Après le départ de l’allemand Rocket Internet -actionnaire historique, qui détenait 11% de son capital, Jumia, la plateforme panafricaine de e-commerce, ne compterait plus dans son capital de spécialistes de la vente en ligne, selon plusieurs médias.
On se rappelle de l’introduction en grande pompe à la Bourse de New York de Jumia, qui constituait alors une première africaine. Mais on apprend que la plateforme a fermé ses portes dans trois pays africains, car “n’arrive pas à faire des bénéfices et s’est fait jeter par ses propriétaires d’origine”, écrit Larry Madowo, ancien rédacteur en chef de BBC Africa Business.
Selon BBC Afrique, les deux PDG de Jumia (les français Jeremy Hodara et Sacha Poignonnec) ont réduit leurs salaires quelques jours seulement avant le premier anniversaire de son introduction à la Bourse de New York.
Ce qui est normal, quand on sait que le trio dirigeant (les deux PDG plus le directeur financier) a gagné, en 2019, “un total de 5,3 millions de dollars en salaires et en primes”. Mais pendant ce temps, les pertes de Jumia augmentaient de 34% pour se situer à 246 millions de dollars, soit la huitième année consécutive sans profits pour le groupe.
La crise du coronavirus a constitué pourtant “une aubaine” pour Jumia, en ce sens que “l’arrêt de l’activité économique… s’est traduit par une forte augmentation des achats en ligne”. Mais pas seulement, car “avant cette récente affluence, la Marketplace africaine avait terminé l’année 2019 avec 6,1 millions de consommateurs actifs sur ses sites web, contre 4 millions une année auparavant”, souligne BBC Afrique.
En outre, “avec la propagation du virus, Jumia a élargi son offre en matière d’épicerie et de produits sanitaires, a introduit des options de livraison sans contact et a encouragé les paiements par voie électronique ou par mobile money”.
Il n’est pas inutile de rappeler que Jumia est une start-up en ligne tricéphale (trois têtes) : un marché avec un milliard de visites annuelles largement dominé par des “vendeurs actifs”; une branche logistique qui gère les expéditions et les livraisons; et une plateforme de paiement.
Jusque-là tout va bien ou presque. Car, si 4 jours après son entrée en Bourse, l’action de Jumia atteignait 49,77 dollars, portant ainsi sa valeur à 3,8 milliards de dollars, la tournure des événments a été moins gaie pour la start-up.
En effet, “en quelques semaines, souligne BBC, l’action de Jumia a subi une chute spectaculaire, accablée par des allégations de fraude et de pertes dissimulées, des accusations portées par un vendeur à découvert, d’embarrassantes poursuites pour fraude devant les tribunaux de New York et un désastre en termes de relations publiques sur son africanité”. Depuis août 2019, l’action se situe à seulement 2,15 dollars.
Dans un effort visant à renouer avec la rentabilité, Jumia a dû quitter trois de ses marchés phares, à savoir le Rwanda, la Tanzanie et le Cameroun, avons-nous appris.
A tout s’ajoute le fait que Jumia a payé 1,6 million de dollars pour expédier et livrer aux acheteurs que ce qu’elle a gagné.
Une autre difficulté de Jumia est expliquée par un de ses concurrents à Lagos (Nigeria), Dr Olumide Olusanya, lequel pense que “… la principale raison pour laquelle la Jumia a été cotée au NYSE était de permettre à ses investisseurs d’avoir de l’argent”.
Mais Jeremy Hodara répond: “c’était le bon moment et le bon endroit pour faire passer l’entreprise au niveau supérieur, lui apporter plus de visibilité et lui donner accès à un nouvel ensemble d’actionnaires et d’investisseurs”.
Les critiques se focalisent aussi sur l’africanité de Jumia. En effet, comment peut-elle être africaine quand son siège est situé à Berlin (Allemagne), son équipe de techniciens et produits à Porto (Portugal) parce que “l’Afrique manque de talents” (avait déclaré Poignonnec, l’un des PDG, sur la chaîne de télévision CNBC) et sa direction à Dubaï (Émirats arabes unis)?
De ce point de vue, il s’agit plutôt “d’une société occidentale qui exploite l’identité africaine pour en tirer le plus de bénéfice possible et tirer profit du continent”.
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