Dans une interview accordée au quotidien le Maghreb du 8 Mars 2020, le chef du gouvernement Elyes Fakhfakh, a imputé aux probables retombées économiques à l’international du Coronavirus (Covid-19), la révision à la baisse du taux de croissance pour l’année en cours. Ce taux sera réduit, selon lui, de 2,7% prévus à 1% du PIB.

A n’en point douter, connaissant bien les responsables tunisiens qui ont, constamment, cette fâcheuse tendance à s’accrocher au moindre alibi et à la moindre crise qui se manifeste à l’échelle internationale pour se déresponsabiliser et lui faire assumer, depuis le début de l’année, les mauvais chiffres de fin d’année, ce taux de croissance de 1% sera désormais, le cap et la référence officielle, durant l’exercice 2020.

Et pourtant, à examiner de près les conséquences attendues du Covid-19, elles ne sont pas aussi catastrophiques pour la Tunisie. Elles lui sont même globalement favorables. On peut même s’aventurer pour dire que le coronavirus a voté pour le gouvernement Elyès Fakhafakh. Au moins trois indices le prouvent.

Les trois cadeaux du Covid-19

Le premier porte sur la baisse significative du prix du pétrole par l’effet du recul de la production généré par le Covid-19 à l’échelle mondiale. Pour ne citer que le chiffre le plus récent, le 9 mars 2020, le prix du pétrole a baissé de plus de 30% pour se chiffrer entre 27 et 33 dollars le baril. Quant on sait que le budget économique de la Tunisie pour 2020 a été calculé sur la base d’un prix du baril de 65 dollars, on imagine les économies en devises que le gouvernement va réaliser et la marge de manœuvre dont il va disposer pour réduire le déficit énergétique, principal composante du déficit courant.

Le deuxième service que le Covid-19 va rendre à la Tunisie consiste en un regain d’intérêt des grossistes de prêt à porter européens vers les textiliens tunisiens. A titre indicatif, la majorité des chaînes de télévision française ont consacré, ces dernières semaines, de nombreuses émissions sur l’épuisement des stocks de prêts à porter et d’autres produits importés de Chine en raison du coronavirus.

Lors de débats organisés sur cette pénurie, des grossistes ont manifesté l’intérêt de tirer la leçon de l’affaire du Covid-19 et de compter, dorénavant, sur les services de textiliens de proximité au Maghreb. Pour saisir l’ampleur du gain du temps qu’une telle option pourrait procurer aux distributeurs européens. Rien qu’au plan uniquement du transport, il suffit de quarante huit heures pour s’approvisionner de Tunisie contre plus de 50 jours de Chine.

La Tunisie, qui a perdu, depuis 2009, sa place de 5ème fournisseur de l’Union européenne pour occuper, actuellement, la 9ème place, pourrait retrouver son rang d’antan. Il lui suffit d’exploiter à bon escient l’opportunité que lui offre le coronavirus pour renouer avec les distributeurs européens et établir de nouveaux contrats de partenariat.

Le Coronavirus pourrait rendre d’autres services dont…

Le troisième porte sur la baisse probable des échanges commerciaux avec la Chine et l’Italie, les deux pays les plus touchés, certes, par le coronavirus mais qui sont en même temps les deux pays avec lesquels la Tunisie accuse d’importants déficits commerciaux. Ainsi le ralentissement des échanges avec ces pays avec comme corollaire la réduction de ces déficits par l’effet du covid-19 serait, à coup sûr, un beau cadeau à faire à une économie tunisienne en crise.

Pour revenir au taux de croissance de 1% estimé par Elyès Fakhfakah nous pensons qu’il est exagéré, du moins si on croit Slim Feriani ancien ministre de l’industrie et des PME dans le gouvernement de Youssef Chahed. Ce dernier avait évalué, à 1,5% lde taux de croissance à l’échelle nationale pour 2020 rien qu’à la faveur de l’entrée en production du gisement de gaz Nawara (1%) et la reconduction de la redevance prélevée par la Tunisie sur le passage sur son territoire du gazoduc qui achemine le gaz algérien vers l’Italie.

D’après l’ancien ministre, cette redevance est estimée annuellement à plus de 550 MDT, soit 0,5% de croissance. Sans commentaire.