Elyes Fakhfakh est-il réellement déterminé à lutter contre la corruption, et toutes formes de passe-droits ?

La question se pose et s’impose plus que jamais à la lumière de la manière avec laquelle le chef du gouvernement a réagi et géré les deux «affaires» auxquelles il a été confronté depuis sa prise de fonction; celles des trente millions de masques de protection contre le coronavirus, qui a éclaté il y a près d’une semaine, et, un mois plus tôt, des dégâts subis par la deuxième voiture de fonction du ministre du Transport, Anouar Maarouf, suite à un accident imputé à sa fille.

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Des “pêcheurs en eaux troubles”

Outre l’annonce de la date de la fin du confinement –pour passer à un confinement ciblé, à partir du 4 mai 2020-, l’interview que le chef du gouvernement a accordée dimanche 19 avril aux chaînes de télévision Wataniya 1 et Hannibal a été pour lui une occasion de s’exprimer au sujet de ce que certains médias, en Tunisie et à l’étranger, ont appelé “le scandale des masques de protection”.

Interrogé à ce sujet par la journaliste de Hannibal, Samah Meftah, trois jours après que l’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC) a, après avoir estimé disposer de sérieuses données concernant des soupçons de corruption, saisi le procureur de la République près le Tribunal de première instance de Tunis pour enquêter sur des suspicions de corruption concernant un marché pour la confection de masques barrières, Elyes Fakhfakh a défendu bec et ongles son ministre de l’Industrie, Salah Ben Youssef. Allant jusqu’à qualifier ce qui se dit à ce sujet d’«histoires bidon», et ceux qui les colportent de «pêcheurs en eaux troubles».

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Circulez, il n’y a rien à voir…

Un mois plus tôt il n’a pas prononcé les mêmes mots mais son attitude concernant l’affaire de la deuxième voiture de fonction de Anouar Maarouf, ministre du Transport et de la Logistique, dont diverses sources assurent qu’elle était conduite, de manière indue, par sa fille au moment où elle avait été accidentée, relevait du même état d’esprit : circulez, il n’y a rien à voir.

En effet, le chef du gouvernement s’est contenté d’émettre, le 20 mars 2020, une note dans laquelle il précise, en premier –ce qui traduit un souci d’éviter qu’un lien soit établi entre cet acte et l’affaire Anouar Maarouf- que «chaque membre du gouvernement qui ne jouit pas d’une prime de logement peut bénéficier d’un logement administratif sous condition d’y être autorisé par le chef du gouvernement», que «les dépenses engagées pour l’aménagement du logement de fonction sont aussi soumises à autorisation de la part du chef du gouvernement», et enfin que «le gouvernement met à la disposition des ministres et secrétaires d’Etat deux véhicules de fonction qui ne peuvent être conduits que par un chauffeur mis à la disposition ou par le membre du gouvernement en personne».

Alors que Fakhfakh n’a cessé de marteler, avant et après la formation de son gouvernement, que «la lutte contre la corruption ne devrait pas être un slogan», la crédibilité de son engagement en la matière est aujourd’hui sérieusement mise en doute du fait des deux affaires.

Moncef Mahroug

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