunesse révolutionnaire grâce à ses écrits aussi bien que sa présence dans la rue.
Sa notoriété internationale, elle l’a acquise grâce à son blog “Tunisian Girl” dans lequel elle s’exprimait librement autour des affaires politiques et sociales dans le pays. Elle s’est fait connaître par ses écrits contre la dictature sous Ben Ali.
Elle a publié en 2011 son premier ouvrage “Tunisian girl, blogueuse pour un printemps arabe“. Son engagement lui a valu d’être décorée de plusieurs médailles dans divers pays du monde. En mai 2011, elle a été nominée pour le prix Nobel de la paix 2011.
Lina M’henni était à plusieurs fois au top du classement des meilleures blogueuses dans le monde. Elle a reçu à Bonn le “Prix du Meilleur Blog 2011” lors de la septième édition du grand concours international des blogs, les BOB’s, organisé par la radiotélévision allemande Deutsche Welle.
Elle avait aussi occupé le 23ème rang dans le classement des 100 femmes les plus influentes pour l’année 2012, du prestigieux magazine “Arabian Business“.
L’engagement de la défunte s’alimentait d’un milieu familial favorable puisque son père, Sadok Ben Mhenni, est un militant de gauche et l’un des fondateurs de la section tunisienne d’Amnesty International.
Son combat contre la maladie et la greffe de rein qu’elle a eu ont encore renforcé son côté humain à travers des activités qui se rapportent notamment à la défense des droits des sportifs transplantés.
De son intérêt pour la lecture était née l’idée de la campagne pour la collecte de livres en faveur des institutions pénitentiaires tunisiennes qu’elle avait lancée en marge des Journées Cinématographiques de Carthage (JCC) 2019. Cette action lui a alors permis de collecter 45 000 copies en vue de les mettre à la disposition des personnes en milieu carcéral.