Nous avons été plongés dans un tiraillement sociétal qui échappe à tout le monde parce qu’on a préféré entendre ce que les autorités disaient et qu’il n’y avait fondamentalement pas de raison d’en douter. On a appliqué scrupuleusement ce qu’on nous a demandé du moment qu’on nous a demandé de le faire.
Par Dr Maher Haffani
La contrainte du confinement ne pouvait confiner notre pensée ou brimer notre curiosité ou nos capacités analytiques. Notre enveloppe céleste est importante, notre matière grise l’est autant sinon plus. Nous avons besoin de réfléchir, de nous renseigner et de nous documenter et de comparer les différents points de vue pour nous forger notre propre opinion. Ceci est primordial dans toute démarche scientifique et intellectuelle. Et pourtant, nous nous sommes interdits tout cela sous prétexte d’obéir à l’autorité.
Le devoir de réflexion
Qu’ont fait les professionnels, tous ceux qui avaient le devoir de réfléchir ?
N’étant pas ma spécialité, j’ai été curieux de voir ce que disaient mes confrères, les épidémiologistes, des maladies infectieuses pour le comparer avec ce que les autorités nous avançaient. J’ai été indigné par un silence non éthique. A ma grande surprise, aucune prise de position n’a été affichée pas ces spécialistes.
Autre constat. Les médecins de ville n’ont pas réagi alors qu’on les a privés de leur liberté de prescription de ce de quoi leurs patients pouvaient avoir besoin. La Chloroquine. C’est une atteinte massive aux droits inaliénables de la profession. La plupart expriment leur indignation en privé sans la soutenir en public.
De quoi ont-ils peur ? Il ne s’agit manifestement pas de peur. Au fond, les médecins sont consensuels et non des francs-tireurs. Ils sont fiables, responsables et humains. Ils sont dans la collégialité. Leur attitude fait partie de leur éthique et de leur dignité professionnelles.
Les modèles mathématiques
On a vu apparaître une cohorte de mathématiciens modélisateurs qui passent leur vie devant des ordinateurs à construire des mondes imaginaires. Dans cette épidémie, ils se sont vus confiés la gestion des réponses publiques et ils étaient largement médiatisées.
Quand on est face à un ordinateur et qu’on n’a aucune idée de la médecine et de la virologie, tout devient possible. Ils nous ont produit des projections délirantes qui ont terrifié les preneurs de décisions politiques. Ce qui les a poussés dans une stratégie de confinement rigide.
Ces modélisateurs ont avancé un faisceau d’arguments qui apparaissait contestable, en particulier en ce qui concerne le taux de mortalité qu’ils ont prédit à 3 et 4% de ceux qui allaient contracter la maladie alors qu’en fait il n’allait pas dépasser les 0,3%, ce qui est l’équivalent de la grippe saisonnière.
Beaucoup de personnes, non du domaine, percevaient cela intuitivement. Pendant ce temps, le discours officiel relayé par les médias faisait une sorte de propagande pour une épidémie qui n’en était pas une (du moins au moment où on avait décidé à la considérer en tant que telle).
Depuis le début, on a fait, médiatiquement, de cet événement une catastrophe apocalyptique avec un ensemble d’indicateurs qu’on a balancé à la face des gens. Sauf qu’en réalité, si on avait appliqué ces mêmes indicateurs à la grippe ou à toute autre pathologie comme le cancer ou les maladies cardio-vasculaires, on aurait généré le même état de terreur dans la population.
occulter toute pensée divergente, cela ne peut qu’aboutir à une dérive autoritaire. De ce côté-là, les médias ont joué un rôle lamentable.
Que le gouvernement considère que son opinion est justifiée, c’est son droit. Que les médias informent de la position du gouvernement, c’est leur rôle. Mais occulter toute pensée divergente, cela ne peut qu’aboutir à une dérive autoritaire. De ce côté-là, les médias ont joué un rôle lamentable.
Quelle éthique médicale ?
Si des comités ou des conseils ont été mis sur pied, pourquoi n’ont-ils pas assez de perspicacité pour palier à l’insuffisance des modélisateurs dans le domaine médical ? D’abord, est-ce que ces comités ont été réalisés ?
Il y a une différence entre être un politique et être un médecin. Pour prendre des décisions engageantes pour le pays, il faut s’entourer des meilleurs, des plus experts, des plus informés, des plus réseautés et des plus visionnaires, si j’ose dire, pour être sûrs d’identifier les meilleures solutions. Les éthiciens ont été scandaleusement absents depuis le début de cette affaire.
Finalement, on a vécu une épidémie plus médiatique que sanitaire.
On n’a parlé que de questions secondaires et sans importance mais personne ne s’est attaqué aux vraies questions éthiques. Les médias ont donc failli à leur tâche qui est celle de donner aux gens le son de cloche éthique qui les aurait éclairés sur l’ampleur de la tragédie qui se jouait dans leur pays. Finalement, on a vécu une épidémie plus médiatique que sanitaire.
Tout a plaidé pour la généralisation de la psychose. Des professionnels exagérément médiatisés ont versés dans la technique et les détails à tel point qu’on s’est retrouvés braqués sur leur incapacité de voir le tableau dans sa globalité et dans un contexte un peu plus général. Cela a focalisé la population sur le détail sans pouvoir se reconnecter à la réalité objective des chiffres.
