La pandémie du covid-19 provoquera, cette année, une baisse de croissance de l’économie tunisienne, selon le Fonds monétaire international (FMI) qui prévoit une décélération du taux de croissance de 4,3%, faisant ainsi vivre à la Tunisie la plus grande débâcle économique depuis l’indépendance, ce qui aura des répercussions à plusieurs niveaux, ” au premier plan les finances publiques et l’emploi “, a fait savoir l’expert en économie, Mohsen Hassen.
Les impacts économiques et sociaux de la baisse de croissance
Les ressources propres de l’Etat seront, a-t-il dit, à leur plus bas, en raison de la baisse des ressources fiscales contre une hausse des dépenses de l’Etat pour assurer ses interventions sociales et économiques.
Il a ajouté, dans une déclaration, à l’agence TAP, que cette situation provoquera une augmentation des déficits public et courant, d’où les pressions sur les finances publiques et la balance des paiements, entraînant le recours à l’endettement, la détérioration de la valeur du dinar, en plus des effets inflationnistes et la baisse du pouvoir d’achat.
La dégradation de la croissance sera, par ailleurs, à la source de la perte de plusieurs postes d’emplois conduisant à une hausse du taux de chômage et l’amenuisement de la classe moyenne, ce qui menace d’une forte crise sociale, selon ses dires.
Le conseil d’administration de la banque centrale de Tunisie (BCT) a prévu une régression de la croissance économique nationale en 2020 en raison des répercussions du covid-19 sur le secteur touristique et les activités y afférent, notamment le transport, en plus des retombées sur le secteur de l’industrie avec la baisse de la demande étrangère et les difficultés des réseaux étrangers d’approvisionnement.
Toutefois, la BCT n’a pas révélé le niveau de la croissance prévu alors que le FMI l’a fixé à 4,3% et les institutions financières internationales ont, de leur côté, annoncé une baisse de la croissance mondiale en raison de la pandémie du covid-19.
Le FMI a souligné que ” les autorités doivent continuer à appliquer des politiques économiques prudentes et reprendre en mains les finances si des pressions apparaissent au niveau du taux de change et de l’inflation.
Il s’agit également, pour la BCT “de ne pas trop intervenir au niveau du marché de change afin de préserver les réserves internationales”.
Mohsen Hassen a estimé que “ces prévisions sont objectives” compte tenu des effets néfastes de la pandémie sur plusieurs secteurs, notamment celui du tourisme, principal pourvoyeur du pays en devises après avoir procuré 2 milliards d’euros, en plus de sa contribution à hauteur de 7% au PIB et sachant qu’il couvre 56% du déficit commercial.
Le secteur des exportations sera, lui aussi, en berne, la valeur des exportations des industries de transformation dans le monde ayant régressé de 50 milliards de dollars ainsi que ceux des secteurs du textile, des petits métiers et des industries extractives, outre la baisse de la croissance des partenaires européens de la Tunisie.
Appel du FMI à la BCT pour l’adoption de solutions traditionnelles face à une récession économique sans précédent.
En revanche, l’économiste a critiqué l’appel du FMI lancé à la BCT consistant à suivre une politique monétaire restrictive, “c’est-à-dire que face à une inflation élevée, la banque centrale relève le taux directeur “.
Il a déclaré que le fonds avait également recommandé à la banque centrale de ne pas interférer au niveau du marché du change pour régler le prix du dinar, ce qui signifie que le fonds préconise de lutter contre une stagnation sans précédent dans le pays avec des solutions et mécanismes traditionnels tandis que tous les pays touchés par l’épidémie du Covid-19 ont adopté une politique expansionniste contrairement à ce que demande le FMI.
Et de poursuivre, “ce qui attire l’attention, dans le communiqué du FMI, est que “l’objectif de la politique monétaire est la soutenabilité de la dette extérieure”, alors que la situation en Tunisie exige actuellement des solutions plus importantes et plus approfondies pour faire face à la situation économique.
Nécessité d’engager des négociations avec les bailleurs de fonds internationaux concernant le report du remboursement de la dette.
L’expert économique a souligné que la situation exceptionnelle que le pays vit nécessite d’engager des négociations avec une partie des donateurs parmi les institutions financières internationales et de financement bilatéral ainsi qu’au plan des dettes plurilatérales, compte non tenu des obligations du marché mondial, sur le report du paiement des échéances dues du service de la dette pour l’année 2020, ce qui va permettre à la Tunisie de faire façe à la situation économique et sociale urgente.
Il a souligné que la situation “est délicate et exige une politique claire pour atteindre 4 objectifs à court terme, en particulier contenir la crise sanitaire et s’en sortir avec le minimum de dommages, ce qui nécessite une mobilisation générale pour aider le staff médical et paramédical, fournir aux institutions hospitalières tous les équipements nécessaires et sensibiliser de la communauté à la nécessité de faire face à l’épidémie”.
Selon l’expert, le deuxième objectif est l’intervention de l’Etat au niveau social en activant le rôle social de l’Etat ” en tant que question de sécurité nationale dans le pays “. Mohsen Hassan a appelé à la protection du tissu économique, en particulier les petites entreprises qui représentent la majorité du secteur, à travers une politique de financement claire et l’octroi de privilèges fiscaux.
Il estime également qu’il faut se préparer pour “l’après le Covid-19″, appelant, dans ce contexte, le président de la Rrépublique et le président du gouvernement à réunir des experts et des compétences nationales pour penser et planifier pour l”après Covid19”.
Concernant le financement de ces objectifs, il a avancé: “Les ressources financières proviennent des ressources propres de l’Etat programmées dans le budget et du report de certains investissements publics et des contributions des particuliers et des institutions, ainsi que de la baisse des prix du carburant qui peut fournir des ressources supplémentaires de l’ordre de 800 millions de dinars, ceci s’ajoute au report du paiement des échéances de certaines dettes.
Les interventions sociales et économiques de l’Etat peuvent également être financées par des financements extérieurs, car la Tunisie devrait obtenir des fonds sous forme de dons et de prêts à des conditions avantageuses auprès d’institutions financières internationales, telles que la Banque mondiale (BM), la Banque africaine de développement (BAD), la Banque islamique de développement (BID) et le FMI qui entamera de nouvelles négociations avec notre pays pour obtenir un nouveau prêt.