La sacro-sainte autosatisfaction
Le discours qui consiste à dire « heureusement qu’on a confiné les gens, regardez le nombre de morts que cela a généré dans d’autres pays, et que si on ne l’avait pas fait il y aurait eu un nombre de morts plus important » est scientifiquement intenable.
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La preuve en est que dans un pays comme la Corée du Sud où il n’y a pas eu de confinement, il y a eu 4 morts pour 1 million d’habitants soit 100 fois moins qu’en Europe dans les pays où on a confiné les gens. L’épidémiologie infectieuse plaide, justement, en faveur de l’inverse de ce qui a été fait.
Il fallait rapidement dépister pour voir quelles sont les personnes contagieuses afin de les isoler et permettre à l’épidémie de passer sans faire trop de dégâts. Nous, on a fait l’inverse et, heureusement, l’essentiel de l’épidémie est passé bien avant la décision de confinement durant les mois de janvier et février.
Le confinement étant donc un facteur aggravant pour la contagiosité. On a été dans un état de torpeur qui nous a été imposé par une certaine malhonnêteté intellectuelle tendant vers la perversité.
On a été dans un état de torpeur qui nous a été imposé par une certaine malhonnêteté intellectuelle tendant vers la perversité.
A la limite, je suis enclin à soutenir les autorités qui ne savaient à quel point on en était, même si dans sa dimension dramatique se sentir dépassé a fini par faire pleurer le ministre de la Santé. Par contre, je soutiens que le b.a.-ba de l’intelligence était de vérifier si les hypothèses confrontées au réel résistaient.
On ne peut jeter la pierre aux autorités. Au contraire, je trouve leur réaction rassurante. Ce qui ne rassure pas, c’est qu’au fur et à mesure qu’on avançait, les événements prouvaient qu’on avait pris la mauvaise attitude.
Mais on a été dans l’incapacité de reconnaître l’état de la situation et par conséquent de corriger le tir. Ça c’était lamentable.
La noblesse de la population
Ensuite, il faut noter que l’impératif de restriction des libertés n’a pas été clairement expliqué à la population qui a cru accepter cette restriction pour ne pas être infectée par le virus et non pour prévenir un éventuel engorgement des structures de soins.
Ce qui est navrant, c’est que personne n’a bien interprété les conséquences du confinement sur la contagiosité et tout le monde s’est cru confinés pour ne pas être infectés. La réaction de la population a été favorable et pleine de noblesse.
Cette incapacité de remettre en question la première décision de confinement est terrible du point de vue politique et de l’honnêteté intellectuelle car on n’arrivait pas à reconnaître qu’on s’était trompé vu la faible évolution du nombre des patients atteints et du faible taux de mortalité.
La base de toute communication de crise étant de reconnaître ses erreurs, on se retrouve à persévérer dans une situation de mensonge d’Etat qui risque d’altérer la confiance de la population en ses responsables.
La perception cognitive de la population a été manipulée dans le sens de la paniqueà tel point que la population s’est identifiée à une attaque physique (guerre) et s’est mise à refuser que sa conviction sincère de danger imminent soit mise en question.
Tous ceux qui sont intervenu pour remettre en question la situation sanitaire se sont heurtés à des médias d’abord et à une population ensuite en état d’incapacité d’écouter un avis différent de celui qui les a plongés dans leur perception cognitive psychotique. On a été dans un déni de réalité.
Que retenir ?
Aujourd’hui, les données telles qu’on les connaît ainsi que les caractéristiques de cette épidémie en termes de contagiosité, de dangerosité et de létalité sont exactement les mêmes en ordre de grandeur que les épidémies saisonnières à virus influenza. Ce qui est rassurant.
Les politiques continuent à justifier ce qui n’est pas. Et « ce qui n’est pas » est un mensonge qui ne tient pas la route sur le plan scientifique
Les politiques continuent à justifier ce qui n’est pas. Et « ce qui n’est pas » est un mensonge qui ne tient pas la route sur le plan scientifique mais il bénéficie d’une propagande.
Le train de mesures qui était nécessaire à prendre était le suivant :
- Multiplier le plus rapidement possible la capacité de dépistage.
- Mettre en quarantaine les contagieux et les traiter systématiquement
Et l’épidémie passe en quelques semaines. Apparemment, elle était passée sans qu’on s’en rende compte depuis le mois de février.
Serons-nous capables de produire des valeurs humanitaires plus fortes à l’occasion de cette crise ? c’est ce que nous souhaitons pour notre société qui privilégie les intérêts particuliers à l’intérêt de la population.
Serons-nous capables au décours de cette crise de revenir aux fondamentaux qui fondent une société vivant ce qui vaut la peine d’être vécu ?
Socialement on a une distanciation physique dramatique. Les gens vous regardent comme un pestiféré capable de les contaminer. Les conséquences psychiques sont majeures mais qu’on ne mesure pas encore à cause d’une sidération collective persistante.
Il va falloir sérieusement prévenir les actes d’autodestructions commandés soit par des considérations économiques, soit par la perte de sens ou par l’angoisse.
Le plus douloureux c’est que cela arrive à propos d’une infection qui ne menace que 1% de la population. Les autres 99% seront atteint d’un petit rhume, d’une grippe ou ne la sentiront même pas.
on a précarisé des milliers de personnes pour une épidémie qui n’est pas loin de celle de la grippe.
Ce qui reste à voir concerne le sérieux de la démarche économique. Qui va réellement bénéficier des aides ? N’oublions pas qu’on a précarisé des milliers de personnes pour une épidémie qui n’est pas loin de celle de la grippe.
Dr Maher Haffani